juillet 2024

La ville productive à l’heure de la transition écologique

Quand la fonction productive
de l’agriculture
transforme l’aménagement urbain
Ida Kasdi
ID&S, ENPC
Taoufik Souami
EUP-LATTS

Quand la fonction productive
de l’agriculture
transforme l’aménagement urbain
Quand la fonction productive de l’agriculture transforme l’aménagement urbain,
Riurba no
16•17, juillet 2024.
URL : https://www.riurba.review/article/16-productive/quand-la-fonction/
Article publié le 5 juil. 2025
- Abstract
- Résumé
When the productive function of agriculture transforms urban planning
In a classic territorial economy approach, the role of urban developers is to make available potential resources (land, infrastructure, equipment) that industrialists, manufacturers and craftsmen use as factors of production. In this sense, they are outside the productive function. Feedback from urban projects incorporating productive agriculture, rather than farming as a memorial or landscape feature, shows that developers themselves activate resources by working on soil quality, crop and product choices, and the creation of production infrastructure. The developers design activation processes and become protagonists of the productive agricultural function.
Dans une approche d’économie territoriale classique, les aménageurs urbains ont pour rôle de mettre à disposition des ressources potentielles (foncier, infrastructures, équipements) que les industriels, les manufacturiers et les artisans activent comme des facteurs de production. Ils sont, dans ce cadre, extérieurs à la fonction productive. Les retours d’expériences de projets urbains intégrant des agricultures productives et non plus mémorielles ou paysagères montrent que les aménageurs activent par eux-mêmes les ressources en agissant sur la qualité des sols, les choix de cultures et de produits, la réalisation des infrastructures de production. Les aménageurs développent des procédés d’activation et deviennent protagonistes de la fonction agricole productive.
post->ID de l’article : 5755 • Résumé en_US : 5765 • Résumé fr_FR : 5763 • Sous-titre[0] :
Introduction
Le débat sur la ville productive traite de la place des activités artisanales, manufacturières, industrielles au sein des territoires urbains. Il se saisit encore peu des activités productives agricoles (Aurez et Lévy, 2013[1]Aurez V, Lévy JC. (2013). Économie circulaire, écologie et reconstruction industrielle ? Paris, CNCD. ; Crague, 2019[2]Crague G (dir.). (2019). Faire la ville avec l’industrie, Paris, Presses de l’École nationale des ponts et chaussées, 173 p. ; Béhar et al., 2015[3]Béhar D, Loisel M, Rio N, Talandier M. (2015). La ville ordinaire saisie par l’économie : entre système mondialisé et ancrage local. Le cas de l’Île-de-France, Paris, PUCA, 124 p. , Talandier et Pecqueur, 2018[4]Talandier M, Pecqueur B. (2018). Renouveler la géographie économique, Paris, Économica, 304 p. ; Veltz, 2017[5]Veltz P. (2017). La Société hyper-industrielle. Le nouveau capitalisme productif, Paris, La République des idées. ; Ferchaud et al., 2024[6]Ferchaud F, Blein A, Idt J et al. (2024). Aménager la ville productive, Paris, Presses des Mines. ; Observatoire des territoires de l’industrie, 2022[7]Observatoire des territoires de l’industrie. (2022). Intégrer les activités productives dans les villes et les territoires : quels leviers d’action ? Paris, PUCA, 49 p.). Pourtant, l’agriculture productive est l’objet, depuis au moins une décennie en France, d’un foisonnement de créations d’espaces et d’établissements qui lui sont consacrés à l’intérieur des périmètres urbains. Ces créations peuvent prendre différentes formes : des fermes maraîchères urbaines ou périurbaines, des microfermes multifonctionnelles et d’écopâturage, des jardins productifs et des végétalisations comestibles (Bertrand et al., 2022[8]Bertrand L, Giacchè G, Aubry C. (2022), Développer des projets d’agriculture urbaine avec la méthode Meth-Expau®, Versailles, Éditions Quæ, 82 p.).
Les établissements et les sociétés d’aménagement urbain, chargés de construire ou de renouveler en 15-30 ans un « morceau de ville », sont plus nombreux à initier ces créations et ces installations volontaires d’agricultures[9]Voir l’Observatoire de l’agriculture urbaine et des jardins collectifs, association française d’agriculture urbaine professionnelle. (Lagneau, 2020[10]Lagneau A. (2020). Insécurité alimentaire et agriculture urbaine à l’heure du Covid-19, Paris, Institut Paris Région, 4 p.). Ils visent bien par celles-ci une agriculture productive, à la différence de projets plus anciens où la partie « agraire » avait une vocation paysagère, esthétique ou mémorielle (Donadieu, 2003[11]Donadieu P. (2003). « La construction actuelle des villes-campagnes. De l’utopie aux réalités », Histoire urbaine, n° 8(2), p. 157-170. ; Torre et Bourdeau-Lepage, 2013[12]Torre A, Bourdeau-Lepage L. (2013). « Quand l’agriculture s’installe en ville… Désir de nature ou contraintes économiques ? », Métropolitiques, 6 février. ; Scheromm et al., 2014[13]Scheromm P, Perrin C, Soulard C. (2014). « Cultiver en ville… Cultiver la ville ? L’agriculture urbaine à Montpellier », Espaces et sociétés, n° 158(3), p. 49-66.). La fonction productive de l’agriculture est entendue ici comme l’activité économique socialement organisée consistant à créer des biens (produits agricoles, aliments…) et des services à partir de facteurs de production (travail, capital, machines, outils, etc.). Centrale parmi les autres fonctions de l’agriculture dans les représentations du monde agricole (Michel, 1995[14]Michel G. (1995). « Vers de nouvelles fonctions de l’agriculture dans l’espace ? », Économie rurale, n° 229, p. 17-21.), elle était jusque-là absente dans le monde de l’aménagement urbain (Aldhuy et Orillard, 2023[15]Aldhuy J, Orillard C. (2023). « L’économie mixte et l’aménagement urbain en France, XXe-XXIe siècles », Histoire urbaine, n° 68, p. 5-15. ; Claude, 2006[16]Claude V. (2006). Faire la ville. Les métiers de l’urbanisme au XXe siècle, Paris, Parenthèses, 253 p.) où elle émerge.
