frontispice

Les études urbaines
et l’urbanisme au Québec
Deux compagnons de route indissociables, indépendants et qui s’ignorent…

• Sommaire du no 1

Sandra Breux Institut national de la recherche scientifique Jean-Pierre Collin Centre Urbanisation, culture et société de l'Institut national de la recherche scientifique (INRS-UCS) Geneviève Cloutier Centre de recherche en aménagement et développement, Université Laval (Québec) Claire Poitras Centre Urbanisation Culture Société de l’Institut national de la recherche scientifique

Les études urbaines et l’urbanisme au Québec : deux compagnons de route indissociables, indépendants et qui s’ignorent…, Riurba no 1, juillet 2015.
URL : https://www.riurba.review/article/01-savoir/quebec-2/
Article publié le 1er juil. 2015

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Sandra Breux, Jean-Pierre Collin, Geneviève Cloutier, Claire Poitras
Article publié le 1er juil. 2015
  • Abstract
  • Résumé

Urban Studies and Urban Planning in Quebec: Rubbing Shoulders without Talking to Each Other?

This paper looks at how Urban Studies and Urban Planning have been established as autonomous fields in Quebec. By providing an overview of research and teaching in these areas we seek, on the one hand, to better understand their relationships and, on the second one, to identify the distinctiveness of Quebec  if it exists  in this matter. In the past few years, while the issue of defining Urban Studies and Urban Planning has resurfaced, particularly in the United States and in France, the Quebec context has been little looked at. Although covering similar topics, research in Urban Studies and Urban Planning in Quebec differs from many points of view. After considering how the two areas have been enrolled in a differentiated way in the academic landscape, we examine their meaning and their relationship by providing an overview of major works published during the years 2000 to grasp what distinguishes the topics discussed.

Cet article expose la manière dont les études urbaines et l’urbanisme se sont constitués comme champs autonomes au Québec. En brossant un portrait de la recherche et de l’enseignement de ces deux domaines, nous cherchons, d’une part, à mieux comprendre les relations qu’ils entretiennent et, d’autre part, à cerner la spécificité québécoise — si tant est qu’elle existe — en cette matière. Si depuis quelques années, la question de la définition des études urbaines et de l’urbanisme a resurgi, notamment aux États-Unis et en France, le contexte québécois n’a fait l’objet d’aucune réflexion de ce type. Bien que couvrant des thématiques semblables, la recherche en études urbaines et en urbanisme au Québec se distingue de plusieurs points de vue. Après avoir considéré la façon dont les deux domaines se sont inscrits d’une manière différenciée dans le paysage universitaire, nous examinons leur acception, leur relation et leur spécificité contemporaines en réalisant un tour d’horizon des principaux écrits publiés au cours des années 2000.

Cet encadré technique n’est affiché que pour les administrateurs
post->ID de l’article : 4546 • Résumé en_US : 5097 • Résumé fr_FR : 5093 •

Introduction

Les nombreux dictionnaires et encyclopédies publiés au cours des dernières années sur les mots de la ville et de l’urbain[1]Caves R (dir.). (2005). Encyclopedia of the City, Londres, Routledge ; Cowan R. (2005). Dictionnary of Urbanism, Tisbury, Wiltshire, Streetwise Press ; Gottdiener M, Budd L. (2005). Key Concepts in Urban Studies, London, Sage ; Lévy J, Lussault M. (dir.). (2003). Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, Paris, Belin ; Merlin P, Choay F. (1988). Dictionnaire de l’urbanisme et de l’aménagement, Paris, Presses Universitaires de France ; Topalov C, Coudroy de Lille L, Depaule JC, Marin B. (dir.). (2010). L’aventure des mots de la ville à travers le temps, les langues, les sociétés, Paris, Robert Laffont. permettent de mieux saisir la spécificité des études urbaines par rapport à l’urbanisme. Malgré l’abondance de définitions et d’éclaircissements conceptuels, le débat n’est pas clos, et des incertitudes persistent quant à la manière de concevoir les deux domaines d’expertise. De plus, en raison de l’émergence des études urbaines à partir des années 1960, les frontières entre les disciplines des sciences sociales s’intéressant à l’espace urbain sont demeurées difficiles à tracer, comme le souligne Chris Pickvance : « Urban geography, urban politics, and urban sociology overlap considerably — hence the idea that urban studies is more appropriate than any disciplinary label[2]Pickvance C. (1994). Sociology and Spatial Development, Work, Employment, Society, n° 8(1), p. 127-130. ». En outre, les catégories visant à différencier l’urbanisme et les études urbaines ne sont pas toujours adéquates. Ainsi, l’urbanisme est habituellement considéré comme une approche normative et pratique, tournée vers l’action et que les anglophones qualifieraient de hands-on. Quant aux études urbaines, elles seraient davantage théoriques et critiques, par conséquent hands-off, bien que les analyses qu’elles génèrent visent aussi à proposer des solutions et des orientations politiques s’efforçant de résoudre les problèmes de la ville.

Selon la période considérée, les distinctions entre l’urbanisme et les études urbaines n’ont pas la même portée ou signification. Par exemple, dans le monde anglophone, la notion d’urbanisme telle qu’élaborée notamment par Louis Wirth dans les années 1930 renvoie aux caractéristiques clés de la ville — la grande taille, la densité et la diversité sociale et fonctionnelle — et la manière dont ces traits distincts ont des répercussions sur les relations sociales[3]Beauregard RA. (2005). Urbanism, dans Caves R (dir.), Encyclopedia of the City, Londres, Routledge, p. 501- 502.. Cette notion implique aussi un certain rapport intellectuel engagé avec la ville, qui contribue au développement d’une culture soi-disant spécifiquement urbaine. La dimension sociale s’avère primordiale, bien qu’elle interagisse d’une manière étroite avec la forme urbaine : mode de vie et espace urbain sont en quelque sorte les deux côtés d’une même médaille. Cette vision de l’urbanism a été contredite par les changements sociaux et culturels qu’ont connus les villes au cours des dernières décennies. Ainsi, les régions métropolitaines contemporaines seraient caractérisées notamment par une forme polycentrique offrant à leurs habitants une multiplicité d’expériences sociales et culturelles où l’hétérogénéité et la créativité sont de mise[4]Gottdiener M, Budd L, (2005), op. cit., p. 187..

Le développement différencié dans le temps de l’urbanisme, d’une part, et des études urbaines, d’autre part, a contribué à rendre leur identité propre plus explicite. Cette distinction prend cependant des accents différents selon les contextes et à l’intérieur même de certaines zones géographiques. Tel est le cas du Québec où l’urbanisme prend forme comme pratique professionnelle plus tardivement qu’aux États-Unis[5]Smith C. (2009). The Plan of Chicago: Daniel Burnham and the Remaking of the American City, Chicago, University of Chicago Press. Aux États-Unis, l’urbanisme s’est défini comme une discipline professionnelle à partir de la fin du xixe siècle, alors que la croissance rapide et désordonnée des villes industrielles a incité les pouvoirs publics, en collaboration avec les acteurs privés du développement économique, à mettre en branle des grandes opérations urbanistiques emblématiques comme le Plan de Chicago de 1909., au courant des années 1950 au moment où les régions urbaines connaissent une importante expansion démographique et spatiale. L’outil proposé pour résoudre les problèmes de croissance est le plan d’urbanisme à l’échelle locale ou régionale qui s’inscrit dans une perspective « d’aménagement rationnel du territoire[6]Grenier F. (1957). L’urbanisme dans la province de Québec, Cahiers de Géographie du Québec, n° 2(2), p. 217-220, (p. 220). ».

