frontispice

La pédagogie universitaire à l’épreuve
de la relation de commande
dans l’encadrement d’atelier

• Sommaire du no 11

Claire Carriou université Paris Ouest, Nanterre-la Défense Elsa Vivant École des Ponts ParisTech, LATTS

La pédagogie universitaire à l’épreuve de la relation de commande dans l’encadrement d’atelier, Riurba no 11, janvier 2021.
URL : https://www.riurba.review/article/11-atelier-1/commande/
Article publié le 1er oct. 2022

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Claire Carriou, Elsa Vivant
Article publié le 1er oct. 2022
  • Abstract
  • Résumé

Urban studio teaching put to the test by a professional third party

This article aims to contribute to the understanding of the stakes and effects of the commissioning relationship in workshops, by focusing the analysis on what the presence of a third party implies in the pedagogical relationship. We analyse how teachers negotiate their position with the different interlocutors involved in the workshop. The article highlights how these experiences re-interrogate the role of the teacher at the university and shake up the traditional position of the academic-scholar whose role was to transmit and discuss knowledge. In the first part, we propose a historical perspective of the workshop and the positions held by the teacher caught in the tension between academicization and professionalize in a context of austerity. The following sections are devoted to the analysis of the various roles taken on by the supervisor, which involve the deployment of a work of adjustment (of expectations), shift (of positions) and support (of a project).

Cet article vise à contribuer à la compréhension des enjeux, effets et zones d’ombres de la relation de commande dans les ateliers, en centrant l’analyse sur ce qu’implique la présence d’un tiers dans la relation pédagogique. Nous analysons comment les enseignants négocient leur position avec les différents interlocuteurs engagés dans l’atelier. L’article met en évidence comment ces expériences réinterrogent le rôle de l’enseignant à l’université et bousculent la position traditionnelle de l’universitaire-sachant, dont le rôle était de transmettre et de discuter des savoirs. Dans une première partie, nous proposons une mise en perspective historique de l’exercice de l’atelier et des positions tenues par l’enseignant encadrant pris en tension entre académisation et injonction à la professionnalisation dans un contexte d’austérité budgétaire. Les parties suivantes sont consacrées à la présentation et à l’analyse détaillée des divers rôles endossés par l’encadrant, qui impliquent le déploiement d’un travail d’ajustement (des attentes), de décalage (des positions) et d’accompagnement (d’un projet).

Cet encadré technique n’est affiché que pour les administrateurs
post->ID de l’article : 1190 • Résumé en_US : 2436 • Résumé fr_FR : 2433 •

Introduction

Voilà dix années que nous encadrons, chacune dans nos universités respectives (université Paris-Nanterre et Université Paris-Est Marne-la-Vallée), un atelier d’urbanisme. En dépit de notre longue expérience, l’atelier nous apparaît, chaque fois, une expérience renouvelée, émaillée d’épreuves, tant il recompose les modalités de l’enseignement et la nature de ce qui est enseigné. Pour les étudiants comme pour nous, enseignantes, il est tour à tour éprouvant, passionnant, déroutant, riche… inattendu dans tous les cas. L’atelier est en effet un des lieux où s’invente et se négocie le difficile chemin entre science et art, entendu ici au sens large d’art de faire, propre aux formations en urbanisme (Topalov, 1989[1]Topalov C. (1989). « L’urbanisme comme mouvement social. Militants et professionnels du City Planning aux États-Unis (1909-1917) », Annales de la recherche urbaine, n° 44-45, p. 139-154. ; Berdoulay et Claval, 2001[2]Berdoulay V, Claval P. (2001). Aux débuts de l’urbanisme français, Paris, L’Harmattan. ; Claude, 2006[3]Claude V. (2006). Faire la ville. Les métiers de l’urbanisme au XXe siècle, Marseille, Parenthèses.). Dans cet espace-temps, qui associe formation par le projet et méthodologies de l’enquête tirées des sciences sociales, nous nous ingénions, sous des formes variées, à articuler autant que faire se peut savoirs académiques sur la ville et perspectives d’action opérationnelles. Son encadrement nous place dans une position de dialogue avec des interlocuteurs multiples, étudiants, bien sûr, institutions de tutelle et pairs, mais aussi professionnels potentiellement financeurs, qui nous obligent à réinventer à chaque fois le format de l’exercice et la nature des interactions avec ces interlocuteurs.

L’objet de cet article est précisément l’étude des recompositions du métier d’enseignant-chercheur qu’induit l’introduction d’un tiers – le commanditaire professionnel – dans la relation pédagogique. Autant la place singulière de la discipline « urbanisme » au sein de l’université française a déjà été étudiée (notamment Baudoui, 1988[4]Baudoui R. (1988). La naissance de l’École des Hautes Études Urbaines et le premier enseignement de l’urbanisme en France, des années 1910 aux années 1920, Paris, École d’architecture de Paris-Villemin/ARDU-Paris VIII. ; Chevalier, 2000[5]Chevalier G. (2000). « L’entrée de l’urbanisme à l’université : la création de l’institut d’urbanisme (1921-1924) », Genèses, n° 39, p. 98-120. ; Payre, 2005[6]Payre R. (2005). « Un savoir “utilitaire, scientifique et vulgarisateur” : la ville dans La vie urbaine, objet de science et objet de réforme (1919-1939) », Genèses, n° 60, « La ville des savants », p. 5-30.), autant la pratique de l’atelier en tant que format pédagogique spécifique y demeure encore peu analysée et discutée (Bastin et Scherrer, 2018[7]Bastin A, Scherrer F. (2018). « La pédagogie de l’atelier en urbanismeRevue internationale d’urbanisme, n° 5.), en particulier lorsqu’elle est engagée dans le cadre d’une commande (Carriou, 2018[8]Carriou C. (2018). « Former “hors les murs”. L’expérience des “commandes” financées au sein du master d’urbanisme de l’université Paris Nanterre », dossier « Les activités et les métiers de l’architecture et de l’urbanisme au miroir des formations », coordonné par C. Cohen et L. Devisme, Cahiers Ramau, n° 9, p. 74-86. ; Gomes et Bognon, 2018[9]Gomes P, Bognon S. (2018). « L’atelier pédagogique en urbanisme : apport des commanditaires à l’apprentissage par problèmes appliqués », Territoires en mouvement, n° 39-40.). En tant qu’enseignantes d’ateliers, nous avons ainsi souvent eu la sensation d’être démunies pour accompagner des étudiants dans ces configurations d’acteurs complexes, en particulier au début de nos carrières, d’autant que les sujets pouvaient être très éloignés de nos sujets de recherche. Aussi cet article vise-t-il à contribuer à la compréhension des enjeux, effets et zones d’ombres de cette expérience pédagogique, telle qu’elle est menée en France, sur la posture des enseignants-chercheurs. Par la confrontation de nos expériences, nous proposons d’analyser la manière avec laquelle, au cours de cet exercice, nous négocions notre position vis-à-vis des différents interlocuteurs engagés dans l’atelier, en particulier les commanditaires professionnels. Notre rôle n’est plus tant, comme nous souhaitons le montrer, de transmettre et discuter des savoirs, mais bien plutôt de ménager un espace réflexif et méthodologique singulier dans la relation qu’il s’agit d’instaurer avec un acteur tiers.