À différents moments de leur histoire, les aménageurs ont eu à aborder la question de la fonction productive, mais quasi exclusivement pour l’industrie et l’artisanat (Novarina, 2023[17]Novarina G. (2023). Histoire de l’urbanisme : de la Renaissance à nos jours, Paris, Le Moniteur.), jamais pour l’agriculture. Se voulant désormais acteurs de la « ville productive » (ORF, 2018[18]ORF. (2018). « Quelle place pour les activités économiques dans les politiques foncières et les projets d’aménagement », rapport du groupe de travail. ; Lejoux, 2018[19]Lejoux P. (2018). Quelle place pour la zone d’activités économiques dans la fabrique de la ville contemporaine ? dans Baudelle G, Gaultier G, Les nouvelles fabriques de la ville. Objets, référentiels et méthodes, Rennes, Presses universitaires de Rennes, p. 25‑32. ; Talandier, 2016[20]Talandier M. (2016). Mutations des systèmes territoriaux. Vers un modèle résidentialo-productif, HDR Architecture, aménagement de l’espace, Université Grenoble Alpes, 320 p.), ils se confrontent, dans leurs projets, aux concurrences entre, d’une part, les fonctions résidentielles et tertiaires et, d’autre part, les exigences et les conditions des productions industrielle et artisanale (Mazy et Debrie, 2022[21]Mazy K, Debrie J. (2022). « La ville productive : un changement de paradigme pour le projet urbain ? L’exemple des interfaces ville-port », dans Dumont M, Groux A, Paris D (dir.), Le projet et la fabrique urbaine : enseigner, débattre, agir, New York, Peter Lang. ; Ferchaud et al., 2024[22]Ferchaud F et al. (2024). Aménager la ville productive, Paris, Presses des Mines.). Pour réduire ces concurrences, les aménageurs ne peuvent plus recourir aux solutions classiques de l’urbanisme du XXe siècle : spécialiser des territoires urbains pour chacune (zones d’activités, quartiers résidentiels, quartiers d’affaires…) (Vieillard-Baron, 2009[23]Vieillard-Baron H. (2009). « Le zonage en question », Revue Projet, n° 312(5), p. 56-63.), mettre à distance ces fonctions au plus loin des centres. Le principe de la ville productive et durable commande de maintenir ces activités ensemble dans les territoires urbains existants (Gilbart et Mazy, 2023[24]Gilbart A, Mazy K. (2023). « De l’émergence à l’appropriation. Europan et la fabrique du concept de ville productive en contexte métropolitain », Espaces et sociétés, n° 189, p. 95-117. ; Baudelle et Gaultier, 2018[25]Baudelle G, Gaultier G. (2018). Les nouvelles fabriques de la ville. Objets, référentiels et méthodes, Rennes, Presses universitaires de Rennes.).
En insistant sur le caractère productif des activités agricoles programmées dans leurs projets urbains, les aménageurs provoquent l’émergence de la question de la fonction productive agricole, nouvelle pour eux, dans le périmètre de leur travail et dans l’agenda de leurs décisions. Cet article propose d’explorer l’appréhension de la question productive agricole par le monde social de l’aménagement (Boltansky et Thévenot, 2015[26]Boltanski L, Thévenot L. (2015). « Comment s’orienter dans le monde social », Sociologie, n° 6, p. 5-30.) et particulièrement les aménageurs urbains. Il ne vise pas une modélisation généralisable mais présente des éléments de compréhension à partir de cas particuliers qui invitent à réviser l’extension du rapport de l’aménagement avec la fonction productive des industries et de l’artisanat au rapport de l’aménagement avec la fonction productive de l’agriculture.
Des travaux qui éclairent la question de la fonction productive en aménagement
L’introduction de l’agriculture dans la programmation des opérations d’aménagement est sous-tendue par un ensemble de travaux de recherche, d’expertise et d’engagements militants qui présentent ces activités agricoles comme un des piliers de la ville durable (CESE, 2019[27]CESE. (2019). L’agriculture urbaine : un outil déterminant pour des villes durables, CESE, 98 p. ; ANRU, 2022[28]ANRU. (2022). Présentation des 100 lauréats de l’appel à projets. Les Quartiers Fertiles, ANRU, 60 p. ; Bouygues Construction, 2021[29]Bouygues Construction. (2021). « L’agriculture urbaine : quel modèle économique ? », publication du blog Bouygues Construction. ; Fondation Vinci, 2022[30]Fondation Vinci. (2022). « L’agriculture urbaine, de petits espaces à fort rendement pour nourrir les villes ? » [En ligne ; Granchamp-Florentino, 2012[31]Granchamp-Florentino L. (2012). « L’agriculture urbaine, un enjeu de la ville durable », Revue des Sciences sociales, La ville aux défis de l’environnement, n° 47, p. 142-152. ; Dumat et Bories, 2021[32]Dumat C, Bories O. (2021). 12 repères clés pour (se) former à l’agriculture urbaine, Dijon, Educagri, 137 p. ; Fleury et Moustier, 1999[33]Fleury A, Moustier P. (1999). « L’agriculture périurbaine, infrastructure de la ville durable », Cahiers Agricultures, n° 8(4), p. 281-287.). Invités ou engagés à produire des quartiers et des ensembles urbains durables, les aménageurs en espèrent les avantages que les spécialistes de l’agriculture urbaine leur prêtent : paysage qualitatif, services écosystémiques, liens sociaux et de solidarité, développement communautaire, produits alimentaires de qualité, bouclage des flux environnementaux… (Vidal et André, 2009[34]Vidal R, André F. (2009). « Aménager les relations entre la ville et l’agriculture. De nouveaux enjeux territoriaux et une nouvelle approche “agriurbaniste” », Urbia, n° 8, p. 127-142. ; Blanchart et al., 2017[35]Blanchart A et al. (2017). « Contribution des sols à la production de services écosystémiques en milieu urbain – une revue », Environnement urbain, n° 11. ; Boulianne et al., 2010[36]Boulianne M, Olivier-D’Avignon G, Galarneau V. (2010). « Les retombées sociales du jardinage communautaire et collectif dans la conurbation de Québec », VertigO, n° 10(2). ; Daniel, 2018[37]Daniel AC. (2018). « Les micro-fermes urbaines, de nouvelles fabriques agri-urbaines », VertigO, hors-série, n° 31. ; Lageat, 2019[38]Lageat M. (2019). Une caractérisation des services écosystémiques culturels « exogènes » des micro-fermes urbaines en mobilisant l’entrée du paysage, Paris, Agrocampus Ouest, AgroParisTech, INRAE, 22 p.). Sur cette base, les aménageurs procèdent d’une manière classique en réservant à l’agriculture du foncier au sein de leurs périmètres opérationnels (Cerema, 2018[39]Cerema. (2018). L’agriculture urbaine dans les écoquartiers, ministère du Logement, 123 p. ; Deborre, 2019[40]Deborre R. (2019). Dossier agriculture urbaine, la pierre ou la terre ?, dossier thématique Construction 21 [En ligne) et laissent la définition de sa fonction productive aux producteurs.
