juillet 2024

La ville productive à l’heure de la transition écologique

Espaces manufacturiers
et conflits urbains
Analyse des politiques publiques
et de la planification urbaine
dans le contexte métropolitain de Lille
Ana Scutari
Université de Lille, Territoires Villes Environnement & Société, TVES, ULR 4477, Lille, France - Université Libre de Bruxelles, Laboratoire Urbanisme, Infrastructures, Écologies et Paysage (LoUIsE)

Espaces manufacturiers
et conflits urbains
Analyse des politiques publiques
et de la planification urbaine
dans le contexte métropolitain de Lille
Espaces manufacturiers et conflits urbains : analyse des politiques publiques et de la planification urbaine dans le contexte métropolitain de Lille,
Riurba no
16•17, juillet 2024.
URL : https://www.riurba.review/article/16-productive/espaces-manufacturiers/
Article publié le 5 juil. 2025
- Abstract
- Résumé
Manufacturing spaces and urban conflicts: analysis of public policies and urban planning in the context of metropolitan Lille
As part of its planning documents, the European Metropolis of Lille has set itself the objective of developing and preserving productive activities. However, since the 19th century, the eviction of manufacturing activities from urban areas has been a prominent feature of existing conflicts between residential and production areas. How do public policies take into account and manage the conflicts inherent in manufacturing industry? This article focuses on the Refinal site and highlights the tensions between an industrial site regarded as “traditional” and new conceptions of economic development.
Dans le cadre de ses documents de planification, la métropole européenne de Lille définit un objectif de développement et de préservation des activités productives. Cependant, depuis le XIXe siècle, l’éviction des activités manufacturières des espaces urbains constitue une caractéristique marquante des conflits existants entre les espaces résidentiels et de production. Comment les politiques publiques prennent-elles en compte et gèrent-elles les conflits inhérents à l’industrie manufacturière ? Cet article se concentre sur le site de Refinal et met en lumière les tensions entre un site industriel considéré comme « traditionnel » et les nouvelles conceptions du développement économique.
post->ID de l’article : 5768 • Résumé en_US : 5805 • Résumé fr_FR : 5803 • Sous-titre[0] : A
Introduction
Dans le cadre de ses documents de planification stratégique et réglementaire, la métropole européenne de Lille (MEL) définit un objectif de développement et de préservation des activités productives[1]L’expression « activités productives » est utilisée dans cet article pour désigner les activités définies comme telles dans le cadre de recherches et de projets concernant la ville productive. Ce concept vise à englober une variété de secteurs d’activité et de modes de production (comme l’industrie ou l’artisanat), tout en reconnaissant la diversité et l’ambiguïté associées à ce terme.. Cependant, depuis le XIXe siècle, l’éviction des activités manufacturières[2]Nous désignons par activités manufacturières les secteurs d’activité faisant partie de la section C de la NAF ainsi que les activités de recyclage – qui consistent à transformer des matières en vue de la fabrication de produits. des espaces urbains constitue une caractéristique marquante des tensions et des conflits existant entre les espaces résidentiels et de production, suite aux « débordements industriels » (Letté et Le Roux, 2019[3]Letté M, Le Roux T. (2019). Débordements industriels : environnement, territoire et conflit (XVIIIe-XXIe siècle), Rennes, Presses universitaires de Rennes [En ligne) liés aux nuisances. De plus, la compétition entre les fonctions urbaines encourage un développement axé sur le logement et les bureaux, suscitant un intérêt croissant de la part des investisseurs immobiliers en raison de leur rentabilité. Le concept de la ville productive, ainsi que les récits et les discours qui accompagnent la finalité du maintien des activités industrielles en ville, produisent une perspective consensuelle de la production en ville. Largement investie par la question de la forme urbaine et architecturale qui permet la mixité entre la fonction résidentielle et celle de production, la notion de la ville productive est également réappropriée dans le champ de la planification urbaine. Cette dernière, en tant que processus décisionnel (Davidoff et Reiner, 1962, p. 109[4]Davidoff P, Reiner TA. (1962). « A choice theory of planning », Journal of the American Institute of Planners, n° 28(2), p. 103‑115 [En ligne ; Mazza, 2009, p. 132[5]Mazza L. (2009). « Centenary paper: plan and constitution – Aristotle’s Hippodamus: towards an “ostensive” definition of spatial planning », The Town planning review, n° 80, p. 113‑141 [En ligne ; Pacchi et Pasqui, 2015, p. 83[6]Pacchi C, Pasqui G. (2015). « Urban planning without conflicts? Observations on the nature of and conditions for urban contestation in the case of Milan », dans Gualini E, Planning and Conflict : Critical Perspectives on Contentious Urban Developments, New York, Routledge.), encadre des enjeux relatifs aux intérêts hétérogènes, réglemente l’usage du sol et régule ainsi les tensions qui se nouent autour du foncier et de son affectation. Guidée par l’objectif de consensus et de compromis, elle cherche à dépasser les conflictualités urbaines appréhendées comme un problème, pour lesquelles des approches « collaboratives » (Brand et Gaffikin, 2007[7]Brand R, Gaffikin F. (2007). « Collaborative planning in an uncollaborative world », Planning Theory, n° 6, p. 282‑313 [En ligne ; Healey, 2003[8]Healey P. (2003). « Collaborative planning in perspective », Planning Theory, n° 2(2), p. 101‑123 [En ligne ; Purbani, 2017[9]Purbani K. (2017). « Collaborative planning for city development. A perspective from a city planner », Scientific Review Engineering and Environmental Sciences, n° 26, p. 136‑147 [En ligne) et « communicatives » (Healey, 1992[10]Healey P. (1992). « Planning through debate: the communicative turn in planning theory », Town Planning Review, n° 62, p. 143-162 [En ligne ; 2008[11]Healey P. (2008). « The pragmatic tradition in planning thought », Journal of Planning Education and Research, n° 28, p. 277-292 [En ligne ; Innes, 1995[12]Innes JE. (1995). « Planning theory’s emerging paradigm: communicative action and interactive practice », Journal of Planning Education and Research, n° 14(3), p. 183-189 [En ligne) de planification sont élaborées en réponse.
Dans ce contexte, l’analyse des dimensions conflictuelles des espaces manufacturiers proposée dans le cadre de ce travail cherche à contextualiser et à interroger les injonctions contemporaines à l’égard de ce nouveau concept urbain qu’est la ville productive, intégré dans une approche consensuelle de la planification urbaine. Ainsi, cet article se propose d’analyser le rôle des politiques publiques et de la planification urbaine dans la gestion des conflits urbains[13]Dans le cadre de ce travail, il s’agit d’appréhender le concept de conflit à travers ses différentes formes d’opposition, d’antagonismes et de compétition, fondées sur des logiques distinctes ou contentieuses (D’Alessandro C. (2013). « Valeurs environnementales entre identité et conflit : le Parc National du Gran Sasso et des Monts de la Laga (Italie) », dans Melé P, Larrue C, Rosemberg M, Conflits et territoires, Tours, Presses universitaires François-Rabelais, p. 83-101. [En lignePlanning and conflict: critical perspectives on contentious urban developments, New York, Routledge, p. 63-78). Cette lecture englobante du conflit cherche à prendre en compte la complexité qui régit la relation entre les conflits, tout en restant attentive au fait que l’absence d’une forme de performativité du conflit ne témoigne pas de l’absence de conflictualité, mais surtout des mécanismes et des dynamiques de leur invisibilisation. (Lascoumes et Le Galès, 2018[14]Lascoumes P, Le Galès P. (2018). Sociologie de l’action publique, Paris, Armand Colin.) inhérents aux activités manufacturières. Nous verrons que l’un des objectifs de la planification urbaine réside notamment dans la résolution ou la pacification des conflits potentiels entre différents groupes sociaux (Rivelois, 1987[15]Rivelois J. (1987). La dimension sociale de la planification urbaine, Paris, École des hautes études en sciences sociales. [En ligne). Ainsi, les politiques publiques locales sont confrontées à une contradiction fondamentale. D’un côté, leurs institutions, leurs pratiques et leurs discours cherchent à établir un ensemble d’outils qui vise à apaiser d’éventuels antagonismes. D’un autre côté, les conflits peuvent surgir en dehors de ces pratiques et institutions, résultant de la formation de positions et d’identités collectives qui contestent le cadre institutionnel en place. Par conséquent, la politique urbaine ne se limite pas à la gestion et à l’encadrement des conflits, mais elle définit également les conditions de leur émergence (Gualini, 2015[16]Gualini E (dir.). (2015). Planning and conflict: critical perspectives on contentious urban developments, New York, Routledge.).