Croiser nos expériences de dix années d’encadrement d’ateliers est pour nous l’occasion d’une mise à plat et d’une objectivation de démarches pédagogiques dans lesquelles nous nous sommes pleinement engagées mais qui, faute d’espace de discussion, sont restées souvent intuitives. Du reste, l’actualité éditoriale récente[10]Voir les numéros spéciaux des revues Cahiers Ramau et Territoires en mouvement, tous deux parus en 2018 : Cahiers Ramau. (2018). Dossier « L’architecture et l’urbanisme. Au miroir des formations », Cohen C, Devisme L (dir.), Paris, Éditions de la Villette ; Territoire en mouvement. (2018). Dossier « Former à l’aménagement et l’urbanisme : enjeux épistémologiques et pédagogiques ». Notons que la question de l’atelier, et plus spécifiquement de l’apprentissage par la pratique, est discutée depuis plusieurs années dans les pays anglophones (voir, par exemple, la revue Journal of Planning Education and Research). illustre les préoccupations croissantes des enseignants-chercheurs sur ces pratiques et le besoin partagé de réfléchir aux enjeux qu’elles portent. C’est aussi formaliser une réflexivité sur des pratiques dont les enjeux, nous en faisons l’hypothèse, dépassent le seul cadre des formations en urbanisme. Les ateliers offrent en effet un point de vue privilégié à travers lequel observer un certain nombre de reconfigurations en cours, qui remanient en profondeur une large part des métiers d’enseignants-chercheurs. Nous pensons en particulier à la remise en cause progressive de la position historique de (relative) distance de l’université par rapport au monde social (Wittorski, 2008[11]Wittorski R. (2008). « La professionnalisation », Savoirs, n° 17, p. 9-36.). Cette remise en cause est portée à la fois par les injonctions croissantes à la professionnalisation et à la « responsabilité sociale » des universités en France, les attentes des étudiants ou encore le souhait d’enseignants de professionnaliser leur enseignement[12]On observe, par exemple, le déploiement de formats pédagogiques proches de l’atelier dans d’autres disciplines des sciences sociales.. Enfin, dans un contexte d’accroissement des tensions budgétaires au sein des universités, le cas des ateliers amène à réfléchir aux formes et conditions de la monétarisation du travail des enseignants et des étudiants.

Sur le plan méthodologique, l’analyse s’appuie sur des matériaux empiriques de natures diverses. La matière première est fournie par les différentes strates d’observations et analyses de nos propres expériences d’enseignantes-chercheures lors de ces dix dernières années dans nos universités respectives. À partir de nos notes prises lors des suivis de ces ateliers, nous avons pu reconstituer, rétrospectivement, le déroulé de ces ateliers et retracer le fil des questions et difficultés qu’ils ont posées. Cette méthode particulière de reconstitution des matériaux a posteriori présente des biais évidents dans l’objectivation des connaissances (oublis ou réinterprétations). Mais elle permet de faire émerger des convergences d’expériences, de rendre visibles des tensions structurantes, en somme de mettre à jour ce qui, pour nous, est fondamentalement en jeu dans la tâche d’encadrement des ateliers, au-delà des cas particuliers. Le croisement de nos expériences a conforté cette approche. Pour contrebalancer ces biais, nous avons doublé ce travail de recollement dans le temps d’un processus d’enquêtes plus cadré, sur le plan méthodologique, de plusieurs ateliers, menées en 2016 et 2017. Lors de ces ateliers, nous avons accordé une attention plus aiguisée aux processus de dialogue engagés. Enfin, pour éviter l’asymétrie qu’introduisent notre regard et notre position, nous avons complété ce matériau par des entretiens réalisés auprès de professionnels commanditaires[13]En raison d’un principe de confidentialité qui nous lie aux commanditaires, nous ne pouvons en détailler les identités.. Ainsi avons-nous fait le choix, dans cet article, de ne pas limiter l’analyse aux seuls cas que nous avons le plus documentés ; cela n’aurait pas permis d’appréhender la complexité des enjeux soulevés par cette pratique pédagogique tout comme la récurrence des épreuves rencontrées.

L’article met en évidence comment ces expériences réinterrogent le rôle de l’enseignant à l’université et bousculent la position traditionnelle de l’universitaire-sachant. Dans une première partie, nous proposons une brève mise en perspective historique de l’exercice de l’atelier en urbanisme et des positions tenues par l’enseignant encadrant. Cet historique exploratoire permet de mieux saisir la spécificité de notre posture actuelle et des enjeux associés à la tension produite par les exigences contradictoires qui pèsent sur l’université, entre professionnalisation et académisation. Les parties suivantes sont consacrées à la présentation et à l’analyse détaillée des divers rôles endossés par l’encadrant. À partir de la description de quelques situations emblématiques de cet exercice, nous mettons en évidence comment l’encadrement d’atelier implique le déploiement d’un travail d’ajustement (des attentes) – deuxième partie –, de décalage (des positions) – troisième partie – et d’accompagnement (d’un projet) – quatrième partie. Ces différentes formes d’encadrement modifient notre position en tant qu’enseignant qui, par un exercice qui s’appuie sur le déploiement de la réflexivité des étudiants, engage celle de l’enseignant dans sa pratique (Schön, 1983[14]Schön DA. (1983). The reflective practitioner: How professionals think in action).

L’atelier, un exercice aux enjeux renouvelés

Si l’atelier est aujourd’hui un incontournable des formations en urbanisme, il n’en a pas toujours été ainsi, du moins pas selon les mêmes configurations. Il apparaît même comme une invention relativement récente dans les formations en urbanisme, si l’on se réfère aux quelques travaux qui ont porté sur la genèse des formations universitaires en urbanisme[15]Quand bien même ces travaux ont peu évoqué la question de l’atelier en tant que format pédagogique spécifique. (Bastin et Scherrer 2018[16]Op. cit.). Pendant toute une première période, qui s’étend de la constitution de la première formation d’urbanisme à l’université (création de l’Institut d’urbanisme de l’université de Paris, en 1924) jusqu’aux années 1960, il n’y avait pas d’atelier dans les enseignements. Cet institut constituait, à ses débuts tout au moins, un lieu important de circulation des acteurs et de savoirs du monde universitaire au monde professionnel, en raison de la multipositionnalité des principaux enseignants (Royer, 1964, p. 91[17]Royer J. (1964). L’institut d’Urbanisme de l’Université de Paris, Urbanisme, n° 82-83, p. 91. ; George, 1965[18]George P. (1965). « Enseignement et recherche en urbanisme », Annales de Géographie, t. 74, n° 406, p. 733-736 [En ligne ; Ihrig, 1969, p. 134[19]Ihrig D. (1969). « Évolution de l’enseignement de l’urbanisme en FrancePeriodica Polytechnica. Architecture, vol. 13, n° 3-4, p. 131-145. ; Baudoui, 1988[20]Op. cit. ; Calabi, 1998[21]Calabi D. (1998), Marcel Poëte et le Paris des années vingt : aux origines de l’Histoire des villes, Paris, L’Harmattan. ; Chevalier, 2000 p. 116[22]Op. cit. ; Payre, 2005[23]Op. cit. ; Busquet et Carriou, 2007[24]Busquet G, Carriou C. (2007). « Entre art et science, l’histoire à l’Institut d’urbanisme de l’Université de Paris (1919-1971) », Espaces et sociétés, n° 130, p. 57-70.). Mais le travail en atelier restait l’apanage des Beaux-Arts, où étaient formés les architectes (Langereau, 2001[25]Langereau E. (2001). L’État et l’architecture. 1958-1981. Une politique publique ?, Paris, comité d’histoire du ministère de la Culture, éditions Picard.). Une première expérience d’atelier d’urbanisme prend forme en 1938 à l’initiative d’étudiants frondeurs qui reprochent à l’enseignement son manque de pratique et sa distance de l’actualité (George, 1965[26]Op. cit. ; Ihrig, 1969[27]Op. cit.). Ces étudiants, architectes pour la plupart, fondent, hors les murs de l’institut, « l’Atelier Supérieur d’Urbanisme Appliqué » (idem). Cette tentative est un premier essai de transfert vers le champ de l’urbanisme d’un apprentissage par la pratique en architecture, mais elle demeure isolée et temporaire. L’expérience n’est pas poursuivie dans les années 1950 (Auzelle, 1952[28]Auzelle R. (1952). « Notes sur l’enseignement à l’Institut d’urbanisme de l’Université de Paris », La Vie urbaine.). Elle porte toutefois les germes de l’évolution des formations en urbanisme, qui se produit la décennie suivante.