Cette première appréhension correspond à une position classique des aménageurs, fondée, elle, sur le cadre d’actions publiques inspirées par des travaux de l’économie territoriale : avec la mondialisation de l’économie et l’internationalisation des flux d’investissement, la réponse adoptée en France est le recours à « des stratégies d’offre territoriale » (Thiard, 2005[41]Thiard P. (2005). « L’offre territoriale : un nouveau concept pour le développement des territoires et des métropoles ? », Territoires 2030, n° 1, p. 17-28.). Les collectivités sont encouragées à mettre en avant les conditions offertes par leur territoire (Carroué, 2019[42]Carroué L. (2019). « Chapitre 4. La mondialisation des marchés et des facteurs de production », dans Carroué L, Géographie de la mondialisation, Paris, Armand Colin, p.147-185. ; Artus, 2007[43]Artus P. (2007). « Délocalisations et pressions des marchés financiers », Revue d’économie financière, n° 90, p. 35-44.) pour attirer de « nouvelles entreprises » et des « investissements internationalement mobiles » (Mérenne-Schoumaker, 2011[44]Mérenne-Schoumaker B. (2011). La localisation des industries. Enjeux et dynamiques, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 263 p.). Dans ce cadre, pourtant très discuté (Bouba-Olga et Grossetti, 2018[45]Bouba-Olga O, Grossetti M. (2018). La mythologie CAME (Compétitivité, Attractivité, Métropolisation, Excellence) : comment s’en désintoxiquer ? archives du CNRS. ; Grossetti, 2022[46]Grossetti M. (2022). « L’attractivité, un mythe de l’action publique territoriale », Métropolitiques, 17 janvier.), l’aménagement se voit chargé de mettre à disposition les ressources du territoire afin que les producteurs les mobilisent parmi leurs facteurs de production (Degryse, 2019[47]Degryse C. (2019). « Facteurs de production », dans Degryse C, L’économie en 100 mots d’actualité, Louvain-la-Neuve, De Boeck Supérieur, p. 92-93.). Il aurait pour seul rôle de rendre disponibles ces ressources comme potentiel dont les entreprises se saisiraient à leur convenance (Barney, 1991[48]Barney J. (1991). « Firm resources and sustained competitive advantage », Journal of Management, vol. 17, p. 99‑120. ; Leriche, 2011[49]Leriche F. (2011). « Facteurs de mobilité ou mobilité des facteurs (de production) ? La mise en scène urbaine du capitalisme américain », Miranda, n° 5.) pour, elles, les activer. Nous mobilisons ici la notion d’activation définie par Colletis et Pecqueur (2005[50]Colletis G, Pecqueur B. (2005). « Révélation de ressources spécifiques et coordination située », Économie et institutions, n° 6-7.) comme la transformation d’une ressource potentielle et préexistante (un arbre, par exemple) en un actif utile et valorisé (l’arbre considéré comme du bois pour une scierie) dans un processus de production. Dans le cadre classique de « l’offre territoriale », les aménageurs restent « étrangers » aux activités productives de l’industrie ou de la manufacture, car ils ne se chargent pas directement « d’activer » (Pecqueur, 2003[51]Pecqueur B. (2003). « La construction d’une offre territoriale attractive et durable. Vers une mutation des rapports entreprise-territoire », dans Fontan JM, Klein JL, Lévesque B, Reconversion économique et développement local : le rôle de la société civile, Québec, Presses universitaires du Québec, p. 35-49.) les ressources mises à disposition pour en faire des facteurs de production.
À partir des années 2010, les retours d’expériences (Cerema, 2018[52]Cerema. (2018). L’agriculture urbaine dans les écoquartiers, ministère du Logement, 123 p. ; Deborre, 2019[53]Op. cit.) autour de l’agriculture productive en aménagement urbain livrent des indices qui ne corroborent pas cette vision. Ils montrent des aménageurs qui, non seulement, fournissent des ressources comme potentiels, mais les activent directement pour en faire des facteurs de production. Ils sont bien actifs dans l’amendement des terres, le choix des cultures et des produits, la réalisation des infrastructures de production (serres, irrigation, bâtiments et chemins agricoles…). Ils s’impliquent dans le lancement des fermes et des jardins productifs, dans l’organisation des exploitations, agissant directement dans la mise en place de la fonction agricole productive au sein de leurs opérations (Souami et al., 2024[54]Souami T (dir.). (2024). Aménagement urbain et agriculture. Retours d’expériences et analyses critiques, Paris, Le Moniteur, 237 p.).
Ces indices invitent donc à retourner vers les recherches plus classiques en agriculture afin de préciser la signification de cette fonction productive et des facteurs de production. Dans les travaux d’économie agricole, la fonction productive est l’ensemble des activités organisées qui agencent des moyens et des facteurs de production, afin d’obtenir des produits alimentaires et non alimentaires ainsi que les services qu’ils peuvent rendre par leurs diverses utilisations (Duer et capitaine, 2022[55]Duru M, Capitaine M. (2022). « Évolution des fonctions de l’agriculture : quelles conséquences pour l’agronomie », Agronomie, environnement & société, n° 10(2).). Les facteurs de production sont (Cochet, 2015[56]Cochet H. (2015). « Controverses sur l’efficacité économique des agricultures familiales : indicateurs pour une comparaison rigoureuse avec d’autres agricultures », Revue Tiers Monde, n° 221(1), p. 9-25. ; Guigon et al., 2020[57]Guigon F, Boyrel S, Boyrel D, Prévost P. (2020). « Deux exemples de fermes interrogeant les relations capital foncier-travail-famille », Agronomie, environnement & sociétés, n° 10(2). ; Petit, 2006[58]Petit M. (2006). « L’exploitation agricole familiale : leçons actuelles de débats anciens », Cahiers Agricultures, n° 15(6), p. 486-490.) :
- le travail (main-d’œuvre) : personnels, compétences, savoir-faire, connaissances techniques… ;
- le capital : financements, prêts, aides… ;
- les éléments naturels ou facteurs supports (Deffontaines, 1973[59]Deffontaines JP. (1973). « Analyse du paysage et étude régionale des systèmes de production agricole », Économie rurale, n° 98, p. 3-13.) : sol, eau, climat… ;
- les moyens matériels ou facteurs intermédiaires : engins agricoles, installations techniques, bâtiments agricoles, etc.
