frontispice

La métropole modeste
Comment les périphéries façonnent
la métropole d’Aix Marseille Provence

• Sommaire du no 10

Jérôme Dubois Université Aix-Marseille

La métropole modeste : comment les périphéries façonnent la métropole d’Aix Marseille Provence, Riurba no 10, juillet 2020.
URL : https://www.riurba.review/article/10-metropoles/modeste/
Article publié le 1er fév. 2022

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Jérôme Dubois
Article publié le 1er fév. 2022
  • Abstract
  • Résumé

The modest metropolis. How the peripheries shape the metropolis of Aix-Marseille-Provence

This article analyses how the birth of a large metropolis such as Aix Marseille Provence disrupts the terms of the debate between metropolis and peripheral territories by bringing the periphery into the new institution. On this new scale, margins become a structuring element of debates and projects, given their attractiveness in relation to city centres. French metropolises are thus a paradox: although they are considered to be relevant spaces for dealing with economic, social and environmental issues, they remain politically dependent on their parties. This tension is now structuring all the policies of the new Provençal metropolis.

Cet article analyse comment la naissance d’une grande métropole comme Aix-Marseille-Provence vient bouleverser les termes du débat entre métropole et territoires périphériques en faisant entrer la périphérie dans la nouvelle institution. À cette nouvelle échelle, la question des marges devient un élément structurant des débats et des projets, compte tenu de leur attractivité par rapport aux villes centres. Les métropoles françaises sont ainsi un paradoxe : bien que considérées comme des espaces pertinents pour traiter les questions économiques, sociales et environnementales, elles demeurent politiquement dépendantes des parties qui les composent. Cette tension est aujourd’hui structurante dans toutes les politiques de la nouvelle métropole provençale.

Cet encadré technique n’est affiché que pour les administrateurs
post->ID de l’article : 2821 • Résumé en_US : 2848 • Résumé fr_FR : 2845 •

Introduction

Ce texte prend au pied de la lettre l’intitulé de l’appel à articles « Métropoles contre villes moyennes et territoires : un débat absurde ? » en répondant par l’affirmative pour une raison toute simple : ce qui fait métropole, c’est bien cette nouvelle échelle qui embrasse centralités très urbanisées, villes moyennes et périphéries plus au moins lointaines. La métropole – celle des urbanistes comme celle du droit public en France – est avant tout un changement d’échelle et donc de conception des relations entre les parties pour mieux considérer la diversité de ces grands territoires. La métropole, c’est la reconnaissance des interconnexions sans fin, dans le sillage de l’augmentation progressive de la taille des EPCI, sans que personne ne maîtrise l’aboutissement du mouvement. La question n’est donc pas celle de la métropole contre ses périphéries, puisqu’elle les englobe, mais bien celle de l’articulation entre les parties à cette nouvelle échelle. Pour l’urbaniste, les métropoles françaises posent plus précisément trois questions sans réponse satisfaisante à ce jour : celle des limites – jusqu’où ? –, celle des relations entre les parties – d’un point de vue politique comme technique – et celle du projet – des métropoles, pour quoi faire ? (Demazière, Desjardins, Sykes, 2020[1]Demazière C, Desjardins X, Sykes O. (2020). La gouvernance des métropoles et des régions urbaines. Des réformes institutionnelles aux réformes territoriales, Paris, PUCA.).

Pour illustrer le propos, cet article étudie les difficultés de la métropole Aix-Marseille-Provence (AMP) dans la construction de ses politiques publiques. À l’image du Grand Paris, la jeune métropole provençale constitue un objet d’aménagement non identifié offrant une illustration très pratique des questions posées par ce changement d’échelle. Cette analyse repose pour partie sur l’engagement de l’auteur dans la consultation urbaine et territoriale internationale portée par la Mission de préfiguration de la Métropole en 2015, puis lors de l’élaboration du SCOT de la nouvelle métropole, à partir de 2018, dans le cadre d’un groupement emmené par l’agence Devillers et Associés. À ce titre, nous travaillons depuis trois ans avec les différentes directions générales adjointes de la Métropole en charge des questions d’aménagement et de développement, et avec les assemblées d’élus, métropolitaine ou communales. Notre participation aux réunions politiques et techniques nous offre un point d’observation précieux des rapports de forces et des points de frictions entre les différentes parties du territoire métropolitain. 