La nécessité de convoquer d’autres disciplines des sciences sociales afin de saisir les évolutions possibles de la ville québécoise est alors évoquée par des représentants de la communauté des urbanistes[7]Barcelo M. (1968). L’urbanisme : réalisations et obstacles. Recherches sociographiques, n° 9(1-2), p. 109.. Mais cet appel à une plus grande intégration des deux grandes catégories de savoirs — c’est-à-dire les savoirs experts élaborés par les architectes, les urbanistes et les ingénieurs et les savoirs savants produits par les sociologues, géographes, historiens, anthropologues ou économistes[8]Van Damme S. (2005). Les sciences humaines à l’épreuve de la ville : les enjeux d’une archéologie des savoirs urbains : xviie-xxe siècle. Revue d’Histoire des sciences humaines, n° 1(12), p. 3-15, (p. 10). — n’a pas vraiment trouvé écho chez les acteurs concernés ; ce qui a mené au fil des ans à une différenciation accrue des deux champs de recherche et d’intervention. Aujourd’hui, cette différenciation, si elle s’accroît, n’est cependant pas toujours consommée, si bien que ces domaines s’apparentent tantôt à des compagnons de route, tantôt à des champs d’étude et de recherche distincts, ou bien encore se concurrencent[9]Beaudet G. (2004). Les 40 ans de l’Institut d’urbanisme. L’Institut d’urbanisme 1961-1962 – 2001-2002. Un urbanisme ouvert sur le monde, Montréal, Éditions Trames. De telles relations contribuent à brouiller les frontières entre ces domaines et tendent à rendre plus délicate la saisie de leur acception.

Par ailleurs, depuis quelques années, devant le constat des nombreux apports d’autres disciplines au domaine de l’urbain, la question de la définition des études urbaines et de l’urbanisme resurgit, notamment aux États-Unis et en France[10]Bowen W, Dunn RA, Kasdan DO. (2010). What is “Urban Studies”? Context, Internal Structure and Content, Journal of Urban Affairs, n° 32(2), p. 199-227 ; Pinson D. (2004). Urban Planning: an “undisciplined” discipline? Futures, n° 36, p. 503-513 ; Scherrer F. (2010). Le contrepoint des études urbaines et de l’urbanisme ou comment se détacher de l’évidence de leur utilité sociale. Tracés, n° 10, p. 187-195.. Ainsi, dans leur article intitulé « What is Urban Studies? » et paru en 2010 aux États-Unis, Bowen et al. soulignent que bien que les études urbaines ne soient pas à bien des égards une discipline académique, il n’en demeure pas moins que c’est un champ cohérent, distinctement structuré, prometteur, et une façon d’analyser une réalité en constante évolution (c’est-à-dire le milieu urbain). Daniel Pinson[11]Pinson, 2004, op. cit., quant à lui, tient un discours quelque peu semblable dans le cas de l’urbanisme en soulignant que c’est d’abord et avant tout une discipline indisciplinée aux contours flous qui ne respecterait pas les « standards » des disciplines académiques traditionnelles. Le contexte québécois n’a fait l’objet d’aucune réflexion de ce type, en dépit des relations spécifiques qu’entretiennent ces deux domaines. Pourtant, ce contexte est porteur d’un certain nombre de caractéristiques au sein de l’ensemble canadien et nord-américain. D’une part, le Québec regroupe sur son territoire le plus de programmes d’études urbaines. Outre cette caractéristique quantitative, le Québec est la seule province canadienne à disposer d’un réseau de chercheurs en études urbaines, le réseau Villes Régions Monde, créé en 2000. D’autre part, en raison de son histoire et de sa position géographique, le Québec est en contact avec les contextes de recherche et d’enseignement nord-américain et européen, où le français et l’anglais se côtoient fréquemment.

Dans ce cadre spécifique, l’objectif de notre propos est d’identifier la façon dont au Québec les champs de l’urbanisme et des études urbaines se définissent, se différencient et s’entremêlent. Sans forcément chercher à participer aux débats abordant leur statut épistémologique et leur « utilité sociale[12]Scherrer, 2010, op. cit. », nous revenons ici sur l’historique d’une relation entre deux champs à travers leur ancrage dans le paysage universitaire québécois. En ce sens, nous décrirons d’abord l’entrée à l’université de ces deux domaines afin de mieux comprendre leur acception et leur relation contemporaines. Il s’agira ensuite d’examiner plus précisément les structures d’enseignement et de recherche mises sur pied au fil du temps et de saisir leurs particularités et raisons d’être. Puis, nous réaliserons un tour d’horizon des principaux écrits publiés entre 2000 et 2009 au sein de ces deux champs, afin de saisir la façon dont ils se distinguent dans les thématiques qu’ils abordent. Cette analyse se réalisera à partir d’une vaste recherche documentaire effectuée en 2011 dans le domaine des études urbaines[13]Cloutier G, Collin JP, Poitras C (dir.). (2011). Dix ans d’études urbaines au Québec. Bilan et perspectives d’avenir, Québec, Presses de l’Université Laval, 147 p. et complétée en 2012 dans le domaine de l’urbanisme[14]Il va de soi qu’un tableau des principales publications dans chacun de ces deux domaines ne saurait être exhaustif. L’objectif est davantage ici d’identifier les principales tendances majeures de l’exercice réalisé par Cloutier et al. (2011, op. cit.), cheminement que nous avons répliqué pour l’urbanisme aux fins de cet article.. Enfin, ce portrait de la recherche et de l’enseignement en études urbaines et en urbanisme nous permettra de mieux comprendre les relations que ces deux domaines entretiennent.

L’entrée à l’université des études urbaines et de l’urbanisme

L’entrée à l’université de l’urbanisme et des études urbaines au Québec est marquée par trois éléments principaux. Premièrement, la distinction à laquelle nous référions plus haut entre « l’appliqué » (hands-on) — qui serait davantage du ressort de l’urbanisme — et le « théorique » (hands-off) — associé plus généralement aux études urbaines — a servi de base à la création des premiers programmes dans ces deux domaines. Deuxièmement, des tentatives de rapprochement et des glissements se sont opérés au fil du temps, rendant parfois caduque cette différenciation. Enfin, le Québec se démarque nettement des autres provinces canadiennes dans le domaine des études urbaines. La description détaillée de l’histoire de cette « institutionnalisation » de l’urbanisme et des études urbaines au Québec permet de saisir les particularités associées au contexte dans lequel ces champs opèrent.