Il faut attendre les années 1960, avec la reconfiguration forte du panorama des formations en urbanisme, pour que se diffuse le principe pédagogique de l’atelier, dans un contexte de transformation radicale des pratiques de fabrication de la ville et l’émergence de ses premières critiques. Étudiants en architecture et en sociologie, mais aussi institutions et organismes publics et privés en charge de l’urbanisme, remettent en cause les méthodes d’enseignement et leur décalage par rapport aux questions urbaines d’actualités (Violeau, 2005[29]Violeau JL. (2005). Les architectes et Mai 68, Paris, Éditions Recherches. ; Panerai, 2017[30]Panerai P. (2017). « Le retour à la ville ». Tous urbains, n° 19-20(3), p. 48-54. doi:10.3917/tu.019.0048. ; Lefèbvre, 2017[31]Lefebvre H. (2017). « Projet de programme pour l’introduction des sciences sociales dans l’enseignement de l’architecture et de l’urbanisme », Tous urbains, n° 19-20 (3), p. 83-87 [En ligne). Se développent alors de nouveaux lieux de réflexion et formation à l’urbanisme, d’abord en parallèle de l’université (bureaux d’étude, centre de recherche, organismes publics et privés) (Claude, 2006[32]Op. cit.), puis en son sein, en particulier au Centre Universitaire de Vincennes. De nouvelles filières universitaires en « urbanisme et aménagement », où l’atelier figure désormais en bonne place, essaiment dans l’ensemble de la France, au cours des années 1970 et 1980. Elles sont principalement portées par des géographes (Merlin, 1981[33]Merlin P. (1981). « Une histoire faite de paradoxes, 1968-1980 : où en est l’enseignement de l’urbanisme douze ans après ? » Métropolis.), en partenariat avec des professionnels, dont un certain nombre se reconvertit dans une carrière académique (et inversement). Ce dialogue renouvelé est facilité par la diffusion et le crédit apporté aux discours critiques au sein même des institutions et de l’appareil d’État, voire même « tout (contre) l’État », pour reprendre la formule d’Amiot (Amiot, 1986[34]Amiot M. (1986). Contre l’État, les sociologues : éléments pour une histoire de la sociologie urbaine en France (1900-1980), Paris, Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales. ; Topalov, 2013[35]Topalov C. (2013). « Trente ans de sociologie urbaine. Un point de vue français », Métropolitiques, 16 octobre 2013 [En ligne). L’atelier est alors l’occasion, bien comprise par les deux parties, d’un échange de fond sur un sujet, à l’occasion duquel le registre critique est attendu. Il répond également à une croissance de la demande d’expertise par des collectivités locales devenues compétentes en matière d’urbanisme, d’aménagement et de développement économique avec la première décentralisation dans la décennie 1980.

C’est dans ce contexte que se met en place une spécificité française par rapport aux autres pays, où se généralise également l’atelier comme modalité pédagogique majeur dans les cursus en urbanisme : la systématisation du conventionnement avec un acteur tiers et le versement d’une contribution financière à l’étude réalisée. Le versement de cette contribution financière s’expliquerait par la structuration de ces nouvelles formations, dont le cursus déroge aux normes institutionnelles. La plupart d’entre-elles se déroulent sur 18 à 24 mois, alors que les diplômes de troisième cycle universitaire ne sont financés que sur 12 mois. La recherche de financements complémentaires serait, selon un ancien président de l’Aperau ayant connu la mise en place de ces DESS (Diplôme d’Études Supérieures Spécialisées), à l’origine de cette pratique de la commande comme mode d’exercice en lien avec la pratique et l’autofinancement. La proximité entre ces formations et les mondes opérationnels et décisionnels locaux a rarement été étudiée en tant que telle mais elle est évoquée dans certains travaux, comme ceux de Rosemberg (2000[36]Rosemberg M. (2000). Le marketing urbain en question. Production d’espace et de discours dans quatre projets de ville, Paris, Anthropos.) pour le cas lillois et de Pichon (2015[37]Pichon M. (2015). « Former aux métiers de la ville : le rôle des géographes dans la mise en place de formations en aménagement et urbanisme (1970-1990) », Colloque La fabrique de la ville. Rencontres internationales en urbanisme (organisées par l’APERAU), Rennes, 1-5 juin.) pour la formation lyonnaise. Si l’on en croit les témoignages des enseignants-chercheurs de cette époque, leur position et autorité face aux professionnels étaient alors incontestées. C’est là sans doute l’une des différences notables avec ce qui caractérise la situation actuelle.

Deux tendances contradictoires sont à l’œuvre aujourd’hui et renouvellent les enjeux propres à l’exercice de l’atelier. La première se joue en interne à l’université, où les nouvelles générations d’enseignants-chercheurs sont prises en tension entre une injonction à l’académisation des carrières (par l’injonction à la publication et la légitimation par la recherche) et une exigence de professionnalisation des formations (demandant une implication forte dans le suivi quotidien des étudiants et l’entretien de relations partenariales avec les mondes opérationnels). La seconde tendance est celle de la technicisation des demandes du monde opérationnel par rapport aux ateliers. Les intitulés et cahiers des charges des commandes apparaissent de plus en plus techniques, et les discours critiques plus difficiles à porter. Ainsi, la formulation initiale d’un cahier des charges s’apparentait à une étude de marché avec des attendus précis (encadré 1).

Encadré 1. Première version du cahier des charges (2015)

« Aider l’organisme financeur de logement Y à identifier le potentiel de développement du logement locatif intermédiaire sur le territoire X pouvant répondre à des besoins en logements exprimés ou potentiels des salariés du territoire. […] Le périmètre géographique de cette étude est le territoire X, qu’il conviendra néanmoins de comparer aux territoires limitrophes pouvant présenter une offre concurrentielle. Les résultats attendus de l’étude sont :

  • une analyse détaillée du marché du logement sur le territoire (par segment, par partenaires et cartographiée) ;
  • un focus sur le logement intermédiaire existant (prix, acteurs, localisations, occupation, gestion, difficultés éventuelles de mises en location, etc.) ;
  • un focus sur l’attractivité du territoire ;
  • une évaluation (quantitative et qualitative) d’une demande potentielle de ménages salariés pour du logement intermédiaire ;
  • une esquisse de programmation de logement intermédiaire en cohérence avec cette évaluation (nombre, typologies, prix, localisations de futurs projets éventuels, etc.) ;
  • des recommandations pour organiser la commercialisation de la nouvelle offre (circuit, relais, mobilisation du réseau de l’organisme Y, mobilisation des collectivités, etc.) et s’assurer des conditions de son attractivité (localisations, cadre de vie, aménagement, etc.). »

La liste des ateliers que nous avons, chacune, encadrés depuis dix années témoigne de la diversité des sujets et de leur proximité avec les attentes des commanditaires professionnels (tableaux 1 et 2)[38]Notons que l’encadrement d’atelier nous a été assigné à notre prise de poste, sans préparation particulière.. Leur intitulé traduit par ailleurs une tendance à l’abandon de sujets relatifs à la composition urbaine au profit de sujets d’études ou de diagnostics, qui positionnent les apprentis urbanistes dans un rôle de futurs assistants à maîtrise d’ouvrage. Dans ce cadre, les étudiants sont invités à proposer une analyse d’une situation ou problème, pour laquelle ils réalisent un travail d’enquête, en mobilisant des méthodes tirées des sciences sociales. Le constat de cette évolution des sujets d’atelier mériterait néanmoins d’être creusé, avant d’en tirer de plus larges conclusions sur l’évolution de la formation en urbanisme.

Tableau 1. Ateliers encadrés au sein de l’université Paris Nanterre, de 2009 à 2021.
Tableau 2. Ateliers encadrés au sein de l’université Paris-Est-Marne-la-Vallée, de 2007 à 2017.