On a pu lire bien des choses sur les métropoles libérales déshumanisées insérées dans l’économie monde. Que l’on soit pour (Halbert, 2010[2]HalbertL’avantage métropolitain, Paris, PUF, coll. « La ville en débat ».) ou contre (Le Blanc et al. 2014[3]Le Blanc A et al. (2014). Métropoles en débat : (dé)constructions de la ville compétitive, Paris, Presses de Paris Ouest.), les métropoles constituent des hochets faciles dans le débat intellectuel. Ce qui frappe dans cette littérature souvent passionnée, c’est la difficulté de saisir ce que pourrait être un territoire métropolitain (à titre d’exemple, voir Loisel, Rio et Talandier, 2016[4]Loisel M, Rio N, Talandier M. (2016). « L’économie métropolitaine francilienne ne se limite pas à La Défense ! », Métropolitiques, 17 octobre [En ligne)… afin de pouvoir agir dessus, puisque c’est désormais l’objet de la commande politique.

Très souvent, ce n’est pas la métropole qui est au centre des débats, mais une collection de lieux emblématiques de la ville moderne, qu’ils relèvent d’une vision positive – centralité économique, pôles de compétitivités (on n’ose plus écrire clusters), écoquartiers, totems urbains, tiers-lieux renommés ou autres attracteurs urbains… – ou négative, – quartiers de politiques de la ville, marges délaissées, centres-villes dégradés, friches industrielles ou zones commerciales à la dérive… Selon le type d’exemples mobilisés par les auteurs, la démonstration est souvent implacable, mais parle-t-elle vraiment du territoire métropolitain ?

Un autre point de vue consiste à embrasser le territoire à partir d’indicateurs macros mettant en avant « l’avantage métropolitain ». La littérature académique, comme les enquêtes de l’Insee, abonde d’analyses mettant en avant l’existence et l’intérêt de vastes systèmes urbains fruits de l’évolution économique et sociale (Veltz, 2014[5]Veltz P. (2014), Mondialisation, villes et territoires. L’économie d’archipel, Paris, PUF.) sans nécessairement obéir à un dessein public (Ghorra-Gobin, 2015[6]Ghorra-Gobin C. (2015). La métropolisation en question, Paris, PUF, coll. « La ville en débat ».). Compte tenu de leur capacité de résistance – de résilience dirions-nous aujourd’hui –, ces nouveaux territoires sont désormais au centre de réformes institutionnelles visant à faire naître des pouvoirs métropolitains plus en phase avec ces nouveaux découpages territoriaux.

Aucun de ces deux points de vue ne vient faciliter la tâche de l’urbaniste lorsqu’il doit exercer son art. Ces grandes métropoles viennent réinterroger les anciens cadres de la planification spatiale résumée par Nicolas Douay (2013[7]Douay N. (2013). « La planification urbaine française : théories, normes juridiques et défis pour la pratique », L’Information géographique, n° 77(3), p. 45-70.) : ce n’est plus de l’urbanisme d’experts d’État, ni de l’urbanisme stratégique entre un petit groupe d’acteurs ciblés, ni de l’urbanisme négocié au sein de larges arènes collaboratives. Les métropoles sont un paradoxe : dans l’esprit du Législateur, elles visent à donner de la chair à la ville actrice insérée dans l’économie monde (Padioleau et Demestree, 1991[8]Padioleau JG, Demesteere R. (1991). « Les démarches stratégiques de planification des villes. Origines, exemples et questions », Les Annales de la recherche urbaine, n° 51, p. 29-40.), alors même que dans les faits c’est plutôt l’éclatement qui les caractérise : « la ville acteur correspond à l’ambition de fusionner deux représentations fondamentales : une vision instrumentale et une construction symbolique d’identité collective», écrivaient ces auteurs il y a trente ans (p. 39). À ce jour, certaines métropoles, dont Aix-Marseille-Provence, n’ont toutefois pas rempli ces deux conditions et se retrouvent de ce fait dans une situation paradoxale : bien que considérées comme des espaces pertinents pour traiter les questions économiques, sociales et environnementales, elles demeurent politiquement dépendantes des parties qui les composent. Cette tension est aujourd’hui structurante dans toutes les politiques de la nouvelle institution.