La planification urbaine se trouve ainsi à la croisée d’une double dynamique : d’un côté, par son caractère décisionnel, elle vise à pacifier et à réguler les concurrences dans l’usage du sol ; de l’autre, par sa dimension politique et les rapports de force à l’œuvre, elle est un processus éminemment conflictuel. La question qui se pose alors est : comment les politiques publiques prennent-elles donc en compte les conflits inhérents à l’industrie manufacturière dans la planification urbaine ? Pour répondre à cette question, une étude de cas à l’échelle d’un îlot a été menée, se concentrant sur le site de Refinal. Cette analyse met en lumière les conflits et les contradictions qui animent la planification urbaine, et examine également les nouvelles conceptions du développement économique visant à renforcer l’attractivité métropolitaine par la politique dite des « pôles d’excellence » mise en œuvre par la métropole lilloise. Nous nous intéressons aux effets des processus décisionnels de la planification sur les formes spatiales et la structure sociale. Il s’agit de comprendre les contradictions et les oppositions entre les choix institutionnels de la planification et les « interventions effectives » (Castells, 1975[17]Castells M. (1975). Sociologie de l’espace industriel, Paris, Anthropos.). Ces dernières sont le résultat des oppositions entre les intérêts multiples et de la confrontation des objectifs divergents relatifs à l’organisation urbaine. Deux dimensions sont caractérisées par une relation potentiellement conflictuelle : d’une part, le plan et la planification, en tant qu’institution sociale qui se veut rationnelle ; et d’autre part, les pratiques sociales en tant qu’institutions culturelles. Il s’agit donc de comprendre les articulations entre la planification urbaine, outil institutionnel, et les pratiques sociales liées à la production des espaces manufacturiers.
La fonderie, acquise en 1992 par l’entreprise spécialisée dans la fusion de déchets d’aluminium Refinal, est implantée au sein d’un site d’une superficie d’environ 4 hectares, le long du canal de la Deûle, entre les communes de Lomme et de Sequedin. Installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE), elle est au cœur d’un tissu urbain dense, liant la fonction productive et résidentielle. Ce site se trouve au carrefour des conflits fonciers découlant de l’acquisition par l’entreprise d’un terrain adjacent, ainsi que des conflits environnementaux liés, depuis 1999, aux nuisances résultant de l’augmentation de la production. L’étude du site Refinal se focalise sur la contradiction entre les objectifs de transition environnementale et la préservation des espaces manufacturiers. L’analyse cherche à explorer les multiples éléments qui influencent la formulation des politiques publiques ainsi que leurs effets sur les espaces manufacturiers. Dans ce contexte, l’objectif est d’analyser les conflictualités dans la planification urbaine au fur et à mesure de leur développement, afin de dévoiler les dimensions sociales normalement cachées et de les rendre plus explicites (Callon, 2013[18]Callon M. (2013). « Sociologie de l’acteur réseau », dans Akrich M, Latour B (dir.), Sociologie de la traduction : textes fondateurs, Paris, Presses des Mines, p. 267-276. [En ligne). Plus précisément, l’analyse des documents d’urbanisme et de planification vise à étudier comment les activités manufacturières sont prises en compte à travers les outils et les stratégies visant le développement industriel des territoires. Ainsi, ces documents sont analysés à travers leur prisme discursif et réglementaire, ainsi que par leur rôle de « médiateurs matériels » (Söderström, 2001[19]Söderström O. (2001). Des images pour agir : le visuel en urbanisme, Paris, Payot.) dans les choix des politiques publiques.
L’enquête s’articule autour de la conduite d’entretiens semi-directifs avec les différents acteurs impliqués dans la planification urbaine de ce territoire, dont le port, la commune, la MEL ainsi que les habitants. Elle vise à explorer les perspectives des acteurs sur leur environnement, leurs initiatives, leurs approches, ainsi que les obstacles et les ressources qu’ils identifient. L’objectif est également de comprendre les motivations qui orientent leurs actions, les relations sociales qu’ils établissent et le contenu spécifique de leurs discours (Musselin, 2005[20]Musselin C. (2005). « Sociologie de l’action organisée et analyse des politiques publiques : deux approches pour un même objet ? », Revue française de science politique, n° 55(1), p. 51-71. [En ligne). Les entretiens offrent un moyen d’appréhender les pratiques qui façonnent l’action publique et les représentations qui la sous-tendent, tout en permettant d’analyser les motifs et les discours qui animent ces actions. Néanmoins, nous regrettons que l’accès à certains acteurs tels que la chambre de commerce et d’industrie (CCI) et l’entreprise Refinal reste difficile. Ainsi, afin d’enrichir cette étude, une analyse de la presse locale et nationale a été réalisée. Cette revue de presse représente une importance particulière, étant donné que le conflit a été largement médiatisé, permettant ainsi d’acquérir des informations supplémentaires et d’approfondir la compréhension des enjeux.
Le site Refinal à la croisée des enjeux de la mixité urbaine
La fonderie, établie en 1946 et acquise en 1992 par Refinal (Groupe Derichebourg), se spécialise dans la fusion de déchets d’aluminium (figure 1). L’établissement de Refinal est situé au cœur d’un environnement urbain dense, étroitement juxtaposé aux tissus résidentiels et à proximité de nombreux autres sites industriels le long du canal, spécialisés dans la métallurgie et le recyclage[21]Le site fonctionne comme une plateforme de raffinage d’aluminium pour le groupe, traitant le métal provenant des filiales de Derichebourg ainsi que d’autres sociétés. L’aluminium est fondu dans des fours et transformé en lingots, avec une production mensuelle d’environ 4 000 tonnes. L’entreprise dessert une quarantaine de clients, majoritairement issus de l’industrie automobile, et la production est réalisée en continu, en grandes séries.. Précisons qu’au sud, sur l’autre rive de la Deûle, se trouve l’usine Produits Chimiques de Loos, un site SEVESO soumis à un plan de prévention des risques technologiques (PPRT), ainsi que l’autoroute A25 (figure 2).


Historiquement, ce territoire est marqué par une vocation industrielle, favorisée par un contexte géographique propice à l’implantation de blanchisseries dès le XIXe siècle. Cet essor était dû à la disponibilité de vastes étendues de terrain ainsi qu’à un accès à l’eau. Progressivement, les activités implantées se diversifient, et le quartier connaît un développement de l’industrie textile, des industries métalliques et métallurgiques, de la construction électrique et électronique, ainsi que des ateliers et des industries chimiques établies le long des rives de la Deûle. En raison de ces développements industriels, le quartier a également vu la construction d’installations et de logements pour les travailleurs, selon le plan élaboré pour la commune de Lomme en 1934. Cependant, dans un contexte de désindustrialisation amorcée dès les années 1980, le quartier est concerné par les politiques publiques de développement économique, notamment à travers le projet de conversion de l’ancien moulin à filature Leblanc en centre d’excellence Euratechnologies (Collectif Degeyter, 2017[22]Collectif Degeyter. (2017). De la ville industrielle aux reconversions tertiaires, Paris, La Découverte, p. 9-26. [En ligne), s’inscrivant alors dans la logique de la ville créative (Ambrosino et Guillon, 2010[23]Ambrosino C, Guillon V. (2010). « Les trois approches de la ville créative : gouverner, consommer et produire », L’Observatoire, n° 36(1), p. 25-28. [En ligne). Ce quartier ouvrier, situé à proximité du quartier prioritaire du Secteur Ouest de Lille et du quartier Bois-Blancs, est l’objet de projets de renouvellement, notamment à la suite du projet des Rives de la Haute-Deûle. Outre la présence significative d’activités de production et de logistique, cette zone urbaine se distingue par une forte imbrication entre les anciennes usines et les secteurs résidentiels historiques. Soulignons ici une caractéristique notable des rives de la Deûle : la façade portuaire est constituée de terrains appartenant à des établissements économiques qui utilisent la voie navigable dans leurs processus de production et de logistique.