Dans un contexte d’austérité budgétaire, l’atelier universitaire se substitue dans certains cas au recours à un prestataire. Cette tendance rejoint les attentes de professionnalisation des étudiants et les injonctions à la recherche de ressources propres de l’université. Mais alors qu’émerge une demande forte d’ouverture de l’université par rapport au monde social, le mouvement de fond semble paradoxalement être celui d’une spécialisation et division sociale du travail entre la recherche académique et le monde professionnel. La pratique de l’atelier nous place ainsi dans une tension très forte, d’une ampleur nouvelle, entre ces enjeux contradictoires d’académisation (des carrières) et de professionnalisation (des formations). Comment, aujourd’hui, articuler des mondes dont les logiques profondes (reconnaissance, rapport à l’action, etc.) tendent à se dissocier ? Quels en sont les effets sur le(s) rôle(s) de l’enseignant dans le cadre de l’atelier, qui apparaît comme un révélateur de ces tensions ?

Cadrer et ajuster les attentes

Alors que dans les travaux anglophones sur l’apprentissage par l’expérience dans les disciplines du planning, la question des relations à engager avec le commanditaire est peu traitée (Kotval, 2003[39]Kotval, Z. (2003). « University extension and urban planning programs: An efficient partnership », Journal of Extension, n° 41(1) [En ligne), nos analyses soulignent, au contraire, qu’un des aspects les plus importants du travail d’encadrement d’atelier se joue, en coulisse, dans la relation à construire avec le commanditaire. Ce commanditaire, il convient d’abord de le trouver, mais surtout lui faire comprendre la nature très singulière de l’exercice et du rôle qu’il y joue : en dépit de cette appellation, il n’est pas, à proprement parler, un « commanditaire » au sens classique du maître d’ouvrage faisant appel à un prestataire. Si l’exercice est qualifié de « commande », ce terme est un abus de langage et ne traduit pas la nature de l’exercice, qui ne relève ni de la prestation, ni du travail universitaire stricto sensu. Encadrer une commande, c’est créer un espace de réflexion intermédiaire entre académisme et opérationnalité, qui implique un travail d’ajustement des attentes. Dans ce processus, le moment de la négociation de la commande est crucial. Il pose un cadre qui passe davantage par la nature de la relation que par le cadre contractuel légal.

Ce cadre relationnel, nous le construisons dès la prise de contact avec le commanditaire potentiel auquel nous proposons nos services et ceux des étudiants, en rappelant le contexte pédagogique et l’incertitude quant à la qualité des résultats, tout en glissant dans la conversation qu’une contribution aux frais serait la bienvenue. C’est en somme une position particulièrement inconfortable, où il s’agit de proposer une collaboration dont on ne peut complètement assurer de la satisfaction retirée. Ce rappel n’est pas que l’exercice d’une honnêteté de principe, mais permet de borner les attentes du commanditaire et rappeler le contexte de la commande : celui d’un exercice pédagogique et non pas d’une étude se substituant à l’intervention de professionnels. Cette situation est souvent facilitée par le fait que les commanditaires sont familiers de l’exercice, des formations et des enseignants eux-mêmes. C’est pourquoi nous mobilisons d’abord nos réseaux professionnels ou amicaux, ou d’anciens étudiants de la formation dans cette recherche de commande. Pour un des ateliers, le partenariat avec un commanditaire préexistait au choix du sujet d’étude. D’autres relèvent d’une démarche volontaire de notre part pour explorer des problématiques ou des territoires nouveaux, ce qui nécessite un travail supplémentaire d’explication de l’exercice, de ses formes et des résultats qui peuvent en être attendus.

Engager une commande, c’est ainsi poser, en amont, un cadre relationnel entre enseignant et commanditaire, qui rende possible le travail à venir. Les professionnels qui se lancent dans un processus de commande ne le font pas par hasard. Mais leur intérêt pour ce type de démarche peut varier et peser différemment dans la relation entre enseignant et commanditaire. Nous avons relevé plusieurs logiques d’engagement dans la commande pour les professionnels. La première concerne les logiques partenariales : les commanditaires ont parfois intérêt à entretenir un partenariat avec l’université, pour des raisons d’alliances locales ou institutionnelles. Le deuxième registre d’intérêt a trait à la dimension proprement universitaire de l’exercice, vu comme un moyen de questionner des pratiques professionnelles installées, ou de sortir d’une vision préconçue d’un problème. Les deux peuvent aussi être liés, comme l’explique ainsi la commanditaire de l’étude de marché sur les logements intermédiaires, qui est aussi une partenaire privilégiée de l’une de nos universités : « on a des présupposés […], on a toujours la prétention de savoir ce que les gens veulent, et ça fait du bien [grâce au travail d’enquête réalisé] d’être confronté à ce qu’ils pensent, vivent. On est dans l’action, pas dans la réflexion, alors ce genre de travail nous donne l’opportunité d’y réfléchir ». Dans un troisième cas, le travail a été mené avec le projet exploratoire de préciser le sujet d’une future étude.

Dans les ateliers que nous avons encadrés depuis dix ans, l’engagement des commanditaires témoigne d’un intérêt pour ce type de démarche, avec ce qu’elle implique de différent d’avec un prestataire habituel : des attentes qui vont de l’envie de partager une expérience avec de futurs jeunes collègues (sous le registre du mentor) au besoin de renouveler les cadres de pensée (s’appuyant sur l’hypothèse (ou le préjugé) que les étudiants auraient des idées nouvelles). Mais cela n’empêche pas qu’émerge un troisième registre d’intérêt, lié à l’opportunité de produire des études à moindre coût : « On est confronté à des difficultés financières et donc on ne peut pas toujours faire appel à des bureaux d’études. Et en même temps, même quand on fait appel à des bureaux d’études, on n’est pas toujours contents »,indique encore la commanditaire de l’étude de marché sur les logements intermédiaires.

Même si les commanditaires sont familiers de l’exercice, engager la commande suppose de réussir à les convaincre de s’investir, à nos côtés, dans un travail, sans que nous sachions à l’avance où il nous conduira. Or ces professionnels font preuve d’une compréhension très fine de leur contexte d’action : même convaincus de l’intérêt qu’il y a, pour eux, à s’impliquer dans une commande, ils ne sont pas toujours prêts à s’y investir, alors qu’ils sont pris dans des exigences, urgences et contraintes multiples, entre agendas surchargés et exigences des élus et/ou de leurs supérieurs. C’est là une étape délicate pour nous, selon notre propre connaissance préalable du terrain et du commanditaire, notre autorité relative dans le monde opérationnel, l’urgence à établir le partenariat. Le travail est à renouveler à chaque nouvelle commande : nous sommes parfois placées en situation de fournir la preuve de notre capacité à encadrer la réalisation d’une étude dans un cadre opérationnel, et il n’est pas rare d’entendre des remarques critiques sur la supposée déconnexion des universitaires par rapport aux réalités de terrain. À ce procès en illégitimité s’ajoutent des modes de domination par l’âge et le genre. Tenir une position d’autorité, y compris dans la posture et la manière de parler, imposer sa présence, évoquer les expériences et partenariats passés, exposer les rapports produits les années antérieures, mais aussi témoigner de sa connaissance des enjeux à des commanditaires sont autant de petites stratégies mobilisées face aux commanditaires pour gagner leur confiance.

Une convention vient formaliser le partenariat. Dans nos deux universités, les termes de ce cadre légal traduisent bien la nature hybride de l’espace créé à l’occasion de cet exercice. Cette convention précise les obligations réciproques, détaille les rôles de chacun et énonce la durée de l’exercice. Elle engage l’université à remettre un rapport au commanditaire sur un sujet dont le cahier des charges, plus ou moins précis, est placé en annexe moyennant une contribution financière qui varie entre 5 000 euros et 8 000 euros. Le faible montant de la rétribution infléchit la dimension verticale et contraignante de la relation, que l’usage du terme « commande » laisse supposer. Il vient rappeler que ce partenariat n’est pas une prestation comme une autre et qu’il autorise une mise à distance des pratiques et cadres de référence habituels des professionnels. La question du montant demandé est donc cruciale : celui-ci ne doit pas être trop élevé pour contenir les attentes du commanditaire et assurer aux étudiants leur statut d’apprenants. Dans les situations dont nous avons l’expérience, il est largement inférieur au seuil de mise en concurrence des marchés publics et peut être pris en charge sous la forme d’une subvention aux activités pédagogiques et non comme la rémunération d’une prestation.