Premier élément
La création des programmes universitaires
en urbanisme et leur évolution
à la faveur d’ouverture théorique
intégratrice des études urbaines

Au moment où se créent et se structurent les départements et facultés de sciences sociales, dans les années 1950 et 1960, la société québécoise prend conscience de son urbanité et s’engage dans une période de modernisation de ses institutions et de ses politiques publiques, fondée notamment sur la création d’un État-providence d’un type particulier en Amérique du Nord – désignée ensuite comme la « Révolution tranquille[15]Bélanger Y, Comeau R, Métivier C. (2000). La Révolution tranquille – 40 ans plus tard : un bilan, Montréal, Éditions VLB ; Bourque G. (2000). Le modèle québécois de développement, Québec, Presses de l’Université du Québec ; Guindon H. (1990). Tradition, modernité et aspiration nationale de la société québécoise, Montréal, Éditions Saint-Martin ; Hamel P, Jouve B. (2006). Un modèle québécois ? Gouvernance et participation dans la gestion publique, Montréal, Presses de l’Université de Montréal. ». Dans ce contexte, les enjeux urbains en tant qu’expression aboutie du passage de la société traditionnelle à la société moderne se situent au cœur des disciplines naissantes. Certains travaux monographiques s’inscrivent d’ailleurs d’emblée sur les traces de l’École de Chicago[16]Hughes EC. (1943). French Canada in Transition, Chicago, University of Chicago Press.. D’autres ouvrent la voie au chantier des histoires régionales[17]Dumont F, Martin Y. (1963). L’analyse des structures sociales régionales. Étude sociologique de la région de Saint-Jérôme, Québec, Presses de l’Université Laval.. D’autres encore s’éloignent toutefois de cette école de l’écologie urbaine et de cette approche « régionaliste » et proposent plutôt une lecture en termes d’urbanisation de la société tout entière[18]Fortin G. (1968). Le Québec : une ville à inventer, Recherches sociographiques, n° 9(1-2), p. 11-21 ; Fortin G. (1971). La fin d’un règne, Montréal, Éditions Hurtubise HMH..

C’est à cette même période que naît l’Institut d’urbanisme de l’Université de Montréal. Précisons que cette institution n’était pas pionnière en la matière : l’université anglophone McGill détenait un programme d’urbanisme depuis 1948. Au cours de cette année, l’architecte Harold Spence-Sales (1907-2004) s’installait à Montréal et participait à la création de l’École d’urbanisme de l’Université McGill. La formation qui y était offerte « s’inscrivait dans le sillage des préoccupations de la Société centrale d’hypothèques et de logement. Elle était surtout destinée à former des professionnels aptes à assister les promoteurs immobiliers du secteur privé[19]Beaudet, 2004, op. cit., p. 23. ». La naissance relativement tardive d’une institution francophone offrant une formation universitaire en urbanisme (en comparaison, à la même période, on dénombrait quelques 45 programmes de premier et de deuxième cycles dans ce domaine aux États-Unis) s’explique principalement par « le peu d’intérêt manifesté pour ces questions, malgré l’importance des problèmes hérités d’une urbanisation mal contrôlée et l’ampleur des transformations en cours et prévisibles[20]Ibid., p. 23. ». Cette première institution dispensera d’abord et avant tout une formation professionnelle et technique de deuxième cycle en urbanisme, illustrant « la prégnance de la conception anglo-saxonne de l’urbanisme opérationnel » : « Même si l’Institut [d’urbanisme de l’Université de Montréal] a une mission d’enseignement supérieur et de recherche, les premières années logent à l’enseigne d’une formation technique et d’une approche quasi exclusivement physico-spatiale. Les raisons en sont multiples. D’une part, ceux qui y enseignent et y encadrent les ateliers sont des professionnels déjà bien engagés dans la pratique privée. Leur perception de l’urbanisme et partant, de la formation requise, est fortement influencée par ces prédispositions. D’autre part, la pertinence de la recherche en urbanisme ne sera pas véritablement reconnue avant la fin des années 1960. La recherche tardera conséquemment à influencer et à infléchir les enseignements[21]Ibid., p. 28. ».

Les choses se modifient quelque peu au milieu des années 1960. Le recrutement de nouveaux professeurs au sein de l’Institut d’urbanisme de l’Université de Montréal élargit le champ des disciplines abordées dans la formation en urbanisme. L’approche physico-spatiale laisse place à une approche plus analytique qui ouvre la voie à l’essor des études urbaines : « en 1966 environ, le programme de l’Institut d’urbanisme subit un changement profond. Le profil professionnel est aboli et remplacé par le profil disciplinaire d’études urbaines. Les cours professionnels d’application pratique n’étaient plus obligatoires et n’avaient plus le rôle d’intégrateur des cours d’appoint dont certains considérés pré-requis[22]Bégin, dans Beaudet, 2004, op. cit., p. 31. ». Ce point de rencontre entre études régionales/urbaines et urbanisme sera d’ailleurs maintenu quelques années plus tard (en 1973) lors de la création du premier programme d’études urbaines de premier cycle à l’Université du Québec à Montréal. Initialement baptisé « baccalauréat en études urbaines », ce programme sera rebaptisé quatre ans plus tard « baccalauréat en urbanisme[23]Il est à noter que la création d’un baccalauréat en urbanisme à l’Université du Québec à Montréal attisa certaines tensions avec l’Institut d’urbanisme de l’Université de Montréal qui souhaitait également se doter d’un programme de formation de baccalauréat. Pour en savoir plus, consulter Beaudet, 2004, op. cit. », entretenant un flou sur les distinctions existant entre les deux domaines. En comparaison, l’histoire des études urbaines au Québec semble avoir pris une voie plus originale. Aux États-Unis, l’émergence des urban studies s’inscrit dans la foulée de la faillite économique et sociale des grandes villes, particulièrement celles de la Rust Belt[24]« While the United States as a whole saw robust increases in economic activity over the postwar period, the economic performance of regions within the country was highly unequal. The region that arguably fared worst of all is the portion of the Midwest and Northeast known as the “Rust Belt.” While there is no standard definition of the Rust Belt, it has generally come to mean the heavy manufacturing zone near the Great Lakes and wage growth has lagged far behind the rest of the country since the end of World War II. » (Alder S, Lagakos D, Ohanian L. (2012). The Decline of the U.S. Rust Belt: a Macroeconomic Analysis. Document non publié, p. 1 [En ligne, d’une part, et de l’agenda politique provoqué par les émeutes raciales des années 1965-1970, d’autre part. Au Québec, les études urbaines ne s’arriment pas et ne doivent pas leur naissance à une crise sociale (et fiscale) des quartiers centraux. Il faut dire qu’à l’instar de l’ensemble des villes canadiennes, les villes-centres québécoises n’ont pas connu le déclin dramatique qui a caractérisé les grandes villes étatsuniennes, bien qu’elles aient été touchées par l’étalement urbain des ménages et des entreprises. Il n’empêche que dans les départements de sciences sociales alors en développement, professeurs et étudiants sont fortement influencés par les États-Unis.

Tout en étant sensibles au foisonnement des travaux étatsuniens, la géographie urbaine, la sociologie urbaine, l’économie urbaine, l’histoire urbaine, etc. émergent dans les années 1960 et 1970 et se condensent dans les études urbaines naissantes[25]Godbout J, Andrew C, Polèse M. (1985). Lectures de l’urbain. Recherches sociographiques, n° 26(1-2), p. 179-197.. Ces dernières puisent tout autant à la production européenne — surtout française mais pas seulement, notamment d’inspiration marxiste[26]Castells M. (1972). La question urbaine, Paris, Maspero. y compris des approches plus hétérodoxes[27]Lefebvre H. (1970). La révolution urbaine, Paris, Gallimard. ou s’inscrivent dans la foulée de la géographie régionale[28]Bailly A. (1986). Les représentations spatiales et dynamiques urbaines et régionales, Montréal, Éditions Régionales Européennes et Éditions de l’Université du Québec à Montréal., de l’école historique des Annales[29]Pinol JL. (1991). Le monde des villes au xixe siècle, Paris, Hachette. ou de l’urbanisme[30]Choay F. (1965). L’urbanisme : utopies et réalités. Une anthologie, Paris, Hachette.. Malgré le flou qui perdure lorsque l’on parle d’études urbaines au Québec, cette position intermédiaire entre l’Europe et les Amériques contribue à teinter la façon dont on se représente — et dont on fait – des études urbaines.