Le temps serait-il venu des métropoles modestes ? Certes, pour certaines, elles l’étaient sans doute déjà lors de leur naissance, il y a quelques années, mais le discours dominant consistait plutôt à les mettre en avant. Ce qui est nouveau, c’est que cette humilité est aujourd’hui ouvertement revendiquée sur certains territoires, comme en témoignent récemment les propos du président de Rouen Métropole plaidant pour « l’humanisation du fait métropolitain » ou de celui de Bordeaux métropole développant ce qui pourrait être une « métropole des proximités » fondée sur une « alliance des territoires » basée sur les principes de « réciprocité et partage »[9]Propos tenus lors du colloque « #Métropoles#RésilientesEn ligne. Ce débat dépasse l’exemple de la métropole provençale ici étudiée. Si les récentes crises, sociale puis sanitaire, ont remis en avant « l’idéologie fallacieuse du localisme » (Offner, 2020, p. 88[10]Offner J.-M. (2020). Anachronismes urbains, Paris, Presses de la Fondation Nationale des Sciences Politiques.), force est de constater que le mouvement est plus profond qu’il n’y paraît. Reste à en étudier les conséquences en matière d’aménagement.

Cet article montre comment la naissance d’une grande métropole comme AMP vient bouleverser les termes du débat entre métropole et territoires périphériques en faisant entrer la périphérie dans la nouvelle institution. À travers cette extension territoriale, la question des marges devient un élément structurant des débats et des projets. La métropole contribue même à dédoubler cette question de la périphérie, puisque celle-ci se retrouve posée à la fois à l’intérieur et à l’extérieur du territoire métropolitain, et ce, dans des termes identiques. Si la démonstration s’appuie sur la mobilisation de grands éléments de diagnostic issus des différentes démarches métropolitaines étudiées par l’auteur, ce sont avant tout les recompositions politiques et leurs effets sur la capacité de la nouvelle institution à piloter des politiques d’aménagement qui sont au centre du propos.

L’article est divisé en trois parties. La première présente rapidement le contexte provençal, entre expérimentation spatiale et résistances sociales. La seconde montre comment ce débat sur la place des périphéries est venu structurer l’ensemble des politiques métropolitaines, favorisant une « revanche » des périphéries face à l’institution naissante. La dernière développe les stratégies mises en œuvre pour raccrocher voire enrôler ces périphéries dans le projet de SCOT, mettant par là même en évidence les difficultés d’arbitrage.

Un territoire entre expérimentation spatiale et résistances sociales

Le débat sur la mise en cohérence du territoire aixo-marseillais dépasse ses frontières et participe d’un débat national plus large. La création des métropoles repose essentiellement sur l’analyse des évolutions de l’économie moderne, qui avantageraient les grands ensembles urbains qui créeraient ou capteraient comparativement plus de richesse. Mais le partage de ces nouvelles ressources occasionne en retour bien des tensions. En outre, il n’est pas certain qu’elles suffisent à compenser la destruction des emplois plus traditionnels. D’un point de vue spatial, l’économie métropolitaine est aussi caractérisée par une augmentation des écarts de richesse entre les sous-territoires et entre les catégories sociales. Construire un projet métropolitain, c’est penser à la fois les métamorphoses du capitalisme globalisé et financiarisé qui se déconnecte progressivement du territoire, et les nécessaires mécanismes de redistribution des richesses à l’échelle de ce même territoire.

Un territoire polycentrique hérité de l’histoire

L’histoire du territoire de la métropole provençale illustre les effets spatiaux de ces reconfigurations économiques (Morel, 1999[11]Morel B. (1999). Marseille, naissance d’une métropole, Paris, L’Harmattan, coll. Géographies en liberté.). Au cours du XXe siècle, les activités productives se sont progressivement déployées autour de cinq espaces géographiques composant la grande région métropolitaine marseillaise : la cuvette marseillaise ;
la zone urbaine d’Aubagne à l’est ; la zone de l’Étang de Berre à l’ouest ; Aix et le pays aixois au nord ; Salon-de-Provence au nord-ouest. Cet éclatement en secteurs est souvent présenté comme une force. Il reflète à la fois la diversité et la richesse du tissu économique local et contribue à expliquer la résilience particulière de la métropole face aux crises économiques (OCDE, 2013[12]OCDE. (2013). Vers une croissance plus inclusive de la métropole Aix-Marseille. Une perspective internationale, OCDE.). Mais il rend d’autant plus nécessaire un projet métropolitain qui anticipe leurs mutations à venir, notamment celles liées aux industries traditionnelles ou à la pétrochimie sur le pourtour de l’Étang de Berre.