Décaler les positions

Le moment d’entrée dans la commande n’est pas le seul qui conduise à des formes de négociation. L’expérience montre que la réalisation même de l’exercice consiste en un travail continu d’intermédiation des parties impliquées et de reformulation du sujet d’étude, de la manière de le traiter et d’en rendre compte. Ce travail se poursuit jusqu’à la fin de l’exercice, même si plusieurs moments concentrent ces formes d’ajustement, au cours desquels chaque partie est incitée à s’éloigner des zones de confort propres à son monde et à faire un pas de côté. Ce travail conduit à des décalages de positions et d’attendus de la part de chacun.

La question de la définition du sujet et de sa compréhension est au cœur de ces enjeux. Certains commanditaires présentent des questions de fond, très larges, sur un sujet d’actualité (la résidentialisation des grands ensembles), des demandes d’analyse par rapport à une situation qui fait problème (l’usage et l’évaluation d’un espace piéton dans un centre-ville) ou des propositions exploratoires pour la transformation d’un quartier. D’autres viennent parfois avec des intitulés très opérationnels, traduisant littéralement des besoins des services techniques, comme c’est le cas de l’étude de marché sur les logements intermédiaires dont il a été question plus tôt. L’enjeu a alors été d’engager un processus de reformulation et d’ouverture à d’autres horizons disciplinaires, en intégrant des éléments d’analyse sociaux et urbains, afin de s’assurer non seulement de la faisabilité de l’étude, mais aussi de l’intérêt du sujet au regard des attentes universitaires. Il s’agit là de faire en sorte qu’il y a bien matière à mener une enquête et réfléchir. Dans un autre cas étudié, la reformulation a conduit à déplacer l’objet de l’enquête (encadré 2).

Encadré 2. Journal de bord.

Septembre 2014. Première rencontre avec le commanditaire (sans les étudiants) d’un organisme de logement social pour définir le sujet de la commande.
L’accueil est distant mais plutôt bienveillant. L’organisme a engagé depuis quelques années des dispositifs expérimentaux de colocation au sein du logement social à destination des jeunes actifs. Mais l’expérience fonctionne mal, les logements sont peu occupés et les cohabitations complexes. L’objet de la commande serait de définir une charte de bonnes pratiques à diffuser aux locataires pour résoudre ces dysfonctionnements. Nous discutons de manière assez ouverte pendant plus de deux heures des difficultés rencontrées, le courant passe bien. À l’issue de la rencontre, nous décidons de laisser de côté la réalisation de cette charte pour recentrer l’étude sur la pertinence même d’une transférabilité de ces pratiques au sein du logement social, ce qui implique aussi d’analyser les pratiques de colocation au sein du secteur privé et les raisons de leur succès auprès des jeunes actifs.

Dans ces cas, notre rôle a consisté à porter un enjeu pédagogique fort et contribuer à la construction d’un regard critique et réflexif sur les pratiques opérationnelles au-delà de la simple mise en œuvre de savoir-faire. Ce constat est valable plus largement. Se dégagent alors deux options. La première présente l’atelier comme une « démarche [qui] vise à reproduire les pratiques professionnelles et leurs conditions d’exercice en collectivités territoriales, cabinets d’étude ou agences d’urbanisme qui servent de pratiques sociales de références » (Pichon, Leininger-Frézal et Douay, 2017[40]Pichon M, Leininger-Frézal C, Douay N. (2017). « La “professionnalisation” des formations en géographie : spécificité disciplinaire ? », Carnets de géographes [En ligne). La seconde, que nous éprouvons et défendons, est au contraire de construire un cadre méthodologique qui demeure dans un entre-deux. Ces différences d’appréciation et de pratiques de l’atelier renvoient tout à la fois à l’absence de formalisation de l’exercice, aux questionnements internes à la discipline et, plus largement, à la manière dont chacun et chaque institution envisage les enjeux et formes de la professionnalisation des étudiants et leurs effets sur le travail de l’enseignant. Ce travail de reformulation se poursuit tout au long de la commandeet en devient, en un sens, l’enjeu pédagogique. Il s’agit alors d’amener les étudiants à comprendre ce qui fait problème pour le commanditaire, révéler les questions de fond qui sont au cœur du sujet, pour construire une problématique ouvrant un espace de réflexion commun. En cela, l’atelier s’inscrit à la fois dans une perspective universitaire d’approfondissement critique d’une question, et dans la perspective opérationnelle et de professionnalisation des étudiants. Trouver cet entre-deux ne va pas de soi, ni pour les étudiants, ni pour les commanditaires, ni pour nous.

Une manière de clarifier la nature de l’exercice et de la relation est de jouer sur le vocabulaire. Qualifier l’interlocuteur de « commanditaire » renvoie à la logique de prestation auquel il est habitué. L’appeler « partenaire » en donne un tout autre sens. Il n’est plus celui qui passe commande et qui attend un résultat, mais celui qui accompagne l’enseignant et les étudiants dans un exercice pédagogique singulier, dans lequel il endossera lui aussi un rôle pédagogique, celui d’apporter un éclairage différent et complémentaire par son expérience et sa connaissance du contexte opérationnel. Pris au jeu de la pédagogie, il peut alors se détacher de la contingence d’une commande, faire un pas de côté et sortir de sa position habituelle vis-à-vis de prestataire. Dit autrement, si l’atelier amène l’enseignant à endosser de multiples rôles, sa réussite implique que l’interlocuteur professionnel sorte également de son rôle habituel. Tous les rôles sont ici redistribués, les étudiants étant, eux, mis dans une position où la réalisation de leur travail ne vise pas à trouver une solution qui préexisterait pour simplement valider des crédits, mais à éclairer un problème réel pour un partenaire-commanditaire qui sera peut-être un jour leur collègue, prestataire, employeur. Pour eux, l’usage du terme « commande » a un effet performatif : ils se prennent au jeu et attendent en retour du commanditaire d’avoir un effet. L’enjeu est alors « “d’empowermenter” le commanditaire », pour reprendre les propos d’un étudiant au cours du débriefing de la restitution au commanditaire, en déplaçant et reformulant la commande à partir d’un travail d’argumentation et d’explicitation de la démarche. Dans cette perspective, l’atelier réussi est celui qui fait émerger un problème et crée un public autour de ce problème qu’ont reformulé les étudiants, par exemple, par l’organisation par le partenaire d’une réunion réussissant plusieurs acteurs concernés pour présenter le travail des étudiants qui deviennent médiateurs de la discussion, comme dans le cas de la discussion organisée par les étudiants dans la restitution de leur travail sur l’implantation des établissements de soin (encadré 3).

Encadré 3. Journal de bord.

30 janvier 2017, salle de réunion du commanditaire : les étudiants installent quatre tables de travail autour de l’écran de projection. Ils sont fébriles et inquiets : comment le commanditaire va-t-il réagir à leur présentation ? Leur travail ne répond pas à la question initiale mais invite l’équipe de direction de l’organisme, des agents et des responsables syndicaux, à discuter de propositions prospectives qui réinterrogent le sens même de l’organisation, considérations a priori éloignées de leur formation d’urbanistes mais centrales pour comprendre les enjeux urbains de la relocalisation des services de l’organisme commanditaire.

Ces déplacements conduisent à faire le deuil de certaines attentes du côté du commanditaire mais également du côté de l’université. Il s’agit, pour les professionnels, d’accepter d’abandonner certains aspects d’une question, par exemple, l’établissement d’un cahier prescriptif de bonnes pratiques, et d’accepter que les étudiants explorent les aspects les plus controversés d’un sujet. Pris dans la tension de la commande, avec l’obligation de produire quelque chose dans un temps très court, nous devons aussi faire des concessions sur la qualité des matériaux empiriques et l’ampleur des investigations menées. Nous sommes garantes d’une certaine qualité du travail, si ce n’est dans le résultat produit, du moins dans les moyens mis en œuvre. Mais nous devons parfois faire le deuil d’une certaine rigueur académique, par exemple par l’étroitesse de l’échantillon enquêté, la pression du temps et l’inexpérience des étudiants obligeant à assouplir les règles de l’art de la méthode scientifique.