Situé à l’articulation de plusieurs projets stratégiques, le site en question se retrouve ainsi au croisement entre différentes visions d’aménagement urbain. D’une part, il s’inscrit dans la proximité du projet des Rives de la Haute-Deûle, où les préoccupations liées au cadre de vie, au développement résidentiel et économique jouent un rôle central. De plus, le projet de la ligne de bus à haut niveau de service depuis EuraTechnologies positionne le site au cœur des enjeux d’accessibilité et d’offre de transport en commun métropolitain. D’autre part, il partage une proximité avec le port de Lille, un pôle d’activités industrielles majeur, où l’accent est mis à la fois sur le maintien des infrastructures industrielles et portuaires existantes et sur la valorisation des voies navigables. Ce site s’inscrit dans le territoire d’étude qui a fait l’objet de plusieurs réflexions menées dans le cadre d’Europan (session 14). Il illustre ainsi l’appropriation et les représentations spécifiques de la ville productive par le territoire lillois, et par les acteurs municipaux de Lille en particulier. Ce site s’impose comme un point de convergence entre les différents enjeux, à la fois urbains et productifs, soulevant la question de la gestion des risques et de la pollution industrielle, ce qui justifie ici son intérêt en tant qu’étude de cas.
La planification urbaine exprime des enjeux et des intérêts multiples et divergents, devenant alors une source et un objet de conflits. Le processus de planification est guidé par l’objectif « de déceler les fondements réels du débat et d’essayer de l’orienter vers un compromis autour de certains buts communs, par exemple la croissance » (Castells, 1969, p. 415[24]Castells M. (1969). « Vers une théorie sociologique de la planification urbaine », Sociologie du travail, n° 11(4), p. 413-443. [En ligne). Le concept de la ville productive apparaît ainsi consensuel, en tant que finalité[25]Le terme de finalité renvoie à une des dimensions caractéristiques des politiques publiques (Hassenteufel P. (2021). Sociologie politique de l’action publique, Paris, Armand Colin), qui vise la construction d’une cohérence programmatique pour la résolution des problèmes publics. de l’action publique métropolitaine. Cette perception pourrait en partie expliquer son intégration à l’agenda politique des villes, parce qu’en harmonie avec les valeurs dominantes (Hassenteufel, 2021[26]Op. cit.) relatives à la réindustrialisation et au développement économique, portées aussi bien par l’État, les régions que les acteurs locaux. L’objectif de développement des activités industrielles est mis en avant à la fois à l’échelle européenne, à travers la stratégie industrielle de 2020 de l’Union européenne qui appuie cette visée, ainsi qu’à l’échelle nationale, et notamment en France à travers le programme « Territoires d’industries » de 2018 et, plus récemment, à travers le plan d’action du gouvernement pour la relocalisation des industries de santé en France (2020). À l’échelle de la région bruxelloise, en 2019, est mis en place le plan industriel qui appuie une stratégie industrielle axée sur le développement des activités productives sur le territoire régional.
Soulignons enfin que cette dimension consensuelle de la ville productive s’inscrit également dans le débat sur la mixité urbaine, considérée comme l’un des facteurs de développement durable. À l’échelle des territoires urbains, la question du développement et du maintien des activités de production, et notamment des activités industrielles, émerge à travers le prisme de la notion de ville productive, qui devient le thème du concours Europan de 2017 et de 2019. L’objectif du concours de 2017 est d’amorcer une réflexion sur la mixité urbaine en y intégrant les fonctions productives. Elle s’intéresse à l’intégration des activités de production en milieu urbain et se concentre sur la production de nourriture, d’énergie et de produits industriels. La session de 2019 s’articule autour des enjeux d’une « transition productive écologique ». De plus, le Plan urbanisme construction architecture (PUCA) lance en 2020 un programme de recherche et d’expérimentation sur les enjeux économiques, sociaux et environnementaux de la « ville productive ».
Concurrences entre l’activité manufacturière
et le développement résidentiel
Par ailleurs, ce secteur, situé sur les territoires de Lille et de Lomme, est concerné depuis plusieurs années par un grand projet urbain, les Rives de la Haute-Deûle. Celui-ci s’étend sur la zone d’aménagement concerté (ZAC) du secteur opérationnel qui s’inscrit dans un cadre plus vaste, couvrant une superficie totale de 100 hectares, au sein duquel une portion du site de l’usine Refinal est également incluse.
Le projet des Rives de la Haute-Deûle illustre un changement de paradigme dans l’aménagement urbain et la planification stratégique du territoire lillois. Cela se manifeste par l’objectif d’améliorer l’attractivité métropolitaine grâce au développement économique et durable. Ce projet envisage la création d’un écoquartier, et s’inscrit dans un agenda politique axé sur les enjeux de requalification urbaine et le développement de l’offre résidentielle et tertiaire (figure 3). Ces orientations influent sur les représentations et les conflits associés au tissu industriel environnant, notamment le site de Refinal. Suite à la fermeture de l’usine Le Blan-Lafont en 1983, ainsi qu’à la présence de plusieurs friches industrielles au sein de ce territoire, le projet des Rives de la Haute-Deûle a fait l’objet de nombreuses études et réflexions depuis les années 1990 jusqu’aux années 2000. Cela a entraîné de multiples variations de périmètres d’étude et de projet ainsi que l’implication de différents acteurs dans le projet au fil des années.

À la fin des années 1980 et au début des années 1990, l’histoire industrielle de ce territoire se reflète dans les affectations des plans d’occupation des sols (POS), mettant en lumière la volonté non seulement de maintenir ces zones à vocation industrielle, mais aussi de renforcer cette fonction urbaine. Cependant, le périmètre de la ZAC des Rives de la Haute-Deûle, envisagé comme une zone d’activité stratégique en raison de sa proximité avec le tissu urbain central de la ville de Lille, se trouve au cœur des enjeux de diversification des activités économiques, notamment par le développement des activités tertiaires et commerciales. En 1998, des modifications substantielles sont apportées au plan d’occupation des sols (POS) dans le périmètre de la ZAC. À cette époque, à l’échelle communale, est prise la décision de réaffecter la zone en vue d’un développement résidentiel, contrastant ainsi avec la décision en suspens de la ville de Lomme sur son développement urbain. Cette différence de choix et d’agenda politique dessine une frontière claire entre les espaces dédiés à l’industrie et ceux destinés à l’habitat.