Ces enjeux économiques prennent également une dimension particulière compte tenu des fortes disparités entre le développement des territoires périphériques et la fragilité sociale et économique de Marseille. Les emplois qualifiés et les activités productives sont davantage répartis en périphérie, alors que la ville centre accueille plutôt des emplois publics et des activités domestiques. Cette répartition des activités fait de cet espace métropolitain un cas atypique avec une répartition des activités économiques multipolaires dans laquelle la ville centre ne joue pas son rôle. Il en résulte des écarts de richesse significatifs entre les différents espaces en termes de bases fiscales, et des communes se sont jusqu’à aujourd’hui regroupées selon des logiques avant tout financières (Dubois, 2013[13]Dubois J. (2013). MPM dans le contexte métropolitain : éléments de mise en débat, programme de recherche POPSU 2, GIP AIGPPAU, Plan urbain, ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, plateforme d’observation des projets et stratégies urbaines, 32 p.). Si, au titre du code de l’urbanisme, un SCIT n’a pas à se préoccuper directement de la répartition des richesses, la question n’en demeure pas moins sous-jacente à toutes les démarches de la nouvelle métropole.

Changement d’échelle au forceps
et inédit bloc communal à 3 niveaux

Sur un territoire longtemps réticent à l’égard des démarches intercommunales, l’État a dû imposer une métropole lors de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM), adoptée le 27 janvier 2014. La loi a créé, au 1er janvier 2016, un nouvel EPCI rassemblant les communes de la communauté urbaine de Marseille, Marseille Provence Métropole, de la communauté du Pays d’Aix, de la communauté d’agglomération Salon-Étang de Berre-Durance, de la communauté d’agglomération du Pays d’Aubagne et de l’Étoile, le syndicat d’agglomération nouvelle Ouest Provence et la communauté d’agglomération de Martigues. Six des neuf intercommunalités des Bouches-du-Rhône ont ainsi été rassemblées d’autorité.

Carte 1. Les six EPCI fusionnés (source : AGAM).

À rebours de la tradition intercommunale française, fondée sur le volontariat, la loi MAPTAM fusionne d’autorité les EPCI existants. Pour autant, la naissance de la métropole provençale a été accompagnée de quelques garde-fous destinés à rassurer les élus locaux. Cette fusion se voit, dans les faits, nuancée par la création de Conseils de Territoire (CT) sur le périmètre des anciens EPCI. Si, de par la loi, la métropole marseillaise dispose des compétences des métropoles de droit commun, la réalité est quelque peu différente compte tenu de la possibilité qui lui est offerte de rétrocéder une partie de ses compétences aux niveaux inférieurs. S’ils n’ont pas formellement de responsabilités juridiques, les CT sont obligatoirement consultés par le conseil de métropole pour toute décision les concernant ; ils peuvent émettre des vœux et disposent du droit de mettre les questions les concernant à l’ordre du jour du conseil de métropole. Comme pour le Grand Paris, ils peuvent se voir déléguer par la métropole l’exercice de certaines compétences. Le territoire provençal a largement utilisé ces possibilités en transférant la compétence PLUI (Plan Local d’Urbanisme Intercommunal) aux CT ainsi qu’un certain nombre de compétences techniques, la métropole ne gardant, en conformité avec la loi, que le pilotage des grands schémas. Ce partage des rôles officialise une volonté de coconstruction des politiques d’aménagement, dont on verra qu’elle n’est pas sans conséquence. Enfin, la loi prévoit explicitement l’organisation d’une conférence des maires qui doit se prononcer sur l’ensemble des sujets les concernant en amont des décisions métropolitaines. S’il n’y a plus formellement qu’un seul EPCI depuis le 1er janvier 2016, le territoire provençal est de fait caractérisé par une nouvelle gestion à trois niveaux du bloc communal sans précédent en France.