Ces déplacements des uns et des autres n’ont pas toujours lieu, en particulier lorsque la commande est appréhendée par le commanditaire comme l’opportunité d’une prestation bon marché, sans en accepter forcément les spécificités, à savoir le dialogue, le temps passé, les détours, les hésitations et les maladresses de l’apprentissage. Il se positionne alors en situation de donneur d’ordres face à un bureau d’études classique. Or, comme l’indique un des commanditaires des cas étudiés, le processus « fonctionne mal quand la commande est trop opérationnelle, trop orientée vers l’action, quand il n’y a plus d’espace de travail entre la réflexion et l’action. Quand l’espace est trop étroit et ne permet pas de réfléchir ». Un autre aspect qui empêche le déplacement du commanditaire est lié à sa position au sein même de son institution et à sa capacité à faire reconnaître et accepter ce type de démarche. Sous la pression de sa hiérarchie ou des élus, il peut, par exemple, avoir du mal à légitimer le temps passé ou justifier l’investissement dans un nouveau sujet d’étude et reporter son désarroi sur les étudiants et l’enseignant par une exigence démesurée. De même, lorsque le commanditaire est multiple, c’est-à-dire piloté par plusieurs personnes au sein du même organisme ou de plusieurs organismes, la pluralité des interlocuteurs entrave la construction de la relation et du dialogue avec l’encadrant, au risque de créer des malentendus.

Les conditions d’évaluation et de légitimation du travail illustrent bien la difficulté à prendre en compte le décalage opéré par chaque partie. Selon les formations, les pratiques d’évaluation diffèrent. Dans nos universités, le travail fait l’objet d’une soutenance publique à l’université où les commanditaires sont invités à commenter le travail réalisé sans intervenir dans la notation. Dans l’un de nos établissements, celle-ci est définie par un jury d’enseignants extérieur à la relation de commande qui s’est instaurée avec le commanditaire, ce qui peut avoir pour conséquence de placer l’encadrant dans une situation inconfortable : dans ce cas, en effet, la notation n’intervient que sur le travail rendu, et pas sur le travail d’échange et de reformulation engagé par les étudiants avec le commanditaire. À l’inverse, lorsque la notation n’est le fait que de l’encadrant, le processus et l’apport de chacun dans le travail collectif sont certes pris en compte, mais des décalages entre enseignants des différents ateliers sur les modalités d’évaluation peuvent poser problème. Quelles qu’en soient les modalités, cette question de l’évaluation révèle bien toute la complexité de l’exercice, qui mêle des pratiques issues des mondes universitaires et professionnels. L’atelier engage ainsi une réflexion quant à l’objet et le sujet de l’évaluation : collective ou individuelle ? Sur la qualité des connaissances produites ou la pertinence des propositions ? Le résultat ou le processus de travail ? En tenant compte de l’avis du commanditaire ou en ne s’intéressant qu’à des critères académiques ? On ne peut que relever l’insatisfaction d’une note fondée sur le seul résultat et le rendu final, sans prise en compte de la progression des étudiants, de leur investissement dans la démarche, ou encore de leur imagination méthodologique. La relation avec le commanditaire invite elle aussi à prendre en compte un autre régime de validité que celui stricto sensu de la qualité de la production des données et de la problématisation. Notre expérience montre que l’intérêt des ateliers pour les commanditaires ne dépend pas seulement de la qualité du travail fourni. Il tient aussi à la portée des débats engagés au sein de l’institution, qui peuvent faire émerger des espaces de réflexion ou « tiers espaces » inédits, en décalage avec la routine du quotidien. Ils autorisent des moments « d’apprentissage informels » (Carré et Charbonnier, 2003[41]Carré P, Charbonnier O (dir.). (2003). Les apprentissages professionnels informels, Paris, L’Harmattan.), dont les effets sont difficiles à mesurer mais qui permettent à chacun, pour citer un commanditaire, « de repartir, un peu plus riche, un peu plus armé […] [de tenir] des discours politiques qui sont moins fermes et qui prennent mieux en compte des usages ».

Animer, accompagner et soutenir les étudiants

Encadré 4. Journal de bord.

Janvier 2017. Première séance d’atelier de l’année. C’est une longue journée que cette première séance d’atelier de l’année. Après avoir passé deux heures avec le commanditaire dans ses locaux, pour faciliter l’organisation de notre interlocuteur tout en mettant en scène le cadre formel de l’atelier sorti de la salle de TD habituelle, il faut se mettre au travail, ou plutôt mettre au travail les étudiants. Comment les impliquer dans le travail et les engager en tant que groupe ? Comment répondre à la question posée par le commanditaire ? Et d’abord, quelle question pose-t-il ? Et comment s’assurer que le travail sera fait à temps ?

Cet extrait d’un de nos carnets de terrain illustre bien les enjeux ouverts par une première séance d’atelier. Le rapport entre enseignant et étudiants qui s’y institue renvoie davantage à notre capacité à entrer en relation avec un groupe et à l’animer qu’à la seule transmission d’un savoir. Cela implique une multitude de tâches, qui vont de la maîtrise du temps et l’organisation du travail, l’animation des discussions, la distribution des rôles, la gestion des conflits et du leadership, ou encore l’installation d’un climat de confiance.

Certains auteurs ont souligné le rôle de l’enseignant dans l’accompagnement rapproché des étudiants en atelier (Freestone et Wood, 2006[42]Freestone R, Wood D. (2006). « Exploring Strategies for Linking Research and Teaching », Journal for Education in the Built Environment, n° 1(1), p. 94-111.). Nos analyses le confirment : un atelier, c’est d’abord un espace de discussion. Dès les premiers moments du travail, l’enjeu est de dénouer ce qui vient d’être dit par le commanditaire, d’identifier en quoi la position de l’interlocuteur l’amène à présenter le contexte d’une certaine manière et soulever les éléments implicites de son propos. Cette dimension du travail, qui dure tout au long de l’atelier, est indispensable à l’appropriation collective par les étudiants de la question qui leur est posée. Elle implique, pour nous, d’animer la discussion, de donner la parole à tous, et surtout aux plus timides, de s’assurer qu’aucun ne reste dans l’incompréhension. Une séance d’atelier, à la différence d’un cours magistral ou de (la plupart) des travaux dirigés, est avant tout une séance de parole, sur le travail et sur le groupe lui-même, les difficultés qu’il rencontre pour s’organiser et partager l’information, ses désaccords internes et ses conflits. Notre rôle, en tant qu’encadrante, est d’accompagner la structuration du groupe par une répartition du travail par tâche ou sujet, d’assurer la circulation des informations recueillies et de porter l’équipe et sa dynamique de travail, dans une dialectique où alternent les registres de l’autorité et de la proximité. Ces moments d’échange constituent l’espace où se discutent le sens et la finalité du travail, et où s’exerce la réflexivité des étudiants dans un dialogue collectif. La relation qui s’établit avec les étudiants dépasse la seule transmission des savoirs et engage les affects par les heures passées ensemble à discuter, à construire l’analyse, à formuler un problème, à résoudre les désaccords et désamorcer les conflits, à faire ressortir les points importants, à partager les informations, les sensations, les idées et les doutes.

Nous assurons également un travail d’organisation, puisqu’une fois la commande mieux cernée, les étudiants doivent concevoir la méthodologie qui leur permettra d’y répondre. Si, pour nous, celle-ci répond à un phasage assez classique (compréhension du contexte et identification des enjeux locaux en amont d’une phase plus prospective de propositions plus ou moins opérationnelles), amener les étudiants à s’organiser en ce sens ne va pas toujours de soi. Certains commanditaires ont des souhaits précis concernant les attendues de la production de données, un des enjeux de l’atelier est alors d’amener les étudiants à identifier par eux-mêmes ces besoins et les méthodes d’enquêtes à mettre en œuvre. C’est là une des tensions que l’on rencontre entre pédagogie et réponse à une commande : la tentation est grande de mobiliser les étudiants pour les tâches et approches disciplinaires qu’ils maîtrisent davantage (la cartographie numérique pour les uns, les entretiens compréhensifs pour les autres, les approches historiques ou les sciences politiques). Si elle rassure sur la capacité des étudiants à réaliser l’étude demandée, cette organisation s’avère peu propice à la formation à de nouvelles compétences. Parfois, ce sont les contraintes posées par le commanditaire qui font obstacle à l’avancement de l’enquête (encadré 5).