Le milieu des années 2000 marque davantage l’évolution vers une vision de développement urbain mettant l’accent sur la fonction résidentielle et servicielle de ce territoire, notamment dans le contexte de l’élaboration du PLU de 2004. Ce plan entérine la création de la ZAC des Rives de la Haute-Deûle, avec une programmation incluant des logements, des activités économiques, des équipements et espaces publics. L’idée de ce projet s’inscrit dans le cadre du schéma directeur lillois de 2002, qui marque la politique des pôles d’excellence métropolitains de la communauté urbaine de Lille. L’un des projets phares de cette opération d’aménagement est la réhabilitation de l’usine Le Blan-Lafont, située au sein d’un parc d’activités spécialisé en technologies de l’information et de la communication, EuraTechnologies. « L’intérêt de ces pôles est d’offrir, par leur valeur démonstrative, une dimension concrète à l’ambition internationale de la métropole » (Paris et Mons, 2009, p. 54[27]Paris D, Mons D. (2009). Lille métropole : laboratoire du renouveau urbain, Marseille, Parenthèses.), alors que les anciennes activités industrielles[28]Pour une analyse des différentes dynamiques entre les « anciennes » et « nouvelles activités productives », voir : Orban A, Trenado CS, Vanin F. (2021). À qui profitent les activités productives ? Analyse du cas de Cureghem, Brussels Studies. [En ligne présentes au sein du territoire sont perçues comme étant « consommatrices d’espace et génératrices de risques ou de nuisances »[29]Rapport de présentation. Lille-Lomme ZAC, étendue du 1er secteur opérationnel des Rives de la Haute-Deûle, octobre 2017, p. 14..
Un site industriel historique
face aux évolutions des représentations
de l’économie urbaine
La diffusion et la médiatisation du concept de la ville productive ont notamment bénéficié du 14e concours Europan, lancé en 2017 (Gilbart, 2019[30]Gilbart A. (2019). « La ville productive : un nouveau paradigme pour le projet urbain ? », Mardi des Chercheurs [En ligne].). À Lille, le périmètre d’étude retenu pour les projets Europan englobe l’île des Bois Blancs, une partie du marais de Lomme, les rives de la haute-Deûle et la presqu’île Boschetti, s’étendant ainsi jusqu’à la limite du site Refinal. En particulier, deux sites de projet ont été identifiés : la piscine Marx Dormoy et le secteur Boschetti-Silo (figure 4). Les objectifs définis s’articulent autour de « la mixité des usages, du renforcement des liens sociaux et une prospective en faveur de modes de vie équilibrés » (métropole européenne de Lille, ville de Lille, 2018[31]Métropole européenne de Lille, ville de Lille. (2018). Europan 14. Villes productives. Lille. Ile des Bois Blancs. L’île des possibles, berges sous influence productive, dossier de site.).

Ces objectifs sont structurés par les questionnements suivants : « Quelle place pour des activités citoyennes, en relai avec l’histoire des habitants et celle des lieux ? Quels liens entre plaisance, culture, tourisme, loisirs, activités de petites productions et la “Recherche et Développement” numérique en plein essor sur EuraTechnologies ? Quelles transformations et réutilisations du patrimoine au service d’une ville hybride et créative, pour associer patrimoine et innovation ? » (Métropole européenne de Lille, ville de Lille, 2018[33]Op. cit.). Ainsi, la thématique de la ville productive est envisagée non comme un concept distinct ou opposé à celui de la ville créative, mais plutôt comme une extension ou une continuation de ce dernier, dans une perspective de développement urbain axée sur la création d’une ville hybride et créative. Cette approche peut être interprétée comme une évolution teintée de nostalgie d’un concept intrinsèque à la « classe créative » (Keil et Boudreau, 2010[34]Keil R, Boudreau JA. (2010). « Le concept de la ville créative : la création d’une réelle ou imaginaire forme d’action politique dominante », Pôle Sud, n° 32(1), p. 165-178. [En ligne) et à la « ville créative » (Vivant, 2009[35]Vivant E. (2009). Qu’est-ce que la ville créative ? Paris, Presses Universitaires de France. [En ligne), orientée vers des pratiques telles que l’impression 3D et la production de biens artisanaux et de niche (Nawratek, 2017[36]Nawratek K (dir.). (2017). Urban re-industrialization, Brooklyn, Punctum Books.) : « La ville productive ouvre la voie à une organisation territoriale où peuvent se mêler des habitats singuliers, des conditions de travail et d’activités productives de tout genre (industrielle, artisanale, tertiaire, logistique, commerces) dans un espace urbain ouvert et repensé pour accueillir toutes ses fonctions » (idem). Les trois projets ont convergé sur les enjeux paysagers, la mixité des activités et les formes architecturales innovantes. L’enjeu paysager s’inscrit notamment dans une réflexion autour du territoire du canal, lequel devient un support essentiel pour le paysage, tandis que son rôle productif et logistique est relégué au second plan, tant dans les discours portés par les collectivités que dans les projets lauréats. La ville productive est ainsi assimilée à la notion de ville mixte, sans qu’il soit possible de discerner clairement les spécificités de chacune.
La finalité de la mixité fonctionnelle entre la fonction manufacturière et la fonction résidentielle s’inscrit dans la lignée d’un concept plus vaste de mixité fonctionnelle, qui découle de la critique du modernisme. Fréquemment perçue comme une réponse aux problématiques de gestion des flux, environnementales et d’intensification des usages, la mixité fonctionnelle est supposée automatiquement améliorer la qualité urbaine et créer les conditions propices à une coexistence harmonieuse entre les diverses fonctions. La mixité fonctionnelle est ainsi présentée comme un objectif central et une solution consensuelle dans les documents de planification stratégique et réglementaire. Cependant, cette efficacité est parfois sous-tendue par une idée erronée, à savoir que le simple mélange ou la cohabitation de fonctions dans le même espace suffirait à susciter des améliorations qualitatives des territoires urbains (Bricocoli et Savoldi, 2012[37]Bricocoli M, Savoldi P. (2012). Mixité fonctionnelle versus zoning : de nouveaux enjeux ? / La mixité fonctionnelle à l’épreuve. Une perspective européenne. Les expériences de Milan, Copenhague, Hamburg, Paris, PUCA / Milan, Politecnico di Milano. ; Sennett, 2017[38]Op. cit.).
Du couloir industriel
à la dimension paysagère et environnementale nouvelle
Conflit entre les rôles industriel et paysager
de l’interface portuaire
En raison de sa situation géographique en bordure du canal, ce site se trouve au centre des débats et des intérêts divergents concernant le rôle et la fonction de la voie d’eau au sein des tissus métropolitains. D’une part, le canal est perçu comme une infrastructure industrielle, associée à la fragmentation urbaine qui contribue à l’isolement de certains espaces ; d’autre part, son potentiel paysager est mis en avant comme une solution visant à reconnecter les quartiers. Le schéma directeur des eaux de Lille (2014) témoigne déjà du changement de perception du territoire du canal, qui commence à être considéré comme un corridor écologique. Plus tardivement, l’étude « Territoire de projets. Deûle partagée. Atelier “Imaginer la Deûle partagée” », de l’agence de développement et d’urbanisme de Lille métropole souligne le rôle de la Deûle comme « un espace urbain et paysager majeur pour la qualité de vie des citoyens (habitants et usagers), l’attractivité de la métropole lilloise et l’adaptation du territoire face au changement climatique ». Dans ce contexte, la voie d’eau est envisagée comme une solution, incarnant une « valeur fondatrice du territoire » (Bariol et Decoupigny, 2022, p. 8[39]Bariol B, Decoupigny D (dir.). (2022). Territoire de projets Deûle partagée. Atelier « Imaginer la Deûle partagée », Lille, agence de développement et d’urbanisme de Lille Métropole. [En ligne). L’objectif consiste ainsi à concilier différentes ambitions et intérêts, afin de parvenir à un « partage harmonieux de la Deûle », conçu « à partir du traitement de ses abords, entre les activités économiques et industrielles d’une part et une attractivité résidentielle et récréative renouvelée d’autre part » (idem, p. 9). Il s’agit donc d’une volonté explicite de concilier les différents conflits d’usage et de pacifier le territoire en favorisant une logique de mixité fonctionnelle. Cependant, les transformations encouragées par les projets urbains et les programmes visant à établir une connexion entre la ville et le port, notamment en intégrant le développement de fonctions résidentielles et de services, suscitent des conflits et des compétitions entre les divers intérêts impliqués (Mazy, 2014[40]Mazy K. (2014). « Villes et ports fluviaux : le projet comme dispositif de reconnexion ? Regards croisés sur Bruxelles et Lille », thèse de doctorat, Université de Lille 1, Université Libre de Bruxelles. [En ligne).