Les débats les concernant portent sur la part relative de chacun de ces facteurs de production dans le process (plus ou moins de main-d’œuvre, de capital…) et sur l’efficacité de leur agencement (rentabilité versus rendement…). Ils abordent également l’extension de l’analyse à la mobilisation et l’agencement de ces facteurs de production au regard des externalités de la production sur la durabilité des systèmes socioécologiques (Allaire et Dupeuble, 2004[60]Allaire G, Dupeuble T. (2004). « Des concepts aux indicateurs du développement durable : multidimensionnalité et responsabilisation », Développement durable et territoires [En ligne ; Grémillet et Fosse, 2020[61]Grémillet A, Fosse J. (2020). Les performances économiques et environnementales de l’agriculture : les coûts et bénéfices de l’agroécologie, note d’analyse n° 94, France Stratégie.). Ces travaux nous livrent une grille de lecture afin de mieux identifier les aspects de la fonction productive de l’agriculture investis activement par les aménageurs, et de déceler plus précisément en quoi ils agissent sur cette fonction à travers les facteurs de production.
Les matériaux et la méthode d’une exploration
Pour analyser plus avant le rôle joué par les aménageurs vis-à-vis de la fonction productive agricole, nous avons utilisé la grille des facteurs de production. Nous les avons identifiés et avons suivi leur trace au sein des projets d’aménagement et dans les activités des aménageurs. Ce travail d’identification et d’exploration a été réalisé sur plusieurs projets urbains dans le cadre du programme « Agriculture urbaine » de la chaire « Aménager le Grand Paris[62]Ce dispositif scientifique associe l’École d’Urbanisme de Paris et ses laboratoires de références – le Lab’Urba, le LATTS et le LVMT – à 15 organismes professionnels contribuant à l’aménagement de la métropole du Grand Paris et de la région francilienne. Ses travaux scientifiques et pédagogiques sont conduits par les chercheurs et bénéficient des contributions des opérationnels de l’aménagement ainsi que des étudiants. ».
Cet article s’appuie sur une partie des travaux produits par ce programme, en particulier les études monographiques et les analyses scientifiques de projets d’aménagement intégrant en France et au Canada la création d’activités agricoles. Les terrains étaient : ferme de l’Envol (Cœur Essonne Agglomération), Cœur agro-urbain (Montévrain, Marne-la-Vallée), Serre et jardins productifs des Docks (Saint-Ouen-sur-Seine), Agrocité Gagarine-Truillot (Ivry-sur-Seine), Fresh farm (Downsview Park, Toronto), Community Gardens (Regent Park, Toronto), Black Creek Community Farm (Toronto).
Chacun de ces cas a fait l’objet d’analyses sociologiques sur leur organisation par le biais d’entretiens semi-directifs, d’observations et de visites, dont une partie a permis de produire des relevés audiovisuels[63]Il s’agit de tournages tout au long de la journée de travail sur site, à différents moments des saisons de production. des pratiques de production, des séances collectives d’explicitations des organisations observées. Chacun de ces relevés a été analysé selon une grille questionnant les aspects matériels, techniques, juridiques, organisationnels et humains engagés dans la mise en place de la production agricole. Ils l’ont été en considérant pour chacun les durées de mise en place et de mise en exploitation agricole (allant de 8 à 12 ans), durées organisées différemment selon les étapes des projets d’aménagement (planification, programmation, étude de mise en œuvre, mise en œuvre, exploitation…) et les étapes du projet agricole (études du sol, étude irrigation, étude agronomique et choix des cultures, étude de faisabilité technique et économique, sélection des exploitants, montage des structures juridiques d’exploitation, montage du financement, accompagnement de la mise en exploitation…).
Nous mobilisons dans cet article trois exemples qui permettent d’approfondir la compréhension des activités des aménageurs sur la mise en place de la production agricole dans leur opération. Dans ces trois cas français, les aménageurs ont présenté la fonction productive de l’agriculture comme un objectif majeur de leur opération. Dans deux projets, ils ambitionnent d’utiliser les activités productives agricoles pour favoriser la création ou le maintien d’emplois ne relevant pas du tertiaire et des services. Les trois opérations sont représentatives des objectifs de qualité environnementale, sanitaire et alimentaire assignés aux productions agricoles par l’aménagement urbain. Ils donnent une vue sur une diversité de situations urbaines allant de la construction d’un secteur neuf de ville nouvelle à la rénovation urbaine d’un quartier d’habitat social :
– la ferme de l’Envol (Cœur Essonne Agglomération) : elle a été initiée en 2012 sur un périmètre de 70 ha au sein d’un projet d’aménagement d’une ancienne base aérienne de 300 ha. L’objectif premier du projet est le développement économique et d’activités de production, parmi lesquelles l’agriculture. Une exigence est également constante chez l’aménageur de l’opération : respecter une approche d’agroécologie, faire de l’exploitation un élément du travail sur la qualité environnementale de l’ensemble du projet (collecte et utilisation des eaux de pluie pour l’irrigation, bocage pour le renforcement du paysage et de la renaturation…) ;
– le cœur agro-urbain (Montévrain, Marne-la-Vallée) : il s’agit d’un périmètre de 20 ha « consacré à la production agricole biologique et de proximité, pour des filières courtes de consommation de produits locaux[64]Extrait de la présentation du projet par l’EPA Marne, 2017. ». Il prend place dans un projet d’aménagement de 173 ha visant une qualité environnementale et la diversification des activités par l’implantation d’une zone productive combinant maraîchage, arboriculture et activités d’animation autour de l’agriculture ;
– l’agrocité Gagarine (Ivry-sur-Seine) : traduit l’idée d’une activité agricole productive comme cœur d’un projet de renouvellement urbain de 12 ha. L’objectif est la création de 2,5 ha d’agriculture urbaine conforme également à des attentes environnementales : biodiversité, respect de l’écosystème, intégration à une économie circulaire. Les finalités écologiques sont également revendiquées par la collectivité et l’aménageur qui portent d’une manière volontariste l’installation d’une production agricole.
L’aménagement urbain
fournisseur et activateur de facteurs de production agricole
L’analyse des trois cas permet d’appréhender les actions concrètes menées par les aménageurs pour les quatre facteurs de production de l’agriculture au sein de leur opération : le travail (main-d’œuvre) ; le capital ; les éléments naturels ou facteurs supports (sol, eau…) ; et les moyens matériels (engins, bâtiments…).