Encadré 5. Journal de bord.

Décembre 2015. Séance de travail avec les étudiants à l’université.
Nous échangeons sur les difficultés méthodologiques de la commande. Comment faire pour travailler sur l’évolution des commerces [de la ville de banlieue parisienne] sans rencontrer les commerçants [ainsi que l’impose le commanditaire] ? Découragement et sentiment partagé d’être dans une impasse. Les discussions sur les moyens de contourner cet obstacle reprennent malgré tout. Un étudiant propose de réaliser une analyse de l’évolution paysagère en comparant les devantures actuelles de celles photographiées deux ans plus tôt par un service de cartographie en ligne.

Or le temps presse. Les étudiants ont généralement moins de deux mois pour réaliser la première phase dite de diagnostic avant sa présentation au commanditaire ; il s’agit alors de les aider à gérer cette temporalité et s’assurer qu’ils ne se laissent pas déborder par la charrette à venir. Au milieu de toutes ces casquettes, celle de l’enseignant encadrant la production d’un travail académique reste centrale. Outre la conception de la méthodologie, il nous revient d’évaluer la pertinence des résultats produits et accompagner les étudiants dans leur interprétation et leur restitution. Nous devons alors arbitrer ou, du moins, rendre possible un arbitrage entre les propositions, accompagner les étudiants dans l’exploitation des résultats de leurs enquêtes, la rédaction collective de leur restitution et la justification de leurs propositions d’intervention. Mais les situations observées révèlent aussi que notre rôle est tout autant de faire comprendre aux étudiants l’importance primordiale du travail de reformulation et de les amener à déployer leur réflexivité par rapport à leur intervention et ses effets (Roakes et Norris-Tirell, 2000[43]Roakes SL, Norris-Tirrell D. (2000). « Community service learning in planning education: A framework for course development », Journal of Planning Education and Research, n° 20, p. 100-10.). Car l’atelier s’effectue dans une double incertitude, incertitude du contexte d’action et surtout incertitude quant à leur propre action. Si les premières semaines d’atelier se déroulent en général (avec plus ou moins de succès, d’inventivité et de qualité) sereinement, l’entrée en phase de restitution (qu’il s’agisse de finaliser une analyse ou de proposer un projet) se frotte toujours à une prise de conscience et un doute quasi existentiel : comment rendre compte du cheminement accompli ? Lorsque l’enjeu de la commande est la formulation de propositions ou de projets, s’ajoute un questionnement sur ce que proposer un projet veut dire. Ces incertitudes sont une source importante de déstabilisation pour les étudiants car, pour eux, questionner la commande n’a rien d’évident. Les heures de discussion, de débriefing, de restitution du travail de chacun, de partage et d’écoute, nous placent dans une posture de maïeuticiennes. C’est particulièrement le cas lorsque le travail des étudiants les conduit à soulever des questions, des enjeux ou des contradictions qui peuvent déstabiliser le commanditaire dans sa position ou ses convictions. Leur restitution doit se faire avec doigté, et nous devenons alors passeuses.

Malgré les difficultés à encadrer cet exercice singulier, et au-delà de critères d’évaluation académiques, notre engagement trouve son sens dans l’observation des changements opérés chez les étudiants qui, dans le meilleur des cas, aboutissent à une prise en charge du groupe par lui-même, où il est temps pour nous de nous mettre en retrait et d’observer le travail s’épanouir. Ce moment ne vient pas toujours, et toujours se font attendre jusqu’aux derniers jours, les moments où l’ensemble du travail se cristallise : les étudiants ont conscience du chemin et du travail accompli, ils partagent une vision de ce qu’ils sont en train de faire, et l’exercice a produit chez eux un changement dans le rapport au travail et à la commande, qu’ils seront en mesure de remobiliser dans leur vie professionnelle à venir.

Conclusion

Encadrer une commande, c’est ainsi mener un travail continu d’ajustement des attentes, de décalage des positions et d’accompagnement des étudiants, pour que chemine une réflexion dans un entre-deux. Au cours de cet exercice, l’enseignant s’improvise tour à tour négociateur, chef d’équipe, coach, maïeuticien, ou encore évaluateur. En adoptant ces différentes postures, son rôle est alors de faciliter le travail de convergence des modes opératoires propres à chacun. Il lui incombe de construire le cadre et les conditions propices pour que chaque partie prenante fasse un pas de côté par rapport au rôle qui lui est habituellement assigné. Tenir ensemble ces enjeux souvent contradictoires ne va pas sans tensions ni compromis.

Notre expérience de l’atelier nous permet de réaffirmer l’importance de la pratique dans l’enseignement, à la fois en tant que vecteur privilégié de familiarisation des étudiants aux réalités du monde professionnel (Gomes et Bognon, 2018[44]Op. cit.), mais aussi comme moyen par lequel peuvent s’expérimenter et s’inventer de nouvelles manières de faire (Vivant, 2018[45]Vivant E. (2018). « Accompagner l’implantation d’un établissement de soins psychiatriques. Les enseignements d’un atelier de programmation urbaine avec les usagers », Cahier Ramau, n° 9, p. 86‑101.). Elle engage également l’idée d’une pratique réflexive qui se construit en acte et se questionne par la rencontre avec des situations et des problématiques nouvelles (Schön, 1987[46]Schön DA. (1987). Educating the Reflective Practitioner, San Francisco, CA, Jossey-Bass.). L’un des apports pédagogiques majeurs est certainement de faire comprendre aux étudiants, par l’expérience (Kolb, 1984[47]Kolb D. (1984). Experiential learning: experience as the source of learning and development, Englewood Cliffs, Prentice Hall.), toute l’importance qu’il y a à décaler les postures pour prendre en compte ce qui n’est pas défini à l’avance, sans pour autant abandonner ses savoirs propres. C’est bien l’idée de faire avec l’incertain, de bousculer les pratiques déjà connues, en supposant que c’est une des manières d’appréhender la complexité des modes de production de la ville contemporaine et leur caractère négocié (Biau et Tapie, 2009[48]Biau V, Tapie G. (2009). La fabrication de la ville. Métiers et organisations, Marseille, Parenthèses.). À ce titre, l’urbanisme, tout en étant ancré dans le monde disciplinaire des sciences sociales, se rapproche, avec l’atelier, des disciplines de projet, comme l’architecture et le design, où le professionnel construit sa professionnalité par la pratique et la réflexivité, à travers les différents projets et sujets sur lesquels il travaille.

Toutefois, si la pédagogie par projet se déploie à l’université, notre expérience de l’atelier nous amène à rappeler qu’elle ne se substitue par aux autres formes plus classiques de l’enseignement universitaire, mais qu’elle vient plutôt les compléter. L’articulation des formats pédagogiques requiert une forte réflexivité des enseignants pour rendre possible le déploiement de celle des étudiants. Elle implique également de développer une conscience des effets de ces dispositifs sur la formation, l’institution universitaire et la posture des enseignants-chercheurs eux-mêmes. Nos expériences d’encadrement d’atelier nous ont permis d’identifier quels sont les éléments et conditions qui les rendent possibles et féconds ; elles témoignent aussi des risques et effets pervers inhérents à de tels décalages.  Ce type de dispositif, faisant intervenir un tiers professionnel dans la relation pédagogique, pose des questions majeures plus larges quant à l’évolution en cours du rôle de l’enseignant-chercheur, notamment sur la question sensible de sa distance au monde social et de son regard critique. Il renvoie à une tension à laquelle sont de plus en plus confrontés, nous semble-t-il, les universités et les enseignants-chercheurs : entre une injonction à l’académisation, qui nous éloigne des savoirs professionnels, et une injonction contraire à la professionnalisation des formations et des attentes des interlocuteurs opérationnels. L’exercice de réflexivité que nous a permis la rédaction de cet article, s’il ne vise pas à la montée en généralité, invite à la vigilance face au risque de dilution de la position de l’enseignant-chercheur en chef de projet d’assistance à la maîtrise d’ouvrage, dans un contexte de diffusion des enseignements de type atelier et des formes de monétarisation de son travail et de celui des étudiants. Nos expériences montrent qu’il est possible, et même attendu par certains de nos partenaires, de maintenir une posture critique et pédagogique par la pratique et au contact du monde opérationnel, mais que cela nécessite de construire un cadre relationnel ad hoc.