La présence significative de l’eau dans le quartier, comme l’ancien canal de la Deûle et le canal à grand gabarit bordant le port, est essentiellement considérée comme un élément de séparation et de frontière, participant à isoler le quartier des Bois Blancs du reste de la ville de Lille. Elle constitue une représentation partagée, mise en avant dans les documents de planification ainsi que dans les discours accompagnant les projets métropolitains et communaux. Cet effet de coupure est renforcé par les emprises industrielles qui contribuent à l’enclavement du quartier. Ainsi, bien que les voies d’eau puissent jouer un rôle paysager et structurant en connectant les différents quartiers urbains, elles entraînent une concurrence avec la fonction du canal, qui sert à la fois d’infrastructure logistique et de support pour les activités manufacturières. Les politiques publiques orientant le territoire du canal vers un rôle exclusivement écologique et paysager visent à apaiser l’espace logistique et industriel, souvent conflictuel. Elles adoptent une approche consensuelle qui tend à invisibiliser la complexité de ses fonctions et les conflits qui en résultent. Nous terminons en indiquant que ces divers cadres cognitifs définissent les conflits liés aux agendas politiques, lesquels sont intrinsèquement façonnés par les acteurs qui participent à la définition des rôles de l’espace du canal ; ainsi, la concurrence s’établit entre, d’une part, les acteurs qui conçoivent cet espace comme un support écologique, et d’autre part, ceux qui le considèrent avant tout comme une infrastructure à vocation industrielle. Parallèlement, dans la logique de mixité fonctionnelle promue par la planification urbaine, les espaces verts sont privilégiés en tant que vecteurs d’amélioration du cadre de vie et perçus comme parfaitement compatibles avec les fonctions résidentielles, alors que les activités industrielles, perçues comme responsables de débordements nuisibles, se trouvent évincées de cette logique, ce qui reflète une priorisation implicite des usages considérés comme socialement et spatialement plus acceptables.
Conflit environnemental
et hétérogénéité des représentations
de la pollution et des nuisances
La traduction spatiale des conflits, notamment ceux liés aux agendas politiques décrits précédemment, prend la forme d’un conflit environnemental, dans lequel le site de Refinal se retrouve au cœur des enjeux. Ce conflit illustre une tension entre, d’un côté, les enjeux environnementaux liés à la qualité du cadre de vie et, de l’autre, ceux liés à la production en ville sur un site dédié aux activités de recyclage. En outre, la situation géographique de ce site le place également au cœur des enjeux de sécurité et de prévention des risques technologiques, en raison de sa proximité avec le site concerné par le plan de prévention des risques technologiques (PPRT) de l’Usine chimique de Loos. La notion de conflit environnemental, telle que la propose Bruno Charlier (1999[41]Charlier B. (1999). « La défense de l’environnement : entre espace et territoire. Géographie des conflits environnementaux déclenchés en France depuis 1974 », thèse de doctorat, Université de Pau et des Pays de l’Adour [En ligne), englobe l’ensemble des conflits suscités par les nuisances, les pollutions ou les risques associés aux activités, ainsi que ceux occasionnés par des projets d’aménagement. Cette définition souligne le caractère structurant de la composante spatiale, notamment la proximité d’une source de nuisances ou d’un projet, dans la dynamique des conflits environnementaux.
La dimension conflictuelle du site émerge suite à l’arrêté préfectoral du 2 avril 1999, autorisant l’entreprise à augmenter la production de son usine de raffinage d’aluminium et à continuer l’exploitation d’une plateforme dédiée à la récupération de métaux ferreux et non ferreux (figure 5). Les résidents, regroupés dans le Collectif Environnement Haute Deûle (CEHD), visent à sensibiliser aux problèmes environnementaux associés à ce site. Ils établissent un lien entre l’apparition de nuisances et cette augmentation de la production. « L’usine incinère des produits sans système d’évacuation de la fumée, créant ainsi une atmosphère irrespirable, même les week-ends, en soirée, et même les jours fériés »[42]Entretien avec le Collectif Environnement Haute Deûle.. Les habitants soulignent également d’autres types de pollutions et de nuisances liées à l’activité du site, notamment en termes de qualité du sol, de pollution sonore, ainsi que de circulation de poids lourds.

La pétition élaborée par le collectif revendique un « environnement propre », « calme », ainsi qu’un cadre de vie « sans aucun risque pour la santé publique et l’environnement ». « Nous revendiquons le droit d’être informés et de pouvoir consulter librement le résultat des différentes campagnes de mesure et études, en toute transparence »[43]Idem.. Avec le soutien des communes de Lomme et de Lille, l’association demande des études environnementales visant à quantifier les nuisances et la pollution produites par cette installation industrielle. En conséquence, le conseil municipal de Lomme et la préfecture ont exigé la réalisation d’une étude sur une période de 12 mois, à partir de juin 2020. Cette démarche témoigne d’une tentative d’objectivation du discours sur les nuisances et pollutions du site, de « production institutionnalisée d’indicateurs » (Neveu, 2022[44]Neveu É. (2022). Sociologie politique des problèmes publics, Paris, Armand Colin.) dans le but d’en faire des outils de détection de performances ou de problèmes.
Cependant, les résultats des études environnementales sont insuffisants pour fournir des réponses concluantes ainsi que pour pallier le conflit. En effet, certains indicateurs étudiés, tels que les particules fines dans l’air, affichent des valeurs conformes aux limites réglementaires établies. Cependant, pour d’autres indicateurs, tels que les poussières tombées au sol ou la présence d’aluminium dans l’air, il convient de noter qu’il n’existe pas de normes ou de seuils de référence clairement établis. De plus, dans le cas des études techniques sur la pollution et des politiques de gestion de la pollution industrielle, les limites de cette approche sont spécifiquement liées à la logique de mise en relation des effets nocifs avec des facteurs presque impossibles à isoler dans le système complexe de production industrielle (Beck, 2001[45]Beck U. (2001). La société du risque. Sur la voie d’une autre modernité, Paris, Aubier.). Les mesures et les outils mis en place pour atténuer les impacts environnementaux et la pollution sont confrontés au fait qu’ils sont incomplets, car ils font partie d’une logique visant à maximiser la prévention des dommages les plus importants (Douglas et Wildavsky, 1983[46]Douglas M, Wildavsky A. (1983). Risk and culture: an essay on the selection of technological and environmental dangers, Oakland, University of California Press. ; Douglas, 2001[47]Douglas M. (2001). De la souillure. Essai sur les notions de pollution et de tabou, Paris, La Découverte.). De plus, il est impossible de trouver des processus totalement neutres en termes de valeur pour choisir entre différentes alternatives de risque. La recherche d’une méthode « objective » est vouée à l’échec (Fischhoff et al., 1980[48]Fischhoff B, Lichtenstein S, Slovic P et al. (1980). Approaches to acceptable risk: a critical guide, Oak Ridge National Laboratory.).