Le travail
Les aménageurs dans ces réalisations agricoles productives interviennent sur les questions de main-d’œuvre et de ressources humaines de deux manières. Dans les trois cas, ils mobilisent pour les projets agricoles productifs des savoir-faire et des compétences afin de réaliser des études agropédologiques ou économiques, les montages juridiques, les plans des fermes ainsi que les bâtiments nécessaires à la production (Fleury, 2006[65]Fleury A. (2006), « Quelle ingénierie pour l’agriculture de la ville durable ? », Natures Sciences Sociétés , n°&nbps;14, 399-406.). Ils pilotent ces études et mobilisent pour cela leurs savoir-faire. Ils maintiennent régulièrement la mobilisation de conseils techniques spécialisés en agronomie, en sol ou en gestion agricole tout au long de la mise en place et de la mise en exploitation des terres. En complément, les aménageurs des trois projets ont engagé, directement ou par le biais d’organismes intermédiaires, une personne en charge de finir le montage juridique et comptable de l’exploitation, ou encore le montage de l’organisation opérationnelle de la production agricole.
Deuxième intervention sur le facteur « travail », les aménageurs se chargent de trouver, de mobiliser et d’aider les agriculteurs et exploitants à s’installer et à démarrer l’exploitation. Ils utilisent pour cela les réseaux professionnels et interpersonnels, ou encore l’Appel à Manifestation d’Intérêt (AMI). Dans certains cas, l’aménageur choisit d’engager et de salarier directement l’agriculteur(s) en lui(leur) donnant ensuite une autonomie de gestion. Cette identification et cette mobilisation de l’agriculteur par l’aménageur font de ce dernier un acteur qui active la ressource humaine souvent présente dans le territoire. C’est bien l’aménageur qui l’identifie, vérifie ses compétences et son engagement, produit les actions pour l’intéresser et stabiliser son engagement au sein du projet agricole. À cette partie de travail d’activation, s’en ajoute une seconde : trouver et engager des agriculteurs dont les pratiques sont conformes aux objectifs de qualité environnementale, et dont les compétences permettent de maintenir une activité d’agroécologie résiliente.
Le capital
Dans les trois cas ainsi que tous les cas étudiés dans le cadre de la chaire Aménager le Grand Paris, les aménageurs ou les collectivités locales aménageuses ont largement contribué à constituer les moyens financiers et les investissements de départ pour faire advenir la production agricole. Pour la ferme de l’Envol, Cœur Essonne Agglomération, collectivité maîtresse d’ouvrage de l’opération d’aménagement, a apporté une grande partie du capital de la société coopérative créée pour exploiter la ferme. Elle s’est constituée garante afin d’obtenir des prêts nécessaires pour l’achat des matériels et des engins, ainsi que pour la construction des bâtiments. À Montévrain, l’aménageur finance les études préalables et techniques du sol, de l’irrigation et de distribution des produits agricoles. Il a également tenté d’obtenir les accords de principes afin que les agriculteurs bénéficient des aides à l’installation ou d’autres aides liées à la qualité des productions agricoles. Il a enfin pris en charge tous les investissements relatifs à l’irrigation, l’aménagement interne des 20 ha, la construction de la halle, l’information et la communication auprès des publics concernés. Pour l’Agrocité d’Ivry-sur-Seine, la commune a de la même manière réalisé les investissements en études techniques sur le sol et sur le potentiel agronomique des parcelles identifiées. Elle a également choisi d’investir avec le bailleur social dans la construction de bâtiments et d’équipements (monte-charge) adaptés pour une production agricole professionnelle sur les toits. Dans les trois cas, les terres et les parcelles sont louées à des prix très faibles pour des durées longues (bail rural de 19 ans à bail emphytéotique de plus de 50 ans), ce qui constitue un apport capitalistique important par sa valeur et sa stabilité dans le temps.
Les éléments naturels ou facteurs supports
Dans les projets examinés, les aménageurs ont agi pour rendre disponibles et immédiatement utilisables les sols, l’irrigation ou encore les autres ressources naturelles utiles à la production agricole. Dans ces projets, l’accès à la terre est totalement dépendant des aménageurs puisque ceux-ci ont, légalement ou politiquement, le monopole de l’affectation du sol dans le périmètre et le temps de l’opération. Les aménageurs visant le développement d’une agriculture productive réservent des surfaces bien plus importantes que celles programmées dans des opérations prévoyant des jardins ou des lieux d’animation dédiés à l’agriculture. Plusieurs hectares sont affectés plutôt que quelques centaines de mètres carrés. Un travail spécifique est aussi engagé sur la forme et la localisation des parcelles productives ainsi que sur la qualité des sols. Nous y revenons dans la section suivante.
Concernant l’eau, à la différence des opérations prévoyant une agriculture d’agrément, les aménageurs font évaluer les quantités d’eau nécessaires pour l’exploitation agricole productive ciblée. En effet, elles représentent souvent des quantités importantes. L’étude hydraulique de la ferme de l’Envol en Essonne a montré que les consommations d’eau de ses 70 ha de maraîchage représentaient près de la moitié des quantités nécessaires pour les 300 ha de l’opération. Dans ce cas, l’aménageur a orienté l’étude pour réduire les consommations, trouver des mesures d’économie (notamment par le choix des cultures et des modes d’exploitation). Dans les trois cas, les aménageurs ont non seulement financé mais conduit la réalisation des études sur les eaux et l’irrigation. En cela, ils ont travaillé activement à la conception de cet aspect de la fonction productive de l’agriculture. Par exemple, ils ont eu à considérer la qualité de l’eau pour cette production à venir, alors que leurs pratiques se limitent habituellement à l’évaluation quantitative. Ils ont a eu à prendre en considération les variations saisonnières et pluriannuelles des quantités d’eau pour en mesurer les conséquences sur les productions agricoles. Ils ont reconsidéré les installations de pompage ou de stockage des eaux, ainsi que le réseau de distribution, en fonction des cultures et des techniques culturales. Toutes ces actions les situent, pour ces trois cas, dans le rôle d’activateur de la ressource en eau dans le processus de production agricole.
Les moyens matériels ou facteurs intermédiaires
Dans les trois cas étudiés ici, les aménageurs qui choisissent des programmes d’agricultures productives étudient et font réaliser d’autres éléments indispensables à la production. Ils sont souvent investis dans la conception et la réalisation des bâtiments agricoles et des équipements de production : serres, halles, locaux de stockage et de préparation ou de lavage des produits, équipements de refroidissement… Là aussi, ils ne se limitent pas à leur financement mais sont actifs dans la conduite de leur design et dans les choix qui les concernent. De plus, les aménageurs sont impliqués dans la réalisation des installations de sécurisation des parcelles productives, car les agriculteurs craignent le vol avec une telle proximité et densité d’habitants. Dans les trois cas, ils étudient et aménagent les circulations, les chemins, les stationnements, les espaces de vie des agriculteurs. À cela, s’ajoutent, selon les productions agricoles ciblées, d’autres réalisations : espaces d’accueil des visiteurs, de vente et de valorisation des produits, restaurants, cafés… Dans les trois projets examinés, les aménageurs participent à la réflexion sur la diversification des activités productives autour de la production agricole classique. En effet, ils constatent, avec leurs partenaires, que les activités productives au sein de ces projets urbains trouvent rarement leur équilibre économique grâce aux seuls revenus de la production agricole classique.