Deuxième élément
Tentatives de rapprochements et glissements

Les études urbaines et les études régionales — ces dernières sont notamment suscitées, d’une part, par le grand nombre de municipalités éloignées des grands centres urbains et, d’autre part, par la prévalence d’un modèle dual opposant la métropole (Montréal) et les « régions[31]Conseil des Affaires Sociales. (1989). Deux Québec dans un : rapport sur le développement social et démographique, Boucherville éditions. » — ont d’abord été conçues ensemble, avant de s’autonomiser l’une de l’autre. La naissance en 1970 du Centre de recherches urbaines et régionales (qui deviendra par la suite l’Institut national de la recherche scientifique – Urbanisation) en témoigne. Études urbaines et études régionales sont alors les deux faces d’une même médaille et il est couramment admis que les deux vont de pair. Ainsi, à l’Université Laval sont créés au début des années 1970 un programme de 2e cycle et un centre de recherche intégrant les questions de l’aménagement du territoire et du développement régional. De même, à la fin des années 1960, à l’Institut d’urbanisme de l’Université de Montréal, les modifications au cursus et aux orientations pédagogiques sont dominées par l’arrivée de nouveaux professeurs recrutés parmi les spécialistes des regional studies[32]Beaudet, 2004, op. cit..

Cette relation entre les études urbaines et les études régionales ainsi que celle entre l’urbanisme et les études régionales vont cependant s’étioler au fil du temps. La création d’un doctorat en études urbaines au début des années 1990 est rapidement doublée de la mise en place d’un doctorat en développement régional (1996) qui s’oriente progressivement vers un « renouvellement » des sciences régionales désormais désignées comme les « sciences du territoire[33]Massicotte G. (2008). Sciences du territoire : perspectives québécoises, Québec, Presses de l’Université du Québec. ». Celles-ci se définissent sinon en rupture du moins en tournant le dos aux études urbaines. En bref, l’urbanisme et les études urbaines ont connu une institutionnalisation parallèle où les points de rencontre, lorsqu’ils ont existé, ont été relativement fugaces et parfois conflictuels.

Le portrait des institutions de recherche dans ces deux domaines confirme la proximité de ces champs. Il convient cependant de mentionner que la frontière entre les institutions de recherche consacrées à des thématiques propres aux études urbaines ou à l’urbanisme est plus que difficile à tracer, puisque les thématiques traitées par ces deux champs partagent de nombreux points communs (voir partie 2). Toutefois, le nombre d’institutions de recherche affiliées aux études urbaines ou à une discipline spécifique (la sociologie ou l’histoire, par exemple) est bien plus élevé que le nombre d’institutions affiliées à des programmes de formation en urbanisme. Ce constat tend de nouveau à mettre en évidence la conception anglo-saxonne prévalant au Québec, notamment parce qu’en matière de recherche les études urbaines englobent les institutions associées à l’urbanisme.

Troisième élément
La spécificité québécoise

En dépit de ces constats, le Québec ne se démarque pas moins du reste du Canada. En effet, le dénombrement des groupes, chaires et laboratoires de recherche associés au domaine de l’urbain montre la forte présence des études urbaines au Québec. On y compte près d’une quarantaine de regroupements de taille différente, ce qui représente un nombre quasiment équivalent aux institutions de recherche que l’on retrouve dans tout le reste du Canada. Le point culminant est sans conteste la création du réseau Villes Régions Monde[34]Villes Régions Monde, vrm.ca [En ligne en 2000, et ce pour deux raisons. D’une part, il concentre près de 75 % des chercheurs du Québec qui œuvrent dans le domaine de l’urbain (dont certains chercheurs affiliés à des institutions dispensant des formations d’urbanisme). D’autre part, il porte spécifiquement sur les études urbaines.

L’équivalent du réseau VRM n’existe pas ailleurs au Canada — ce qui vient témoigner du fait que le domaine des études urbaines a connu un développement relativement plus important au Québec que dans le reste du Canada (soulignons également que le réseau VRM est un des rares membres institutionnels de Urban Affairs Association (UAA) extérieurs aux États-Unis). Il convient cependant de mentionner qu’en ce qui concerne l’organisation de la recherche, un facteur important de l’explication de la différence québécoise au sein du Canada tient certainement à l’organisation des programmes de soutien de la recherche. Le Fonds de Recherche du Québec – Société et Culture, un des principaux organismes subventionnaires, favorise par ses programmes la création d’équipes et de regroupements (centres et réseaux) stables. Néanmoins, les dernières années, le reste du Canada semble montrer un intérêt plus marqué pour le développement d’équipes de recherche d’envergure et de grands travaux concertés ou en partenariat[35]Maltais-Tremblay A, Labrecque AC, Liégeois L. (2012). Les études urbaines au Canada [En ligne.

Ce bref portrait des institutions de formation et de recherche au Québec permet de mettre en évidence une première partie des relations qu’entretiennent les études urbaines et l’urbanisme au Québec. À la lumière des programmes de formation, ce sont deux champs qui ont évolué en parallèle, voire en réaction l’un de l’autre. Cependant, dans le domaine de la recherche, l’urbanisme est considéré comme un sous-champ des études urbaines, au même titre que les autres disciplines constitutives des études urbaines. Le portrait des principales publications dans ces deux domaines appuie ces premiers constats et confirme la spécificité qu’a développée le Québec dans la manière de penser les études urbaines.

La recherche en études urbaines et en urbanisme :
des thématiques semblables

Les principaux écrits en études urbaines et en urbanisme depuis les années 2000 permettent de dresser deux constats. Premièrement, la production est plus élevée en études urbaines qu’en urbanisme, ce que viennent corroborer les données mentionnées précédemment sur les institutions vouées à la recherche. Toutefois, les contributions au débat public des écrits en urbanisme sont nettement plus élevées que celles des études urbaines. Il existe donc une distinction de nature dans les publications, qui n’est pas sans rappeler la conception nord-américaine de chacun des champs à l’étude. Deuxièmement, le relevé des principales publications dans ces deux domaines souligne la proximité des thématiques analysées. Dans le domaine des études urbaines, la gouvernance, l’habitat, la mobilité et l’économie ainsi que les questions reliées au patrimoine et au projet urbain ont fortement marqué la dernière décennie. L’environnement, le paysage, la gestion du patrimoine, les enjeux liés à l’étalement urbain, le projet urbain et la participation de la société civile à la planification urbaine caractérisent la recherche dans le champ de l’urbanisme contemporain au Québec. Si ces différentes thématiques demeurent relativement semblables, des distinctions sont perceptibles cependant dans le traitement de ces thèmes. Ces distinctions sont mises en lumière à partir d’une comparaison des travaux des chercheurs québécois, les distinguant selon leur appartenance à un département universitaire d’urbanisme ou à un département rattaché aux études urbaines.