Pour le gouvernement, l’important était sans doute de créer la nouvelle institution, la construction de sa capacité à agir, tout comme d’ailleurs de sa légitimité politique, étant renvoyée à plus tard. L’avenir est donc difficile à entrevoir. Si, pour la première fois, le gouvernement est descendu dans l’arène des alliances intercommunales dans l’objectif d’imposer une métropole à l’échelle de la quasi-totalité du département des Bouches-du-Rhône, il se heurte aujourd’hui à de très nombreuses réticences de la plupart des élus, qui craignent de voir disparaître leur autonomie dans le nouvel ensemble. Dans ces conditions, force est de souligner l’absence d’un projet global susceptible de servir à rassembler. Depuis quatre ans, et sans doute pour quelques années encore, les grands et petits arbitrages institutionnels accaparent bien des énergies et l’emportent sur la définition d’un projet de territoire.

Le SCOT, le projet métropolitain et les PLUI,
ou de la difficulté de construire un projet partagé

La métropole créée, il a fallu mettre en chantier l’ensemble des politiques publiques entrant dans son champ de compétence, ce qui a entraîné une multiplication des études et des schémas. Trois raisons mêlées contribuent à expliquer ce foisonnement des démarches. La première concerne la nécessité de construire des diagnostics partagés à une échelle inédite sur un territoire jusqu’alors mal appréhendé dans sa globalité. La seconde renvoie à la multiplication des politiques publiques dévolues aux métropoles par la loi. La troisième a trait à la volonté de construire le socle d’un premier consensus politique. Entre l’obligation de remettre à plat l’ensemble des compétences statutaires traditionnelles – aménagement et urbanisme, transport, habitat ou développement économique ou un certain nombre de services urbains… – et la nécessité d’inventer des politiques plus innovantes et plus conformes à l’esprit des temps – planification et développement des ENR, agriculture et PAT, renforcement des trames vertes et bleues, ou prise en compte des paysages… –, le travail est considérable. Dans sa tâche, la métropole a dû partir d’une page presque blanche, ne pouvant que difficilement mobiliser les schémas et stratégies des EPCI nouvellement fusionnés compte tenu de leur caractère daté et des disparités criantes en matière de choix opérés. Ainsi, l’année 2017 a vu le lancement de multiples démarches visant à construire des diagnostics partagés sur un territoire jusqu’alors mal appréhendé dans sa globalité. Ce sont plus de 20 démarches aux statuts très différents qui s’entrechoquent depuis trois ans sur ce territoire. Il peut tout autant s’agir de réflexions politiques générales – le projet métropolitain –, d’exercices obligés au titre de la loi – Scot, PLH, plan de déplacement… –, ou encore de démarches stratégiques ponctuelles – schéma foncier tertiaire, tourisme, programme alimentaire territorial ou livre blanc de l’énergie…

La plupart de ces démarches, et notamment celles qui emportent le plus de conséquences pour les communes, ont aujourd’hui pris du retard compte tenu des oppositions politiques à la construction d’un projet métropolitain. L’élection de Martine Vassal à la présidence de l’institution en remplacement de Jean-Claude Gaudin, démissionnaire, a été accompagnée, à 12 mois des élections municipales de 2020, du gel de la plupart des démarches métropolitaines afin de marquer une pause dans le processus d’intégration en attendant l’arrivée des nouvelles équipes, ce qu’illustre le cas du Programme Local de l’Habitat (PLH) métropolitain, retiré des délibérations en mai 2019 à la demande des Territoires du Pays d’Aix et de Salon qui le trouvaient trop contraignant, ou l’élaboration du SCOT qui, de fait, s’est retrouvée gelée. Il en résulte deux années en demi-teinte, 2019 et 2020, durant lesquelles l’ensemble des diagnostics thématiques portés par les différentes DGA n’ont pu faire l’objet de plans d’action validés faute de consensus politique. Face à l’extrême prudence de l’exécutif, chaque DGA a cherché à pousser le plus loin possible ses analyses et ses visions thématiques, mais sans les partager. Faute d’arbitrages politiques, l’institution métropolitaine fonctionne aujourd’hui en silos relativement étanches.