Les aménageurs interviennent donc non seulement pour mettre à disposition des ressources potentiellement utiles pour la production, mais aussi pour activer celles-ci comme facteurs de production pour l’agriculture au sein de leur opération. Afin d’éclairer ce processus d’activation par les aménageurs, nous proposons d’entrer plus en avant dans ce qui est historiquement au cœur de l’activité de l’aménageur, celle de la transformation foncière, ici transformation de la ressource foncière en sol et facteur de production agricole.
Les modalités d’activation
du facteur de production agricole « sol » par l’aménagement
Dans le processus d’aménagement classique, le sol est le support des aménagements et des constructions qui rendent un lieu habitable par les humains en fonction de leurs besoins et aspirations (Vilmin, 2015[66]Vilmin T. (2015). L’aménagement urbain. Acteur et système, Marseille, Parenthèses, 160 p.). Pour un aménageur, le sol est d’abord un support matériel et technique. Il est aussi la principale « matière première » de son activité d’un point de vue économique : l’aménagement et l’équipement de ce sol sont le moyen d’augmenter sa valeur financière, valeur monétarisée par sa vente auprès de ceux qui veulent y construire des logements, des écoles, des bureaux, des plateformes logistiques ou des zones industrielles. Le produit de cette vente rémunère l’activité de l’aménageur et finance plus largement les dépenses d’aménagement (Llorente, 2022[67]Llorente M. (2022). « Financement de l’aménagement : une perspective historique », dans Souami T, Llorente M, Drozdz M, Financement de l’aménagement urbain. Acteurs et innovations, Paris, Le Moniteur, p. 189-190.). Le sol est donc pour l’aménageur un « foncier » à valoriser.
Le travail de l’aménagement sur le sol s’arrête au moment de la cession à l’utilisateur (promoteurs, foncières…) des terrains à bâtir. Il ne porte pas sur leurs utilisations détaillées après cette cession, utilisations qui doivent respecter le règlement d’urbanisme et le cahier des charges de cession. Rappelons que les « intrusions » des collectivités ou de leur aménageur dans les usages privés des terrains cédés sont limitées, étant donné la protection constitutionnelle de la propriété et de son usufruit. Alors, comment l’aménagement parvient-il dans les trois projets observés à transformer le foncier à destination de l’urbanisation en sol activé comme facteur de production agricole ?
Du foncier urbanisable au foncier agricole
La première étape dans cette activation du foncier comme sol de production agricole passe, dans les projets examinés, par le changement de destination[68]Rappelons qu’en droit de l’urbanisme, la destination correspond à une fonction globale que doit accueillir un périmètre du territoire urbain planifié : logements, activités et commerces… des sols, de l’urbanisation à l’agriculture. Le choix d’une destination du foncier ne précise pas le caractère productif ou les conditions de production.
En aménagement urbain, l’affectation de fonciers à une destination, la réalisation de routes, la construction de logements ou l’édification d’équipements publics, possède une assise juridique et sociopolitique. Le maître d’ouvrage urbain et son aménageur argumentent à travers le cadre légal qui y oblige (enquête publique, preuve de l’intérêt général…) et doivent démontrer que l’affectation des terrains mobilisés relève bien de l’intérêt général. Ce dernier est le principal critère pour fonder ces décisions (Dameron, 2017[69]Dameron A. (2017). L’aménagement urbain. Contribution à la reconnaissance d’une notion juridique, Paris, L’Harmattan, 660 p.).
Les activités productives ont été extraites depuis plusieurs décennies du monde de l’aménagement et de ce processus de légitimation, principalement juridique et sociopolitique (Crague, 2017[70]Crague G. (2017). « Le maintien des entreprises, un problème d’urbanisme. L’équilibre fonctionnel comme principe de l’intervention économique locale », Revue internationale d’urbanisme, n° 4. ; Cerema, 2018[71]Cerema. (2018). L’action foncière publique en faveur du logement et des activités productives. Regards croisés, Paris, ministère de la Cohésion des territoires.). Le retour de ces activités productives dans le champ de l’urbanisme et de l’aménagement urbain, à la faveur du mot d’ordre de « la ville productive », transite par un registre d’argumentation adoptant le vocabulaire « économique » et mettant en avant le nombre d’emplois locaux, leur caractère non délocalisable (Heitz et al., 2023[72]Heitz A et al. (2023). « Les emplois de la ville productive. Construire des nomenclatures professionnelles et sectorielles pour identifier et mesurer les emplois des activités productives en France », Cahier Subwork, PUCA, n° 1.), leur intérêt pour générer des revenus stables ou les retombées pour d’autres activités économiques du territoire (Lejoux, 2018[73]Lejoux P. (2018). « Quelle place pour la zone d’activités économiques dans la fabrique de la ville contemporaine ? », dans Baudelle G, Gaultier G, Les nouvelles fabriques de la ville. Objets, référentiels et méthodes, Rennes, Presses universitaires de Rennes, p. 8.). L’autre registre est celui de la légitimation politique qui joue sur un consensus social et la convergence des représentations sociopolitiques autour de la « réindustrialisation » des territoires en France (Vicard, 2024[74]Vicard V. (2024). Faut-il réindustrialiser la France ? Paris, PUF.), y compris les villes et les métropoles (Trautmann et Rahmouni, 2019[75]Trautmann R, Rahmouni F. (2019). « Activités “productives” en ville : une espèce en voie de régulation, pour trois niveaux d’intervention publique », Revue Sur-Mesure, n° 4.). Consacrer du foncier pour cette finalité devenue prioritaire peut trouver ainsi une légitimité sociopolitique (Talandier, 2016[76]Talandier M. (2016). « Mutations des systèmes territoriaux. Vers un modèle résidentialo-productif », mémoire de HDR, Université Grenoble Alpes / UMR Pacte, 316 p.).