Études urbaines : les principales thématiques
depuis les années 2000[36]Ce tour d’horizon de la recherche s’appuie sur un travail en quatre temps mené par l’équipe de coordination de  VRM et par des chercheurs membres du réseau ayant accepté de relever le défi de synthétiser les productions répertoriées : 1) une recherche bibliographique des articles, des livres, des thèses et mémoires, des rapports produits dans les établissements universitaires québécois entre 2000 et 2009 et inscrits dans les outils de recherche traditionnels – base de données des bibliothèques universitaires, sites Internet des centres de recherche, des chaires, des équipes ; 2) un regroupement des travaux inventoriés autour des quatre thématiques prioritaires de recherche de VRM, à partir des titres et des résumés ; 3) une revue, la plus large possible, des productions associées à chaque thème, réalisées par quatre équipes de chercheurs ; 4) une relecture par les lecteurs éclairés et une bonification selon les recommandations. L’exercice en quatre temps a d’abord été mené pour faire un bilan des études urbaines et il a ensuite servi de grille de lecture pour analyser les travaux spécifiques à l’urbanisme, c’est-à-dire pour distinguer les quatre grandes thématiques structurantes du domaine, les questions et problématiques abordées par les chercheurs et les sous-thèmes couverts dans les travaux publiés. De façon générale, en dehors des travaux associés à VRM (réseau qui regroupe plusieurs universités du Québec), les travaux issus de l’Institut d’urbanisme de l’Université de Montréal, de l’UQÀM, de Concordia et de McGill ont été considérés – sauf exception – comme étant plus proches de l’urbanisme que des études urbaines.

Le tableau 1 résume les problématiques majeures abordées dans le domaine des études urbaines ainsi que les sous-thèmes qui ont structuré ce champ.

Ce premier portrait nécessite d’être détaillé pour bien saisir l’angle d’analyse proposé par les études urbaines. Ainsi, la première thématique, celle de la gouvernance urbaine, est structurée par deux sous-ensembles : la participation citoyenne à la démocratie municipale, d’une part, et la gouvernance métropolitaine, d’autre part. La forte présence de ces deux sous-thèmes est principalement liée à l’importante restructuration des instances municipales de représentation qui a eu lieu au début de la décennie et à l’engouement depuis le milieu des années 1990 pour la démocratie participative. Il est intéressant de noter que, bien qu’ils ne soient pas complètement absents, les politologues sont au final relativement peu présents[37]Notons également que ce constat vaut pour l’ensemble du Canada, comme l’ont montré Taylor et Eidelman (Taylor Z, Eidelman G. (2010). Canadian Political Science and the City: A Limited Engagement. Canadian Journal of Political Science, n° 43(4), p. 961-981., laissant la place aux géographes, sociologues et historiens. Conséquemment, des questions sont laissées dans l’angle mort de la recherche et des écrits. Cela est notamment le cas pour l’étude de la démocratie représentative, du cadre électoral et des élections, de la décentralisation et du métier d’élu municipal. Ce phénomène n’est nullement surprenant car la science politique en général tend à négliger l’échelle locale.

La deuxième thématique, arrimée autour des questions relatives à « l’habiter », révèle trois sous-thèmes aux publications abondantes : a) la division sociale de la ville ; b) la diversité culturelle ; c) la figure urbaine de la communauté locale et la réactualisation du quartier. Ces questions sont généralement examinées sous deux angles complémentaires : la mise au jour de la mosaïque urbaine et des rapports sociaux entre les groupes qui composent la ville, d’une part, des modes de production/transformation des espaces de la ville, de l’habitat à la région métropolitaine, d’autre part. Les travaux ayant traité des questions d’immigration et d’ethnicité, de multiculturalisme et de cosmopolitisme, de diversité culturelle et de la condition immigrante sont particulièrement nombreux. Il convient cependant de mentionner que cette préoccupation pour l’étude des dynamiques sociales qui façonnent la ville n’aborde que plus rarement les questions reliées à la ségrégation socio-spatiale en comparaison avec les écrits existant sur ce thème, tant en Europe qu’aux États-Unis. C’est souvent autour du quartier que s’orientent les analyses et les discussions, revalorisant un territoire quelque peu délaissé auparavant.

Le troisième ensemble de recherches qui a marqué les études urbaines québécoises dans les années 2000 s’articule autour des questions classiques de l’économie métropolitaine et du transport. Deux grands sous-thèmes ont dominé ces recherches. Le premier est précisément celui de la mobilité et des pratiques de localisation. Ces travaux ont été l’occasion d’une forte préoccupation pour le développement et le renouvellement des méthodologies quantitatives et surtout spatiales (SIG) pour mieux saisir les transformations de la métropole contemporaine. Plus fortement ancré dans une tradition de recherche qui cherche à faire le lien entre l’économie et les études régionales, la géographie et la méthodologie, la sociologie et l’action publique, le second sous-thème est celui des particularités québécoises en matière d’innovation. À ce chapitre, on observe une volonté originale de prendre en compte concurremment et au même niveau d’importance les impératifs du développement économique urbain et régional, d’une part, et les enjeux de l’économie sociale, d’autre part. On comprend alors que dans l’animation de ce sous-champ, à celles des économistes et des géographes, s’ajoutent les contributions des sociologues et des aménagistes. Certaines dimensions des dynamiques d’agglomération sont cependant restées en plan au cours de la décennie 2000. Ce fut notamment le cas de l’étude des villes moyennes et les formes urbaines qui les caractérisent, et du débat sur l’étalement urbain.

Enfin, la dernière partie du bilan des études urbaines au Québec tranche davantage avec les trois autres thématiques en raison de son originalité, même si elle renferme des sous-thèmes plus classiques que sont : a) la question patrimoniale ; b) le thème du projet urbain ; c) les représentations territoriales. Dans ce cadre, les recherches québécoises des années 2000 s’inscrivent sous trois grandes problématiques. D’abord, un grand nombre de travaux est consacré à l’environnement bâti et naturel de la ville en portant un regard multidisciplinaire affirmé sur ses transformations physiques et socioculturelles. Ensuite, d’autres travaux cherchent à renouveler les analyses et notre compréhension de la territorialité contemporaine. Finalement, les enjeux environnementaux sont au cœur d’une production scientifique qui a pris une importance croissante au cours de la décennie. Interpellant la géographie, l’histoire urbaine environnementale et les disciplines de l’aménagement — et plus particulièrement l’urbanisme et l’architecture —, la synthèse des écrits souligne la vivacité des analyses portant sur le patrimoine, bien que la perspective historique en urbanisme soit moins présente. Par ailleurs, l’originalité des études urbaines québécoises s’affiche au sein des recherches sur les représentations territoriales, en raison de leur nombre mais également du fait qu’elles dépassent souvent le cadre montréalais — élément plus rarissime au sein des autres thématiques. Ce quatrième et dernier thème est celui qui présente le plus grand recoupement avec la recherche en urbanisme, comme le met en évidence le tableau 2.

Urbanisme : les principales thématiques
depuis les années 2000

Le tableau 2 dresse le portrait des principales questions ou problématiques soulevées dans ce domaine ainsi que les thèmes qui contribuent à structurer la recherche dans ce champ.