Les élections municipales de 2020 n’ont pas mis fin à cet embouteillage des démarches parallèles ni à cette difficulté à trancher. Le 9 juillet 2020, les 240 conseillers communautaires ont réélu Martine Vassal présidente de la métropole, à la majorité absolue avec 145 voix dès le premier tour, en dépit de son échec à conquérir la ville de Marseille. Dans cette bataille, le « printemps marseillais »[14]Du nom de la liste d’union de la gauche et des écologistes qui a emporté les dernières élections municipales à Marseille. est peu intervenu, ne disposant que de très peu de soutiens hors de la commune de Marseille. En revanche, cette élection n’a pu être possible qu’avec le très fort soutien de la maire d’Aix qui a mobilisé pour la candidate ses réseaux de maires provençaux, alors que d’autres noms de candidats de droite commençaient à circuler. Sous contrainte, Martine Vassal a pris soin dans son discours d’investiture de flatter les territoires en minimisant les capacités d’arbitrage de la métropole. La présidente réélue a développé sa conception d’une « métropole de projets », qui distingue « compétences stratégiques et de proximité ». Ces dernières seront « assurées par le couple communes-territoires ». De même, elle a dit vouloir pousser des évolutions législatives pour donner une personnalité juridique aux territoires afin de les doter d’une autonomie plus forte : « La multipolarité de la métropole demande à ce que nous imaginions les formes d’organisation qui nous sont propres ».

L’organigramme politique de la nouvelle institution reflète cette mainmise des territoires sur la métropole puisque, sur les 20 vice-présidents, Marseille n’en compte que deux, aux délégations peu importantes et issues de l’opposition. En revanche, le territoire d’Aix fournit notamment un premier vice-président (Stratégie budgétaire, Contrôle de gestion, Contractualisation avec l’État et les collectivités) et une cinquième vice-présidente à la réforme métropolitaine en la personne de la fille de Madame la Maire d’Aix-en-Provence.

La revanche des périphéries

Représenter une métropole polycentrique

L’histoire et la géographie ont dessiné un territoire métropolitain particulièrement morcelé dans lequel la tache urbaine ne représente que 27 % de l’espace, alors que l’agriculture et les espaces naturels se partagent le reste. Compte tenu de la forte présence du relief (massif de l’Étoile, de la Sainte-Baume, de la Sainte-Victoire, des calanques…) et de grands morceaux de nature protégée (sites classés, loi littoral…), l’urbanisation s’est glissée le long des vallées et des plaines dans une logique de corridors jusqu’aux marges du territoire institutionnel. Cet étalement s’inscrit dans une représentation historique d’une opposition culturelle entre la mer – Marseille, tournée vers le grand large – et les terres provençales – Aix, ville administrative et agricole – qui se traduit effectivement par des géo-terroirs différents. Ces deux villes rassemblent plus de 55 % de la population et la plupart des fonctions de commandement et des grands équipements métropolitains (universités, palais de justice, sièges sociaux, directions régionales…). Particularité territoriale assez unique en France, Marseille, la première ville du territoire avec plus de 800 000 habitants, est une ville pauvre qui, loin de jouer son rôle de centralité, agit plutôt comme un repoussoir pour l’ensemble des 91 autres communes qui se sont structurées de façon à éviter de devoir travailler avec la cité phocéenne. Cette configuration explique le poids politique d’Aix qui, en dépit de sa taille démographique réduite (140 000 habitants en 2020), a au contraire su rassembler et rassurer la plupart des communes du territoire.

Pour autant, le débat Marseille-Aix est loin de résumer les enjeux du territoire. Bien des habitants se répartissent également dans un chapelet de villes moyennes, dont la population est comprise entre 20 000 et 50 000 habitants (Martigues, Aubagne, Salon-de-Provence, Istres, Vitrolles, Marignane, La Ciotat, Miramas et Gardanne). Chacune constitue autant de polarités locales qualifiées de « pôles métropolitains d’équilibre » et de « relais de la métropole » au titre du diagnostic du SCOT abritant 20 % des métropolitains.

Le reste de la population se distribue en plusieurs dizaines de petites villes et villages à la population allant de 8 000 à quelques centaines d’habitants dispersés sur l’ensemble du territoire métropolitain.