[1] Topalov C. (1989). « L’urbanisme comme mouvement social. Militants et professionnels du City Planning aux États-Unis (1909-1917) », Annales de la recherche urbaine, n° 44-45, p. 139-154.

[2] Berdoulay V, Claval P. (2001). Aux débuts de l’urbanisme français, Paris, L’Harmattan.

[3] Claude V. (2006). Faire la ville. Les métiers de l’urbanisme au XXe siècle, Marseille, Parenthèses.

[4] Baudoui R. (1988). La naissance de l’École des Hautes Études Urbaines et le premier enseignement de l’urbanisme en France, des années 1910 aux années 1920, Paris, École d’architecture de Paris-Villemin/ARDU-Paris VIII.

[5] Chevalier G. (2000). « L’entrée de l’urbanisme à l’université : la création de l’institut d’urbanisme (1921-1924) », Genèses, n° 39, p. 98-120.

[6] Payre R. (2005). « Un savoir “utilitaire, scientifique et vulgarisateur” : la ville dans La vie urbaine, objet de science et objet de réforme (1919-1939) », Genèses, n° 60, « La ville des savants », p. 5-30.

[7] Bastin A, Scherrer F. (2018). « La pédagogie de l’atelier en urbanisme : une revue de la littérature scientifique internationale », Revue internationale d’urbanisme, n° 5.

[8] Carriou C. (2018). « Former “hors les murs”. L’expérience des “commandes” financées au sein du master d’urbanisme de l’université Paris Nanterre », dossier « Les activités et les métiers de l’architecture et de l’urbanisme au miroir des formations », coordonné par C. Cohen et L. Devisme, Cahiers Ramau, n° 9, p. 74-86.

[9] Gomes P, Bognon S. (2018). « L’atelier pédagogique en urbanisme : apport des commanditaires à l’apprentissage par problèmes appliqués », Territoires en mouvement, n° 39-40.

[10] Voir les numéros spéciaux des revues Cahiers Ramau et Territoires en mouvement, tous deux parus en 2018 : Cahiers Ramau. (2018). Dossier « L’architecture et l’urbanisme. Au miroir des formations », Cohen C, Devisme L (dir.), Paris, Éditions de la Villette ; Territoire en mouvement. (2018). Dossier « Former à l’aménagement et l’urbanisme : enjeux épistémologiques et pédagogiques ». Notons que la question de l’atelier, et plus spécifiquement de l’apprentissage par la pratique, est discutée depuis plusieurs années dans les pays anglophones (voir, par exemple, la revue Journal of Planning Education and Research).

[11] Wittorski R. (2008). « La professionnalisation », Savoirs, n° 17, p. 9-36.

[12] On observe, par exemple, le déploiement de formats pédagogiques proches de l’atelier dans d’autres disciplines des sciences sociales.

[13] En raison d’un principe de confidentialité qui nous lie aux commanditaires, nous ne pouvons en détailler les identités.

[14] Schön DA. (1983). The reflective practitioner: How professionals think in action, New York, Basic Books.

[15] Quand bien même ces travaux ont peu évoqué la question de l’atelier en tant que format pédagogique spécifique.

[16] Op. cit.

[17] Royer J. (1964). L’institut d’Urbanisme de l’Université de Paris, Urbanisme, n° 82-83, p. 91.

[18] George P. (1965). « Enseignement et recherche en urbanisme », Annales de Géographie, t. 74, n° 406, p. 733-736 [En ligne].

[19] Ihrig D. (1969). « Évolution de l’enseignement de l’urbanisme en France », Periodica Polytechnica. Architecture, vol. 13, n° 3-4, p. 131-145 [En ligne].

[20] Op. cit.

[21] Calabi D. (1998), Marcel Poëte et le Paris des années vingt : aux origines de l’Histoire des villes, Paris, L’Harmattan.

[22] Op. cit.

[23] Op. cit.

[24] Busquet G, Carriou C. (2007). « Entre art et science, l’histoire à l’Institut d’urbanisme de l’Université de Paris (1919-1971) », Espaces et sociétés, n° 130, p. 57-70.

[25] Langereau E. (2001). L’État et l’architecture. 1958-1981. Une politique publique ?, Paris, comité d’histoire du ministère de la Culture, éditions Picard.

[26] Op. cit.

[27] Op. cit.

[28] Auzelle R. (1952). « Notes sur l’enseignement à l’Institut d’urbanisme de l’Université de Paris », La Vie urbaine.

[29] Violeau JL. (2005). Les architectes et Mai 68, Paris, Éditions Recherches.

[30] Panerai P. (2017). « Le retour à la ville ». Tous urbains, n° 19-20(3), p. 48-54. doi:10.3917/tu.019.0048.

[31] Lefebvre H. (2017). « Projet de programme pour l’introduction des sciences sociales dans l’enseignement de l’architecture et de l’urbanisme », Tous urbains, n° 19-20 (3), p. 83-87 [En ligne].

[32] Op. cit.

[33] Merlin P. (1981). « Une histoire faite de paradoxes, 1968-1980 : où en est l’enseignement de l’urbanisme douze ans après ? » Métropolis.

[34] Amiot M. (1986). Contre l’État, les sociologues : éléments pour une histoire de la sociologie urbaine en France (1900-1980), Paris, Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales.

[35] Topalov C. (2013). « Trente ans de sociologie urbaine. Un point de vue français », Métropolitiques, 16 octobre 2013 [En ligne].

[36] Rosemberg M. (2000). Le marketing urbain en question. Production d’espace et de discours dans quatre projets de ville, Paris, Anthropos.

[37] Pichon M. (2015). « Former aux métiers de la ville : le rôle des géographes dans la mise en place de formations en aménagement et urbanisme (1970-1990) », Colloque La fabrique de la ville. Rencontres internationales en urbanisme (organisées par l’APERAU), Rennes, 1-5 juin.

[38] Notons que l’encadrement d’atelier nous a été assigné à notre prise de poste, sans préparation particulière.

[39] Kotval, Z. (2003). « University extension and urban planning programs: An efficient partnership », Journal of Extension, n° 41(1) [En ligne].

[40] Pichon M, Leininger-Frézal C, Douay N. (2017). « La “professionnalisation” des formations en géographie : spécificité disciplinaire ? », Carnets de géographes [En ligne].

[41] Carré P, Charbonnier O (dir.). (2003). Les apprentissages professionnels informels, Paris, L’Harmattan.

[42] Freestone R, Wood D. (2006). « Exploring Strategies for Linking Research and Teaching », Journal for Education in the Built Environment, n° 1(1), p. 94-111.

[43] Roakes SL, Norris-Tirrell D. (2000). « Community service learning in planning education: A framework for course development », Journal of Planning Education and Research, n° 20, p. 100-10.

[44] Op. cit.

[45] Vivant E. (2018). « Accompagner l’implantation d’un établissement de soins psychiatriques. Les enseignements d’un atelier de programmation urbaine avec les usagers », Cahier Ramau, n° 9, p. 86‑101.

[46] Schön DA. (1987). Educating the Reflective Practitioner, San Francisco, CA, Jossey-Bass.

[47] Kolb D. (1984). Experiential learning: experience as the source of learning and development, Englewood Cliffs, Prentice Hall.

[48] Biau V, Tapie G. (2009). La fabrication de la ville. Métiers et organisations, Marseille, Parenthèses.