La prise en compte des impacts environnementaux du développement urbain et des risques environnementaux pour les milieux urbains va de pair, au Québec, avec la mise à profit de l’environnement comme une valeur à l’appui de la pratique urbanistique. Avec la création du Bureau d’Audiences Publiques sur l’Environnement (BAPE) en 1979, le Québec innove et fait de l’environnement, qui pouvait jusque-là être considéré comme une contrainte au développement, un enjeu social et physique dont doivent se saisir les promoteurs, mais aussi les praticiens. Cela opère un élargissement du regard de l’urbanisme théorique et pratique, qui se fait, au fil des ans, à la faveur de l’association de ce domaine avec la notion de durabilité, mais aussi avec l’idée de préservation du patrimoine, de qualité de vie, de cohésion sociale et de cohérence des territoires. L’aspiration à un développement urbain durable serait même porteuse de renouvellement des perspectives et des pratiques de l’aménagement et de l’urbanisme. Les chercheurs se penchent tantôt sur les règles et les instruments permettant d’évaluer les conséquences du développement urbain sur l’environnement, tantôt sur les outils urbanistiques comme vecteurs de durabilité environnementale. On s’intéresse aux façons de réaliser un urbanisme « vert ». Il faut y voir le témoignage des efforts pour constituer la ville durable en un objet d’étude, mais aussi la réussite de la mise à l’agenda de l’enjeu environnemental dans la planification urbaine québécoise. Cela dit, plusieurs contributions récentes montrent aussi que cette prise en compte de l’environnement ne se fait pas de façon égale dans tous les domaines couverts par la pratique de l’urbanisme. La planification du transport et de la mobilité, que la plupart des études abordent également à travers la grille de lecture de la durabilité, reste fortement articulée à la dépendance à l’automobile. Les études sur les questions de transport viennent souligner le besoin de réfléchir plus en amont et plus généralement à la relation entre société et environnement. Les quelques contributions sur l’urbanisme en période de crise et de catastrophe naturelle invitent à penser qu’une réflexion éthique devrait se faire assez rapidement, surtout avec l’impératif pour les milieux urbains de faire face aux changements climatiques et à leurs impacts.

La situation est autre en ce qui concerne les travaux sur le patrimoine. Les enjeux patrimoniaux sont, eux aussi, formellement intégrés à la pratique règlementaire québécoise depuis 1979, c’est-à-dire depuis l’entrée en vigueur de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, qui exige un examen des zones d’intérêt patrimonial dans les documents d’aménagement et d’urbanisme. Cependant, il semble que cet outillage ait davantage contraint l’urbanisme québécois, sans le renouveler. La réflexion sur les valeurs, les vocations et les usages que l’on souhaite donner aux éléments patrimoniaux se fait en marge de l’élaboration des outils urbanistiques, qui concernent dès lors presque exclusivement la préservation de ces éléments et de leurs caractéristiques formelles. Les travaux sur le patrimoine constatent généralement l’écart entre les contributions des universitaires et d’organismes locaux, cherchant une manière de penser le patrimoine pour le rendre vivant, et les pratiques de l’urbanisme, qui tardent à élargir leur registre.

L’étalement urbain et le rapport à l’espace, qui caractérisent le Québec urbain au même titre que la constellation urbaine nord-américaine, font l’objet d’un nombre considérable de recherches depuis 2000. La question n’est pas nouvelle, mais la persistance du désir de banlieue, tant chez les ménages que chez les entrepreneurs, invite les chercheurs à s’interroger sur le caractère des mouvements récents vers la périphérie. En quoi le développement des banlieues contemporaines se distingue-t-il des précédents ? Le déplacement des limites de la ville vers la périphérie plus éloignée répond-il aux mêmes aspirations sociales et économiques qu’avant ? Quelle est la contribution de la nature et de la notion de paysage dans les aspirations résidentielles pour la banlieue ? Les études sur ces questions abordent la forme urbaine de la croissance à travers le référentiel du développement urbain durable pour mettre en perspective tant les nouvelles motivations derrière la périurbanisation (recherche de l’expérience de la nature, qualité de vie, etc.), que le certain rééquilibrage en faveur du centre (densification, nouvelles formes, etc.). Ce rétablissement relatif est en cours, depuis une dizaine d’années, surtout à Montréal. Toutefois, les organisations urbaines et métropolitaines insistent aujourd’hui plus que jamais sur l’importance de la densification des centres-villes. Elles peuvent compter, pour ce faire, sur le développement d’outils de conception et de représentation à la fine pointe de la technologie.

La dernière décennie a vu les logiciels de modélisation et de simulation transformer l’urbanisme, en affinant les informations dont on dispose sur les différentes dimensions du territoire, en éclairant leurs interrelations et en renforçant la collaboration entre les professionnels de l’aménagement et les acteurs locaux au sein de projets urbains. Ces outils technologiques, à la croisée des disciplines de l’urbanisme et de la géomatique, contribuent également à la création de ponts entre les chercheurs qui s’intéressent à l’intégration des représentations territoriales. En outre, en ouvrant la réflexion à une variété d’intervenants et en mettant à profit une diversité de représentations de la ville, l’usage des technologies participe au renforcement du projet urbain comme illustration des changements sociaux en cours et des changements souhaités pour l’espace. À cet égard, et comme pour les études urbaines, le projet urbain donne à la recherche en urbanisme au Québec ses traits spécifiques en insistant ici plus qu’ailleurs sur ce que ce projet révèle sur les modes d’articulation des représentations sociales et spatiales du Québec.

Ces deux portraits de la recherche en études urbaines et en urbanisme permettent de réaliser deux constats. D’une part, les écrits — et comme partout ailleurs — traduisent d’abord et avant tout l’histoire récente du fait urbain au Québec. D’autre part, les thématiques abordées et la façon dont elles le sont, ouvrent la porte à une comparaison avec ce qui se fait aux États-Unis et en Europe dans les mêmes domaines. L’analyse plus fine de ces distinctions permet de revenir sur les relations entre ces deux domaines et de circonscrire plus nettement la spécificité québécoise.

Au croisement des perspectives étatsuniennes et européennes :
l’urbanisme et les études urbaines au Québec

Il est habituel d’affirmer le caractère spécifique du Québec au sein de l’ensemble canadien et plus largement au sein du continent nord-américain, en raison notamment de ses particularités linguistiques : cette province demeure en effet une minorité linguistique au sein d’un ensemble anglophone. Ce clivage linguistique a également des répercussions dans le domaine scientifique puisque le Québec est un des rares territoires où les traditions nord-américaines et européennes se croisent, notamment en raison de son histoire spécifique. Cette histoire contribue fortement à teinter la façon dont on fait des études urbaines et de l’urbanisme au Québec.

S’il demeure certes toujours délicat d’établir des comparaisons avec d’autres zones géographiques, notamment en l’absence de travail d’enquête similaire, l’article de Bowen et al.[38]Bowen et al., 2010, op. cit. permet de réaliser un premier travail comparatif dans le domaine des études urbaines. La structure interne de recherche proposée par Bowen et al. s’arrime autour de sept sous-champs. Parmi ceux-ci, deux sont en volume de recherche et d’écrits relativement moins présents au Québec : l’économie urbaine (Urban Economics) et les études de l’environnement (Environmental studies). Les études de l’environnement sont en fait plutôt traitées de manière relativement indépendante des études urbaines. Cet élément est un des traits distinctifs du Québec puisque dans l’ensemble canadien, tout comme aux États-Unis, les études de l’environnement et de l’urbanisme ou la planification urbaine tendent à être jumelées. La question des représentations territoriales occupe toutefois une place plus importante dans la production québécoise que dans celle observée aux États-Unis.