Dans ce contexte et dans cette histoire, les aménageurs en charge des trois projets étudiés ont investi deux registres d’argumentation et de légitimation de l’affectation des fonciers à l’agriculture. Ils se sont d’abord confrontés à la « discussion » économique de cette utilisation du capital foncier, alors que d’autres utilisations concurrentes pouvaient paraître économiquement plus fondées. Dans le cœur agro-urbain de Montévrain, le critère du nombre d’emplois était très défavorable à l’utilisation du sol pour l’agriculture : sur 3 ha de terrain du projet, l’agriculture maraîchère pouvait générer 1 à 2 emplois, alors que l’activité artisanale peut approcher 8 à 15 emplois, et la logistique 12 à 20. Pour autant, la collectivité locale et l’aménageur de Montévrain ont choisi de maintenir les 20 ha de ferme urbaine. De même, l’aménageur de l’ancienne base 217 pour Cœur Essonne Agglomération a maintenu le projet des 70 ha d’agriculture, indiquant la création projetée de 12 à 14 emplois, alors que la base logistique d’Amazon voisine en avait créé près de 3 000.
Malgré cette faible efficacité de la destination agricole du foncier en termes d’emploi, les aménageurs sont parvenus à maintenir la transformation de la vocation urbaine originale du foncier en vocation agraire. Pour ce faire, ils ont fondé leur argumentaire sur la représentation rappelée ci-avant que la production agricole est bénéfique au milieu urbain d’un point de vue socioéconomique et écologique (Vicard, 2024[77]Op. cit.). Par exemple, le montage de la ferme de l’Envol a été initié avec l’appui de la chambre départementale de l’agriculture avec l’argument principal de redonner au monde agricole des surfaces de production dans un département qui en a perdu des centaines d’hectares en deux décennies. Il a été maintenu en présentant un projet de maraîchage bio développant directement des réseaux de distribution locaux (notamment une AMAP) venant supporter les filières de distribution de proximité et des restaurateurs ciblant la qualité.
Avec ces procédés, les aménageurs des trois projets étudiés ont réalisé une première étape dans l’activation de la ressource foncière.
Du foncier agricole à la terre
Il ne suffit pas de déterminer une surface totale consacrée à l’agriculture pour rendre possible une production agricole. Toutes les formes et les surfaces de terrains ou de toits ne sont pas des moyens de production adaptés. Des parcelles trop petites ou des surfaces trop fragmentées dans un périmètre rendent difficile, voire impossible, le développement d’un process de production.
Dans le projet de renouvellement urbain du quartier Gagarine à Ivry-sur-Seine, l’agriculture urbaine affirmée au cœur du projet a été installée selon les contraintes imposées par les bâtis existants et la gestion des immeubles, propriété du bailleur social. L’installation du maraîchage, qui suppose des surfaces unitaires d’au minimum 700 m2, s’est trouvée ici confrontée à une double fragmentation : d’une part, les espaces publics et de circulation découpent les emprises de pleine terre au sol en petites surfaces allant de 400 à 1 300 m2, d’autre part, les toitures offrent rarement des surfaces continues de plus de 500 m2 chacune. Pour atteindre les 2,5 ha considérés comme le minimum requis afin d’installer un maraîcher professionnel, toutes ces surfaces devaient être mobilisées. La fonction productive de l’agriculture urbaine s’est ainsi trouvée confrontée aux particularités de l’organisation spatiale de l’aménagement, aménagement qui doit répondre à des exigences d’accessibilité, de circulation, de sécurité.
À l’origine, l’agriculture urbaine dans le projet de la base aérienne 217 avait été étudiée sous la forme classique d’un lotissement agricole où les parcelles (2 à 4 ha l’unité) devaient être louées à des maraichers différents. La collectivité et l’aménageur avaient finalement une tout autre ambition pour ces 70 ha : développer une production relevant de l’agroécologie, ce qui supposait de concevoir plusieurs activités complémentaires au sein de l’exploitation. Leurs réflexions, avec l’appui d’agronomes et en collaboration avec trois agriculteurs exploitants, ont conduit à reconfigurer le parcellaire pour créer une seule ferme comportant une partie consacrée à l’élevage, des parcelles de maraichage, des serres de préparation et de pousses, un espace de valorisation et de commercialisation. Pour l’aménageur, ce parcellaire final permettait d’utiliser les productions ou les rejets d’une partie de la ferme comme intrants ou moyens de production pour une autre. La collectivité et l’aménageur ont adapté, dans leur projet d’aménagement, les formes et les surfaces des terres aux exigences particulières de cette organisation de la production agroécologique.
De cette manière, les aménageurs des trois opérations examinées ici n’ont pas considéré le foncier uniquement comme un périmètre affecté à une fonction et ayant une surface. Ils l’ont configuré en des terres agricoles prêtes à accueillir par leurs caractéristiques formelles, spatiales et d’accessibilité les activités productives de la ferme ou des jardins productifs. Ils ont passé une autre étape de l’activation des sols mis à disposition comme ressource disponible pour les insérer dans la fonction productive de l’agriculture.
De la terre au sol… vivant
Enfin, pour mettre en place cette fonction agricole productive dans les trois projets analysés, les aménageurs ont travaillé sur les qualités chimiques, biologiques et agraires du sol. Ils ont été amenés à en connaître les capacités au regard des procédés agricoles envisagés, car des parcelles de terres bien configurées en surface et en forme ne permettent pas grande production si leur sol est inadapté à cette fin.
Dans les projets urbains classiques, les études du sol interviennent à l’amont pour en vérifier les caractéristiques physiques et mécaniques afin de porter le bâti. Elles analysent également ses pollutions potentielles. L’implantation d’activités agricoles conduit les aménageurs à considérer le sol comme support du vivant et premier élément de la fertilité, ce qui appelle des études radicalement nouvelles. Par exemple, dans le projet d’aménagement de l’ancienne base aérienne 217 en Essonne, des études ont été produites sur le sol au regard de l’histoire du site (d’importants bombardements pendant la Seconde Guerre mondiale) et son utilisation (aviation militaire). Initiés avant le projet, les diagnostics du sol sont longtemps restés orientés vers la question classique de pollution. Elles ont été étendues par l’aménageur aux questions de composition biologique et chimique des terres présentes sur les 70 ha destinés à l’agriculture. L’aménageur du projet de Montévrain à Marne-la-Vallée a fait réaliser sa première étude agropédologique pour cette opération et son cœur agro-urbain. Il a vérifié la fertilité des 20 ha de maraîchage et confirmé les cultures à y installer. Au cours de ses premières années, l’agrocité d’Ivry-sur-Seine a bénéficié d’une étude plus globale portant partiellement sur la qualité du sol. La collectivité a, par la suite, fait appel à un bureau d’études et de recherche d’agriculture urbaine afin d’affiner cette étude et la mettre en rapport avec les exigences d’une exploitation utilisant à la fois un sol en pleine terre et un sol constitué sur les toits. À cette occasion, l’aménageur apprend que le sol, comme d’autres substrats du vivant, peut se fabriquer, se modifier et se transporter. Ces études montrent que les terres nécessaires pour atteindre les 2,5 ha de production avaient une valeur marchande de plus d’un million d’euros en 2019, ce qui donne à arbitrer entre les objectifs de surface productive, les types de cultures visées et les équilibres de l’opération.