La dimension conflictuelle de la phase d’études environnementales émerge également dans le contexte de visions contradictoires entre les différentes institutions, ce qui, en France, s’inscrit dans un contexte de hiérarchies et de relations juridiques complexes entre les différentes entités publiques. Ces complexités découlent de l’urbanisme décentralisé, du développement de l’intercommunalité et de l’intégration des principes du développement durable dans une grande partie des politiques publiques. Alors que la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) présente les résultats des études comme insuffisants pour affirmer que l’usine dépasse les normes environnementales, certaines autorités locales construisent leurs arguments non pas sur les normes réglementaires, mais plutôt sur des représentations de l’acceptabilité des nuisances en lien avec des visions de la qualité de vie : « Si vous comparez l’environnement de Refinal à un centre-ville traditionnel, vous pouvez voir qu’il est impacté »[49]« Les premiers relevés autour de Refinal Industries ont parlé », La Voix du Nord, 21 février 2021., souligne le maire de Lomme. Le conflit est inhérent à l’asymétrie des relations de pouvoir entre les différentes parties prenantes et les institutions. L’hétérogénéité des représentations de la pollution et des nuisances entre différents groupes sociaux est liée spécifiquement à la perception de l’environnement spatial, au rôle de la position sociale et aux pratiques au sein des institutions (Douglas et Wildavsky, 1983[50]Op. cit.). Le processus de gestion des risques est marqué par une dimension conflictuelle, car il cherche à concilier la prévention et la sécurité contre les accidents industriels, d’une part, et le développement économique ou urbain, d’autre part.
Cette étude de cas met en lumière un conflit entre la conception d’une ville productive, où les activités de recyclage occupent une place significative dans le tissu urbain, et la tendance des politiques publiques à invisibiliser le recyclage comme processus industriel. Les activités de recyclage sont souvent considérées comme une solution aux enjeux environnementaux. En effet, dans le cadre des réflexions menées pour les projets Europan sur le territoire lillois, le recyclage est présenté comme un enjeu favorisant la mixité et les circuits courts, ainsi qu’une opportunité pour le développement de la ville productive. Par exemple, il est soutenu que « la métropole a davantage à gagner avec une économie qui mise sur une production et des emplois locaux moins préjudiciables pour l’environnement, en mettant l’accent sur le recyclage et les cycles courts »[51]Métropole européenne de Lille, ville de Lille. Europan 14. Villes productives. Lille. Ile des Bois Blancs. L’île des possibles, berges sous influence productive, dossier de site..
Cependant, la politique publique communale de la ville de Lomme, intitulée « Lomme en TransitionS », initiée en 2016, se concentre sur le recyclage à travers sa dimension de comportement citoyen environnemental, ou d’ « activisme environnemental » tel que le définit Max Liboiron (2017[52]Liboiron M. (2017). « Recycler : une crise du sens », Vacarme, n° 79(2), p. 99-103. [En ligne). Ainsi, le caractère industriel et le processus global de gouvernance du recyclage sont ignorés au profit de la pédagogie citoyenne concernant les gestes de recyclage et certains comportements de consommation. En conséquence, tout aspect conflictuel du processus de production de la filière de recyclage est invisibilisé. Ce phénomène, par l’abstraction du processus de recyclage, contribue à construire une politique publique consensuelle qui tend à éviter les conflits. En conclusion, la tentative de pacification de l’interface portuaire, par la réorientation de ses fonctions vers des usages paysagers et résidentiels, conduit la planification urbaine à invisibiliser les contradictions inhérentes à la coexistence des fonctions industrielles et écologiques. Ainsi, la volonté de concilier des usages divergents à travers une approche consensuelle entraîne la marginalisation des activités perçues comme génératrices de nuisances, au profit de celles jugées plus compatibles avec un cadre de vie. En conséquence, l’absence de prise en compte des conflits lors du processus de la planification urbaine aboutit finalement à leur déplacement vers l’espace habité.
La planification urbaine
face aux différentes dimensions conflictuelles
Les politiques publiques et les plans évoqués précédemment marquent les différents cadres cognitifs et la diversité des représentations des acteurs associés ou en relation avec ce site. Ces cadres institutionnels de la planification et des politiques publiques s’entrelacent avec les actions effectives qui façonnent l’organisation urbaine et le tissu social particulier du cas d’étude. La complexité de la planification urbaine, illustrée par une multitude d’objectifs parfois contradictoires, voire concurrents, contribue à la nature conflictuelle inhérente à ce type de site. Ainsi, l’acquisition par l’entreprise d’une parcelle adjacente au site Refinal, d’une étendue significative de quatre hectares, auprès de la chambre de commerce et d’industrie (CCI) (figure 6), a ravivé les tensions existantes autour de ce site et a intensifié l’implication des conseils municipaux, notamment celui de Lomme et celui de Lille. Au niveau communal, ce terrain est considéré comme un emplacement stratégique pour le décloisonnement du quartier du Marais. En effet, la commune de Lomme a prévu d’utiliser une partie de cette parcelle pour élargir le boulevard industriel afin de faciliter la future ligne de bus à haut niveau de service desservant EuraTechnologies.

Les enjeux fonciers au centre
du caractère concurrent de l’espace urbain
En juin 2000, Lille Métropole a adopté son premier plan de déplacements urbains (PDU). Initié en 1995, il se caractérise par son objectif de repenser le fonctionnement du transport public existant, sans poser la question des grandes infrastructures. Dans ce contexte se dessine l’idée d’un « bus à haut niveau de service », conçue pour améliorer la desserte des zones non couvertes par le métro (figure 7). Ce concept s’inscrit récemment dans le cadre du schéma directeur des infrastructures de transports (SDIT) visant à planifier les grandes infrastructures de transport en commun jusqu’en 2035, en mettant en avant dans le discours son rôle « social », « environnemental », et « de qualité urbaine »[53]Métropole européenne de Lille, support de présentation de la réunion publique du 1er mars 2022, réunion publique – concertation préalable, bus à haut niveau de service Lille-Villeneuve d’Ascq..

Ce projet entre en contradiction avec l’expansion prévue du site manufacturier et engendre ainsi un conflit foncier qui implique principalement les communes de Lomme et de Lille, ainsi que l’entreprise concernée. Les dynamiques conflictuelles liées au foncier tendent à se transformer en litiges juridiques, intégrant à la fois les contradictions économiques de l’exclusion et de l’expansion, et le lien entre les relations juridiques et sociales de propriété et les relations socioéconomiques de production (Plotkin, 2009[54]Plotkin S. (2009). « Property, policy and politics: towards a theory of urban land‐use conflict », International Journal of Urban and Regional Research, n° 11, p. 382‑404. [En ligne). Plus précisément, bien qu’elles n’aient pas pu exercer le droit de préemption de la métropole, les communes ont ainsi centré leur stratégie de litige juridique sur le domaine environnemental. Ainsi, les autorités communales s’appuient sur le conflit environnemental précédemment décrit pour justifier les restrictions concernant l’agrandissement du site et les activités de l’entreprise. Elles s’appuient sur les revendications de l’association des habitants pour la réduction des nuisances et de la pollution produites par cette installation industrielle.
L’imbrication
entre les différentes dimensions conflictuelles
Ce conflit foncier est le résultat d’une double dynamique d’inclusion et d’exclusion des usages et fonctions opérées par la planification urbaine (Mazza, 2009, p. 131[55]Op. cit. ; Pacchi et Pasqui, 2015, p. 82[56]Op. cit.). Ce dernier se traduit par la modification d’usage ou d’affectation d’un espace, ainsi que par le changement des profils des habitants ou des types d’entreprises et d’établissements présents. Ainsi, ce processus, marqué par des phases de compétition, finit par façonner la structure du territoire à travers les « formations, ségrégations et associations »[57]Idem. des usages, des infrastructures et des populations qui s’inscrivent dans l’histoire de la planification axée sur le renouvellement urbain de ce territoire.