Du côté de l’urbanisme québécois, les écrits et les recherches sont en accord avec l’une des conclusions d’un rapport français de réflexion sur la formation à l’urbanisme et à l’aménagement qui mettait notamment en lumière la multiplicité des savoir-faire associés à l’urbanisme et, conséquemment, la relative confusion quant à l’identité professionnelle des individus formés dans ce domaine[39]Frébault J, Pouyet B. (2006). Renforcer les formations à l’urbanisme et à l’aménagement, CGPC, n° 2004- 0030-01. Paris, ministère des Transports, de l’Équipement, du Tourisme, de la Mer et de la Recherche, ministère de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur.. Les connaissances générales associées à l’urbanisme renvoient, en France mais aussi au Québec, tour à tour au développement local, à la ville, aux territoires, à l’environnement, au développement social urbain, à l’architecture et au paysage. Des distinctions sont toutefois perceptibles dans le traitement de ces thématiques au sein de ces deux zones géographiques.

En dehors de ces quelques spécificités québécoises, les deux domaines rencontrent des lacunes similaires à celles observées dans d’autres contextes. Premièrement, les études urbaines pêchent par l’absence de théorie les concernant. Les études urbaines québécoises se caractérisent par la variété et le grand nombre des recherches de terrain (empiriques) et par un souci d’articulation entre les sciences sociales et l’action publique. Les développements théoriques sont généralement ignorés — quoique des approches en termes d’économie politique ou critique soient adoptées à l’occasion — et le besoin d’élaborer un cadre conceptuel commun est souvent reporté à plus tard. Deuxièmement, en urbanisme, les travaux sur les théories de la planification sont plutôt rares au Québec, alors qu’ils colorent considérablement les écrits aux États-Unis.

Au final, les études urbaines et l’urbanisme québécois traduisent une volonté de constituer deux champs interpellant différentes disciplines. En effet, si les travaux « disciplinaires » ne sont pas absents, la dominante est nettement à l’articulation des disciplines entre elles dans l’analyse des milieux urbanisés et du fait urbain. Cela se reflète également dans la préoccupation régulièrement affichée pour l’expérimentation et l’innovation méthodologique, qui permet de dépasser l’angle disciplinaire. Cette ouverture disciplinaire explique probablement les raisons pour lesquelles l’urbanisme et les études urbaines sont davantage dans les faits des compagnons de route que des concurrents.

De façon générale, en Amérique du Nord, les programmes de formation en études urbaines et en urbanisme sont souvent liés, et ils contribuent à former les praticiens dans le domaine de l’aménagement[40]Van Damme, 2005, op. cit.. Au Québec, en dehors de l’Université du Québec à Montréal où il est possible de faire un baccalauréat en urbanisme suivi d’une maîtrise en études urbaines, cette réalité semble moins vraie. Il n’y a d’ailleurs, au sein du milieu francophone, aucune formation de premier cycle en études urbaines. Une étude menée en 2009 sur la façon dont les étudiants de premier cycle récemment inscrits dans deux programmes en urbanisme définissent les études urbaines et l’urbanisme montre les stéréotypes véhiculés par ces deux domaines : l’urbaniste serait celui qui « améliore la ville » tandis que celui qui fait des études urbaines serait « celui qui comprend[41]Breux S, Collin JP. (2012). What is Urban Studies in Québec ? Preliminary Thoughts on a Field with Blurred Boundaries. Paper presented at the Urban Affairs Association, 42nd Annual Meeting, Pittsburgh. ». La complémentarité des deux sphères tient-elle au caractère plus appliqué de l’un et plus analytique de l’autre ? Ou alors, est-ce la conception nord-américaine de ces deux domaines qui contribue à forger les imaginaires et à définir des positions précises pour chacun ? Du moins, dans le domaine de la recherche, l’urbanisme et les études urbaines se côtoient et s’entrelacent… soulignant le caractère multidisciplinaire de deux domaines aux relations spécifiques. Ici revient l’image des deux compagnons de route, celle de deux champs qui composent des lieux d’arrimage entre eux, tantôt autour d’éléments plus concrets, plus physico-spatiaux, plus opérationnels, tantôt autour des jeux d’acteurs, de leurs aspirations, des dynamiques économiques et des enjeux politiques. Ces lieux d’arrimage prennent forme et trouvent leur pertinence depuis les années 1960-1970, notamment lors d’évènements scientifiques ou d’activités de transfert, de même qu’à travers les formations interdisciplinaires. Néanmoins, la persistance des distinctions entre les études urbaines et l’urbanisme indique une différenciation à la fois souhaitée par les chercheurs associés à chaque domaine, pour des raisons stratégiques notamment, et souhaitable, pour multiplier les angles d’approche de la ville.

[Jean-Pierre Collin nous a quittés en décembre 2013. Professeur-chercheur à l’INRS-UCS, il a grandement contribué au développement des études urbaines au Québec tout en accordant une place non négligeable à l’histoire urbaine.]


[1] Caves R (dir.). (2005). Encyclopedia of the City, Londres, Routledge ; Cowan R. (2005). Dictionnary of Urbanism, Tisbury, Wiltshire, Streetwise Press ; Gottdiener M, Budd L. (2005). Key Concepts in Urban Studies, London, Sage ; Lévy J, Lussault M. (dir.). (2003). Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, Paris, Belin ; Merlin P, Choay F. (1988). Dictionnaire de l’urbanisme et de l’aménagement, Paris, Presses Universitaires de France ; Topalov C, Coudroy de Lille L, Depaule JC, Marin B. (dir.). (2010). L’aventure des mots de la ville à travers le temps, les langues, les sociétés, Paris, Robert Laffont.

[2] Pickvance C. (1994). Sociology and Spatial Development, Work, Employment, Society, n° 8(1), p. 127-130.

[3] Beauregard RA. (2005). Urbanism, dans Caves R (dir.), Encyclopedia of the City, Londres, Routledge, p. 501- 502.

[4] Gottdiener M, Budd L, (2005), op. cit., p. 187.

[5] Smith C. (2009). The Plan of Chicago: Daniel Burnham and the Remaking of the American City, Chicago, University of Chicago Press. Aux États-Unis, l’urbanisme s’est défini comme une discipline professionnelle à partir de la fin du xixe siècle, alors que la croissance rapide et désordonnée des villes industrielles a incité les pouvoirs publics, en collaboration avec les acteurs privés du développement économique, à mettre en branle des grandes opérations urbanistiques emblématiques comme le Plan de Chicago de 1909.

[6] Grenier F. (1957). L’urbanisme dans la province de Québec, Cahiers de Géographie du Québec, n° 2(2), p. 217-220, (p. 220).

[7] Barcelo M. (1968). L’urbanisme : réalisations et obstacles. Recherches sociographiques, n° 9(1-2), p. 109.

[8] Van Damme S. (2005). Les sciences humaines à l’épreuve de la ville : les enjeux d’une archéologie des savoirs urbains : xviie-xxe siècle. Revue d’Histoire des sciences humaines, n° 1(12), p. 3-15, (p. 10).