Avec ces études et ces actions, les aménageurs procèdent à une dernière étape dans l’activation du foncier comme facteur de production. Après l’avoir changé en foncier agricole et l’avoir transformé en terres agricoles au parcellaire adapté, ils le travaillent comme un sol « vivant », substrat pour les cultures et la production. Ils en vérifient ou en changent les caractéristiques chimiques et biologiques au regard des productions envisagées, de leurs conditions matérielles et économiques.
Conclusion
Les aménageurs, en programmant des fermes et des jardins productifs dans leurs opérations, posent la question de leur rapport à la fonction productive de l’agriculture. À priori, ils ne seraient pas conduits à s’en préoccuper, puisque nombre de recherches montrent ses apports socioécologiques à la durabilité de la ville. Ils pourraient ainsi juste mettre à disposition des parcelles et reproduire une position « extérieure » à la définition de la fonction productive se conformant au rôle qui leur est attribué par le courant dominant de l’économie territoriale : aménageurs du territoire comme plateforme mettant à disposition des ressources pour attirer et maintenir des entreprises. Ils rendraient disponibles des ressources que les producteurs se chargeraient, eux, d’activer en facteurs de production dans leur process de production.
Les retours d’expérience des aménageurs intégrant une production agricole indiquent un rôle bien différent que la recherche sur l’agriculture urbaine éclaire : ces aménageurs travaillent à l’activation des ressources pour faire advenir la fonction productive de l’agriculture au sein de leurs opérations. L’analyse de trois exemples de projets d’aménagement révèlent les actions directes des aménageurs afin d’activer les ressources du territoire, rassembler des financements et des aides, mobiliser le foncier et préparer les sols, étudier les eaux et installer l’irrigation, trouver et engager des agriculteurs, organiser la commercialisation vers les restaurateurs et les distributeurs…. Finalement, intervenir très concrètement dans le processus de production de l’activité productive, ici agricole.
L’exemple de travail sur le sol l’illustre tout particulièrement. À la différence des autres types de productions industrielles et manufacturières, en agriculture, le foncier n’est pas seulement une condition extérieure dans le process de production agricole, il en est partie intégrante et constitue sa « matière première ». Dès lors, l’aménagement doit élargir son référentiel d’action vis-à-vis de cette activité de production : il ne suffit pas de mettre à disposition une assiette foncière et de dicter des cadres pour assurer une réalisation des objectifs de production et des finalités socioécologiques de l’activité productive agricole.
Le ciblage simultané des finalités de transition écologique par l’agriculture et l’aménagement ne produit pas un alignement de leur processus de production et de leurs référentiels. Les recherches analysant l’un et l’autre éclairent peu encore les modalités d’articulation des processus de production agricole au sein des milieux urbains, car elles ne les prennent pas comme objet d’analyse scientifique mais comme objet de transfert de connaissance. Les manuels et les guides produits sur le sujet sont pensés comme les vecteurs de la circulation des savoirs et savoir-faire du monde agricole vers le monde de l’aménagement. La mise en place effective d’une production agricole invite ainsi à des travaux plus systématiques dépassant les indices livrés dans cet article.
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[62] Ce dispositif scientifique associe l’École d’Urbanisme de Paris et ses laboratoires de références – le Lab’Urba, le LATTS et le LVMT – à 15 organismes professionnels contribuant à l’aménagement de la métropole du Grand Paris et de la région francilienne. Ses travaux scientifiques et pédagogiques sont conduits par les chercheurs et bénéficient des contributions des opérationnels de l’aménagement ainsi que des étudiants.
[63] Il s’agit de tournages tout au long de la journée de travail sur site, à différents moments des saisons de production.
[64] Extrait de la présentation du projet par l’EPA Marne, 2017.
[65] Fleury A. (2006), « Quelle ingénierie pour l’agriculture de la ville durable ? », Natures Sciences Sociétés , n° 14, 399-406.
[66] Vilmin T. (2015). L’aménagement urbain. Acteur et système, Marseille, Parenthèses, 160 p.
[67] Llorente M. (2022). « Financement de l’aménagement : une perspective historique », dans Souami T, Llorente M, Drozdz M, Financement de l’aménagement urbain. Acteurs et innovations, Paris, Le Moniteur, p. 189-190.
[68] Rappelons qu’en droit de l’urbanisme, la destination correspond à une fonction globale que doit accueillir un périmètre du territoire urbain planifié : logements, activités et commerces…
[69] Dameron A. (2017). L’aménagement urbain. Contribution à la reconnaissance d’une notion juridique, Paris, L’Harmattan, 660 p.
[70] Crague G. (2017). « Le maintien des entreprises, un problème d’urbanisme. L’équilibre fonctionnel comme principe de l’intervention économique locale », Revue internationale d’urbanisme, n° 4.
[71] Cerema. (2018). L’action foncière publique en faveur du logement et des activités productives. Regards croisés, Paris, ministère de la Cohésion des territoires.
[72] Heitz A et al. (2023). « Les emplois de la ville productive. Construire des nomenclatures professionnelles et sectorielles pour identifier et mesurer les emplois des activités productives en France », Cahier Subwork, PUCA, n° 1.
[73] Lejoux P. (2018). « Quelle place pour la zone d’activités économiques dans la fabrique de la ville contemporaine ? », dans Baudelle G, Gaultier G, Les nouvelles fabriques de la ville. Objets, référentiels et méthodes, Rennes, Presses universitaires de Rennes, p. 8.
[74] Vicard V. (2024). Faut-il réindustrialiser la France ? Paris, PUF.
[75] Trautmann R, Rahmouni F. (2019). « Activités “productives” en ville : une espèce en voie de régulation, pour trois niveaux d’intervention publique », Revue Sur-Mesure, n° 4.
[76] Talandier M. (2016). « Mutations des systèmes territoriaux. Vers un modèle résidentialo-productif », mémoire de HDR, Université Grenoble Alpes / UMR Pacte, 316 p.
[77] Op. cit.