Pour le dire en d’autres termes, l’acquisition d’un nouveau terrain par l’entreprise a engendré des controverses concernant cette stratégie ainsi que les motifs de cet agrandissement. Un discours contradictoire entoure cette situation : d’une part, l’association des habitants s’interroge sur une éventuelle expansion de la production, craignant une augmentation des nuisances sur le site ; d’autre part, l’entreprise justifie cette acquisition comme étant stratégique pour la réorganisation du flux de transport, visant à dévier la circulation des poids lourds vers la rue Victor-Hugo. Cette réorganisation tendrait à atténuer les conflits liés aux flux de transport et de logistique. On peut affirmer qu’en mobilisant divers outils, notamment les régulations environnementales et les dispositifs juridiques comme le droit de préemption, les communes ont cherché à mettre en œuvre une « perturbation réglementaire » (Rose, 2000[58]Rose C. (2000). « Property and expropriation: themes and variations in American law », Faculty Scholarship Series. [En ligne) afin d’intervenir dans le processus d’acquisition et de limiter le droit de propriété. Les nuisances et débordements industriels de l’entreprise interrogent la nature de la propriété du site, car bien que les droits de propriété soient limités à une parcelle de terrain, celle-ci n’est pas isolée et fait partie d’un territoire donnant accès à d’autres ressources collectivement partagées. En d’autres termes, la propriété d’un terrain confère également l’accès à des ressources telles que l’air, l’eau et la faune, qui peuvent normalement traverser les limites de propriété détenues par plusieurs propriétaires.
Ainsi, il est important de souligner que les différents registres de conflits – environnemental, d’usage, foncier et d’agenda politique – interagissent et se superposent dans le cas du site Refinal (figure 8). Le conflit environnemental émerge comme l’élément central autour duquel s’agrègent les autres dimensions conflictuelles. Il devient un instrument dans les discours des collectivités pour établir un rapport de force, en particulier dans les processus conflictuels liés à la question foncière qui se rejoignent avec celle de l’agenda politique. Le conflit environnemental est au cœur du processus visant à rendre les activités manufacturières conformes aux normes institutionnelles et repose sur l’établissement d’une représentation de compatibilité dans le but d’instaurer un consensus. Les activités ne répondant pas à ces critères sont considérées comme des exceptions et font l’objet d’une volonté d’éviction des espaces urbains. Ces divers conflits, qui émergent dans l’étude de cas, se manifestent principalement à l’échelle du projet et de l’espace habité, tandis que les choix institutionnels et le processus d’élaboration des documents de planification cherchent à les atténuer. Ce décalage entre la logique institutionnelle et les « interventions effectives » (Castells, 1975[59]Op. cit.) génère des tensions, où la négation des conflits à un niveau institutionnel reporte ces mêmes tensions à l’échelle des espaces habités.

Conclusion
L’analyse du rôle des politiques publiques et de la planification urbaine dans la gestion et la résolution des conflits urbains liés aux activités manufacturières met en lumière une dualité complexe. D’une part, ces politiques et cette planification aspirent à pacifier et à réguler les tensions inhérentes à ces activités. D’autre part, elles sont intrinsèquement politiques et façonnées par des rapports de force, ce qui les rend elles-mêmes sujettes à des conflits. Cette analyse révèle les conflits et les paradoxes qui animent la planification urbaine, dans un contexte où un ancien site industriel coexiste avec de nouvelles visions de développement économique, cherchant à renforcer l’attractivité métropolitaine ainsi que de promouvoir la ville productive.
Le site Refinal à Lomme révèle la complexité inhérente à la construction sociale de l’acceptabilité de la pollution et des nuisances, ainsi que des politiques de gestion de ces problématiques. La propriété foncière est un élément central qui reflète les conflits fonciers et les oppositions liées à la régulation de l’usage des sols. Les limitations imposées à la propriété privée dans les documents d’urbanisme sont perçues à la fois comme des obstacles et des opportunités par les promoteurs immobiliers, qui jouent un rôle clé dans le processus décisionnel en urbanisme. Il convient également de souligner que les limites physiques de la propriété des espaces manufacturiers font partie d’une vaste entité composée des territoires environnants et des ressources qui les entourent. Dans ce contexte, les impacts environnementaux et les nuisances des activités productives ne se limitent pas aux frontières des propriétés ; au contraire, ils affectent souvent des ressources collectivement partagées.
Dans ce contexte, les rapports entre, d’une part, le cadre institutionnel de la planification et, d’autre part, les actions effectives sont complexes. L’étude de cas nous apprend qu’un rapport de contradiction émerge entre le projet territorial, lié à la politique des pôles d’excellence ainsi que celui associé à la ville productive, et la réalité de l’organisation de l’espace urbain, ainsi que les actions effectives en lien avec les activités manufacturières en place. Le lien entre les différentes dimensions conflictuelles, en particulier celles liées aux nuisances et à la pollution, et celles liées aux ressources foncières, contribue à la dynamique d’exclusion des usages et fonctions de production. Les discours et l’implication des acteurs institutionnels jouent un rôle crucial dans l’exploitation du conflit environnemental en tant que levier pour façonner les dynamiques de pouvoir, surtout dans les domaines fonciers. On comprend rapidement que dans la quête du consensus et la poursuite des objectifs d’attractivité urbaine, les politiques publiques ainsi que les discours qui les accompagnent visent à rendre les activités manufacturières conformes aux normes institutionnelles. Ce processus repose sur le principe de compatibilité, où les activités non conciliables, notamment avec une fonction résidentielle, sont perçues comme des anomalies et sont susceptibles d’être évincées.
La planification à l’échelle métropolitaine, à travers à la fois le PLU mais également des visions stratégiques et architecturales mises en place dans le cadre d’Europan, tend à soutenir l’idée de la ville productive tout en minimisant l’aspect conflictuel de l’activité manufacturière et des conflits fonciers, ce qui déplace les tensions vers l’espace habité et les projets urbains. Par ailleurs, bien que la notion de mixité fonctionnelle soit souvent valorisée comme un principe consensuel en matière de planification, elle ne prend pas pleinement en compte, dans ce cas d’étude, les conflits potentiels entre les différentes fonctions urbaines.
[1] L’expression « activités productives » est utilisée dans cet article pour désigner les activités définies comme telles dans le cadre de recherches et de projets concernant la ville productive. Ce concept vise à englober une variété de secteurs d’activité et de modes de production (comme l’industrie ou l’artisanat), tout en reconnaissant la diversité et l’ambiguïté associées à ce terme.
[2] Nous désignons par activités manufacturières les secteurs d’activité faisant partie de la section C de la NAF ainsi que les activités de recyclage – qui consistent à transformer des matières en vue de la fabrication de produits.
[3] Letté M, Le Roux T. (2019). Débordements industriels : environnement, territoire et conflit (XVIIIe-XXIe siècle), Rennes, Presses universitaires de Rennes [En ligne].
[4] Davidoff P, Reiner TA. (1962). « A choice theory of planning », Journal of the American Institute of Planners, n° 28(2), p. 103‑115 [En ligne].
[5] Mazza L. (2009). « Centenary paper: plan and constitution – Aristotle’s Hippodamus: towards an “ostensive” definition of spatial planning », The Town planning review, n° 80, p. 113‑141 [En ligne].
[6] Pacchi C, Pasqui G. (2015). « Urban planning without conflicts? Observations on the nature of and conditions for urban contestation in the case of Milan », dans Gualini E, Planning and Conflict : Critical Perspectives on Contentious Urban Developments, New York, Routledge.
[7] Brand R, Gaffikin F. (2007). « Collaborative planning in an uncollaborative world », Planning Theory, n° 6, p. 282‑313 [En ligne].
[8] Healey P. (2003). « Collaborative planning in perspective », Planning Theory, n° 2(2), p. 101‑123 [En ligne].
[9] Purbani K. (2017). « Collaborative planning for city development. A perspective from a city planner », Scientific Review Engineering and Environmental Sciences, n° 26, p. 136‑147 [En ligne].
[10] Healey P. (1992). « Planning through debate: the communicative turn in planning theory », Town Planning Review, n° 62, p. 143-162 [En ligne].
[11] Healey P. (2008). « The pragmatic tradition in planning thought », Journal of Planning Education and Research, n° 28, p. 277-292 [En ligne].