[9] Beaudet G. (2004). Les 40 ans de l’Institut d’urbanisme. L’Institut d’urbanisme 1961-1962 – 2001-2002. Un urbanisme ouvert sur le monde, Montréal, Éditions Trames

[10] Bowen W, Dunn RA, Kasdan DO. (2010). What is “Urban Studies”? Context, Internal Structure and Content, Journal of Urban Affairs, n° 32(2), p. 199-227 ; Pinson D. (2004). Urban Planning: an “undisciplined” discipline? Futures, n° 36, p. 503-513 ; Scherrer F. (2010). Le contrepoint des études urbaines et de l’urbanisme ou comment se détacher de l’évidence de leur utilité sociale. Tracés, n° 10, p. 187-195.

[11] Pinson, 2004, op. cit.

[12] Scherrer, 2010, op. cit.

[13] Cloutier G, Collin JP, Poitras C (dir.). (2011). Dix ans d’études urbaines au Québec. Bilan et perspectives d’avenir, Québec, Presses de l’Université Laval, 147 p.

[14] Il va de soi qu’un tableau des principales publications dans chacun de ces deux domaines ne saurait être exhaustif. L’objectif est davantage ici d’identifier les principales tendances majeures de l’exercice réalisé par Cloutier et al. (2011, op. cit.), cheminement que nous avons répliqué pour l’urbanisme aux fins de cet article.

[15] Bélanger Y, Comeau R, Métivier C. (2000). La Révolution tranquille – 40 ans plus tard : un bilan, Montréal, Éditions VLB ; Bourque G. (2000). Le modèle québécois de développement, Québec, Presses de l’Université du Québec ; Guindon H. (1990). Tradition, modernité et aspiration nationale de la société québécoise, Montréal, Éditions Saint-Martin ; Hamel P, Jouve B. (2006). Un modèle québécois ? Gouvernance et participation dans la gestion publique, Montréal, Presses de l’Université de Montréal.

[16] Hughes EC. (1943). French Canada in Transition, Chicago, University of Chicago Press.

[17] Dumont F, Martin Y. (1963). L’analyse des structures sociales régionales. Étude sociologique de la région de Saint-Jérôme, Québec, Presses de l’Université Laval.

[18] Fortin G. (1968). Le Québec : une ville à inventer, Recherches sociographiques, n° 9(1-2), p. 11-21 ; Fortin G. (1971). La fin d’un règne, Montréal, Éditions Hurtubise HMH.

[19] Beaudet, 2004, op. cit., p. 23.

[20] Ibid., p. 23.

[21] Ibid., p. 28.

[22] Bégin, dans Beaudet, 2004, op. cit., p. 31.

[23] Il est à noter que la création d’un baccalauréat en urbanisme à l’Université du Québec à Montréal attisa certaines tensions avec l’Institut d’urbanisme de l’Université de Montréal qui souhaitait également se doter d’un programme de formation de baccalauréat. Pour en savoir plus, consulter Beaudet, 2004, op. cit.

[24] « While the United States as a whole saw robust increases in economic activity over the postwar period, the economic performance of regions within the country was highly unequal. The region that arguably fared worst of all is the portion of the Midwest and Northeast known as the “Rust Belt.” While there is no standard definition of the Rust Belt, it has generally come to mean the heavy manufacturing zone near the Great Lakes and wage growth has lagged far behind the rest of the country since the end of World War II. » (Alder S, Lagakos D, Ohanian L. (2012). The Decline of the U.S. Rust Belt: a Macroeconomic Analysis. Document non publié, p. 1 [En ligne, consulté le 15 mars 2015].

[25] Godbout J, Andrew C, Polèse M. (1985). Lectures de l’urbain. Recherches sociographiques, n° 26(1-2), p. 179-197.

[26] Castells M. (1972). La question urbaine, Paris, Maspero.

[27] Lefebvre H. (1970). La révolution urbaine, Paris, Gallimard.

[28] Bailly A. (1986). Les représentations spatiales et dynamiques urbaines et régionales, Montréal, Éditions Régionales Européennes et Éditions de l’Université du Québec à Montréal.

[29] Pinol JL. (1991). Le monde des villes au xixe siècle, Paris, Hachette.

[30] Choay F. (1965). L’urbanisme : utopies et réalités. Une anthologie, Paris, Hachette.

[31] Conseil des Affaires Sociales. (1989). Deux Québec dans un : rapport sur le développement social et démographique, Boucherville éditions.

[32] Beaudet, 2004, op. cit.

[33] Massicotte G. (2008). Sciences du territoire : perspectives québécoises, Québec, Presses de l’Université du Québec.

[34] Villes Régions Monde, vrm.ca [En ligne].

[35] Maltais-Tremblay A, Labrecque AC, Liégeois L. (2012). Les études urbaines au Canada [En ligne].

[36] Ce tour d’horizon de la recherche s’appuie sur un travail en quatre temps mené par l’équipe de coordination de  VRM et par des chercheurs membres du réseau ayant accepté de relever le défi de synthétiser les productions répertoriées : 1) une recherche bibliographique des articles, des livres, des thèses et mémoires, des rapports produits dans les établissements universitaires québécois entre 2000 et 2009 et inscrits dans les outils de recherche traditionnels – base de données des bibliothèques universitaires, sites Internet des centres de recherche, des chaires, des équipes ; 2) un regroupement des travaux inventoriés autour des quatre thématiques prioritaires de recherche de VRM, à partir des titres et des résumés ; 3) une revue, la plus large possible, des productions associées à chaque thème, réalisées par quatre équipes de chercheurs ; 4) une relecture par les lecteurs éclairés et une bonification selon les recommandations. L’exercice en quatre temps a d’abord été mené pour faire un bilan des études urbaines et il a ensuite servi de grille de lecture pour analyser les travaux spécifiques à l’urbanisme, c’est-à-dire pour distinguer les quatre grandes thématiques structurantes du domaine, les questions et problématiques abordées par les chercheurs et les sous-thèmes couverts dans les travaux publiés. De façon générale, en dehors des travaux associés à VRM (réseau qui regroupe plusieurs universités du Québec), les travaux issus de l’Institut d’urbanisme de l’Université de Montréal, de l’UQÀM, de Concordia et de McGill ont été considérés – sauf exception – comme étant plus proches de l’urbanisme que des études urbaines.

[37] Notons également que ce constat vaut pour l’ensemble du Canada, comme l’ont montré Taylor et Eidelman (Taylor Z, Eidelman G. (2010). Canadian Political Science and the City: A Limited Engagement. Canadian Journal of Political Science, n° 43(4), p. 961-981.

[38] Bowen et al., 2010, op. cit.

[39] Frébault J, Pouyet B. (2006). Renforcer les formations à l’urbanisme et à l’aménagement, CGPC, n° 2004- 0030-01. Paris, ministère des Transports, de l’Équipement, du Tourisme, de la Mer et de la Recherche, ministère de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur.

[40] Van Damme, 2005, op. cit.

[41] Breux S, Collin JP. (2012). What is Urban Studies in Québec ? Preliminary Thoughts on a Field with Blurred Boundaries. Paper presented at the Urban Affairs Association, 42nd Annual Meeting, Pittsburgh.