[12] Innes JE. (1995). « Planning theory’s emerging paradigm: communicative action and interactive practice », Journal of Planning Education and Research, n° 14(3), p. 183-189 [En ligne].
[13] Dans le cadre de ce travail, il s’agit d’appréhender le concept de conflit à travers ses différentes formes d’opposition, d’antagonismes et de compétition, fondées sur des logiques distinctes ou contentieuses (D’Alessandro C. (2013). « Valeurs environnementales entre identité et conflit : le Parc National du Gran Sasso et des Monts de la Laga (Italie) », dans Melé P, Larrue C, Rosemberg M, Conflits et territoires, Tours, Presses universitaires François-Rabelais, p. 83-101. [En ligne]). Ainsi, il s’agit de dépasser l’approche réductrice de la conflictualité à sa dimension observable, matérialisée par une action de protestation (Mössner S, Renau L. (2014). « What makes a protest (not) happen? The fragmented landscape of post-political conflict culture », dans Gualini E, Planning and conflict: critical perspectives on contentious urban developments, New York, Routledge, p. 63-78). Cette lecture englobante du conflit cherche à prendre en compte la complexité qui régit la relation entre les conflits, tout en restant attentive au fait que l’absence d’une forme de performativité du conflit ne témoigne pas de l’absence de conflictualité, mais surtout des mécanismes et des dynamiques de leur invisibilisation.
[14] Lascoumes P, Le Galès P. (2018). Sociologie de l’action publique, Paris, Armand Colin.
[15] Rivelois J. (1987). La dimension sociale de la planification urbaine, Paris, École des hautes études en sciences sociales. [En ligne].
[16] Gualini E (dir.). (2015). Planning and conflict: critical perspectives on contentious urban developments, New York, Routledge.
[17] Castells M. (1975). Sociologie de l’espace industriel, Paris, Anthropos.
[18] Callon M. (2013). « Sociologie de l’acteur réseau », dans Akrich M, Latour B (dir.), Sociologie de la traduction : textes fondateurs, Paris, Presses des Mines, p. 267-276. [En ligne].
[19] Söderström O. (2001). Des images pour agir : le visuel en urbanisme, Paris, Payot.
[20] Musselin C. (2005). « Sociologie de l’action organisée et analyse des politiques publiques : deux approches pour un même objet ? », Revue française de science politique, n° 55(1), p. 51-71. [En ligne].
[21] Le site fonctionne comme une plateforme de raffinage d’aluminium pour le groupe, traitant le métal provenant des filiales de Derichebourg ainsi que d’autres sociétés. L’aluminium est fondu dans des fours et transformé en lingots, avec une production mensuelle d’environ 4 000 tonnes. L’entreprise dessert une quarantaine de clients, majoritairement issus de l’industrie automobile, et la production est réalisée en continu, en grandes séries.
[22] Collectif Degeyter. (2017). De la ville industrielle aux reconversions tertiaires, Paris, La Découverte, p. 9-26. [En ligne].
[23] Ambrosino C, Guillon V. (2010). « Les trois approches de la ville créative : gouverner, consommer et produire », L’Observatoire, n° 36(1), p. 25-28. [En ligne].
[24] Castells M. (1969). « Vers une théorie sociologique de la planification urbaine », Sociologie du travail, n° 11(4), p. 413-443. [En ligne].
[25] Le terme de finalité renvoie à une des dimensions caractéristiques des politiques publiques (Hassenteufel P. (2021). Sociologie politique de l’action publique, Paris, Armand Colin), qui vise la construction d’une cohérence programmatique pour la résolution des problèmes publics.
[26] Op. cit.
[27] Paris D, Mons D. (2009). Lille métropole : laboratoire du renouveau urbain, Marseille, Parenthèses.
[28] Pour une analyse des différentes dynamiques entre les « anciennes » et « nouvelles activités productives », voir : Orban A, Trenado CS, Vanin F. (2021). À qui profitent les activités productives ? Analyse du cas de Cureghem, Brussels Studies. [En ligne].
[29] Rapport de présentation. Lille-Lomme ZAC, étendue du 1er secteur opérationnel des Rives de la Haute-Deûle, octobre 2017, p. 14.
[30] Gilbart A. (2019). « La ville productive : un nouveau paradigme pour le projet urbain ? », Mardi des Chercheurs. [En ligne].
[31] Métropole européenne de Lille, ville de Lille. (2018). Europan 14. Villes productives. Lille. Ile des Bois Blancs. L’île des possibles, berges sous influence productive, dossier de site.
[32] Maugard A, Vince A (dir.). (2018). Villes productives : catalogue des résultats, Europan 14, Montreuil, Europan France.
[33] Op. cit.
[34] Keil R, Boudreau JA. (2010). « Le concept de la ville créative : la création d’une réelle ou imaginaire forme d’action politique dominante », Pôle Sud, n° 32(1), p. 165-178. [En ligne].
[35] Vivant E. (2009). Qu’est-ce que la ville créative ? Paris, Presses Universitaires de France. [En ligne].
[36] Nawratek K (dir.). (2017). Urban re-industrialization, Brooklyn, Punctum Books.
[37] Bricocoli M, Savoldi P. (2012). Mixité fonctionnelle versus zoning : de nouveaux enjeux ? / La mixité fonctionnelle à l’épreuve. Une perspective européenne. Les expériences de Milan, Copenhague, Hamburg, Paris, PUCA / Milan, Politecnico di Milano.
[38] Op. cit.
[39] Bariol B, Decoupigny D (dir.). (2022). Territoire de projets Deûle partagée. Atelier « Imaginer la Deûle partagée », Lille, agence de développement et d’urbanisme de Lille Métropole. [En ligne].
[40] Mazy K. (2014). « Villes et ports fluviaux : le projet comme dispositif de reconnexion ? Regards croisés sur Bruxelles et Lille », thèse de doctorat, Université de Lille 1, Université Libre de Bruxelles. [En ligne].
[41] Charlier B. (1999). « La défense de l’environnement : entre espace et territoire. Géographie des conflits environnementaux déclenchés en France depuis 1974 », thèse de doctorat, Université de Pau et des Pays de l’Adour [En ligne].
[42] Entretien avec le Collectif Environnement Haute Deûle.
[43] Idem.
[44] Neveu É. (2022). Sociologie politique des problèmes publics, Paris, Armand Colin.
[45] Beck U. (2001). La société du risque. Sur la voie d’une autre modernité, Paris, Aubier.
[46] Douglas M, Wildavsky A. (1983). Risk and culture: an essay on the selection of technological and environmental dangers, Oakland, University of California Press.
[47] Douglas M. (2001). De la souillure. Essai sur les notions de pollution et de tabou, Paris, La Découverte.
[48] Fischhoff B, Lichtenstein S, Slovic P et al. (1980). Approaches to acceptable risk: a critical guide, Oak Ridge National Laboratory.
[49] « Les premiers relevés autour de Refinal Industries ont parlé », La Voix du Nord, 21 février 2021.
[50] Op. cit.
[51] Métropole européenne de Lille, ville de Lille. Europan 14. Villes productives. Lille. Ile des Bois Blancs. L’île des possibles, berges sous influence productive, dossier de site.
[52] Liboiron M. (2017). « Recycler : une crise du sens », Vacarme, n° 79(2), p. 99-103. [En ligne].
[53] Métropole européenne de Lille, support de présentation de la réunion publique du 1er mars 2022, réunion publique – concertation préalable, bus à haut niveau de service Lille-Villeneuve d’Ascq.
[54] Plotkin S. (2009). « Property, policy and politics: towards a theory of urban land‐use conflict », International Journal of Urban and Regional Research, n° 11, p. 382‑404. [En ligne].
[55] Op. cit.
[56] Op. cit.
[57] Idem.
[58] Rose C. (2000). « Property and expropriation: themes and variations in American law », Faculty Scholarship Series. [En ligne].
[59] Op. cit.