L’armature urbaine semblerait claire au premier abord. Pour autant, le portrait devient plus contrasté si on analyse les évolutions démographiques des dernières décennies. Sur le territoire provençal, comme ailleurs, ce sont ces petites communes qui ont seules capté la croissance démographique. La régulation de cette attractivité des marges constitue aujourd’hui un enjeu fondamental pour la métropole. Politiquement, elle concourt à donner de la voix aux maires des petites communes qui se sentent fondés à défendre ce modèle d’étalement urbain aux dépens des territoires très urbanisés encore récemment fragilisés par la crise de la Covid 19. À cette échelle, la rivalité Aix-Marseille devient moins structurante, tout comme la question du poids relatif des villes moyennes, puisque la plupart de ces dernières ont également connu une baisse d’attractivité. Rien de très original dans ces dynamiques, mais elles viennent bouleverser les représentations et les enjeux d’aménagement au sein de la métropole toute neuve. Ceux-ci sont désormais axés sur l’identification de nouvelles rivalités villes-campagne au sein même de son territoire. Des phénomènes qui viennent directement remettre en cause tant les fondamentaux de la construction des métropoles (des pouvoirs urbains forts et attractifs) que les impératifs de l’urbanisme durable (réduction des consommations d’espaces et intensification de la ville). Le SCOT devient le révélateur de cette nouvelle dualité rendue plus visible par le passage à l’échelle de la métropole. Ce faisant, il contribue à illustrer le tiraillement des choix d’aménagement entre structuration de l’espace pour l’insérer dans l’économie monde et nécessité de ménager des espaces résidentiels de proximité dans lesquels les habitants recherchent avant tout tranquillité et entre-soi (Olive, 2015[15]Olive M. (2015). « Métropoles en tension. La construction heurtée des espaces politiques métropolitains », Espaces et sociétés, n° 160-161(1-2), p. 135-151.).

La revanche de la périphérie intérieure

Cette diversité des cadres de vie pourrait être perçue comme une opportunité. Elle a aussi un coût, celui de la consommation d’espace, du cloisonnement des fonctions, des mouvements pendulaires toujours plus importants et d’une segmentation sociale relativement assumée. Voilà pour l’urbaniste le nœud du problème. La métropole prise depuis le point de vue de Sirius est sans doute une force mais, au quotidien, elle n’est pas la ville, faite d’échanges, de diversités et d’aménités. Un des enjeux de la nouvelle métropole est d’accompagner cette diversité afin de promouvoir une complémentarité qui ne soit pas une concurrence. La persistance d’inégalités sociospatiales vient aujourd’hui nuancer les discours les plus optimistes sur cette diversité.

Le diagnostic du PLH met en avant l’attractivité des franges de la métropole aux dépens des villes, grandes ou moyennes, puisque toutes les communes de plus de 30 000 habitants connaissent le même phénomène. Il en résulte un mouvement migratoire des centres vers la périphérie où les prix de l’immobilier sont inférieurs de plus de 50 %. Cela se traduit également par une importante consommation d’espace, compte tenu des types de logements produits, mettant la métropole en difficulté face aux exigences de l’État en matière de lutte contre l’artificialisation. AMP est caractérisée par un fonctionnement résidentiel cloisonné qui peut être résumé ainsi : des villes centres qui accueillent encore la plupart des habitants, mais peinent à retenir les ménages familiaux, des villes moyennes et villages périurbains orientés vers la propriété occupante pour les segments les plus aisés de la population (66 % de propriétaires occupants, 67 % de logements individuels) et une partie de la population exclue du marché local contrainte de se loger hors métropole. Dit autrement, c’est avant tout la périphérie qui contribue à assurer son attractivité. L’un ne va pas sans l’autre, c’est ce que résume le diagnostic du PLH, selon une formule qui pourrait être discutée pour d’autres territoires métropolitains, « alors que la périphérie attire par sa fonction résidentielle, les métropoles attirent par leur poids économique »[16]Diagnostic final, PLH métropolitain, Métro AMP, AUPA, AGAM et ADIL, p. 69.. Cette périphérie doit être entendue au sens large, elle rassemble tout autant les communes résidentielles du territoire institutionnel métropolitain que celles appartenant à des EPCI frontaliers dans le Vaucluse, le Var et les Alpes-de-Haute-Provence notamment.

Carte 2. Au sein de la métropole, ce ne sont pas les grandes villes mais les franges faiblement urbanisées qui connaissent la plus forte croissance démographique.
Sources : AGAM/AUPA, Métropole Aix-Marseille-Provence, 2021[17]Métropole Aix-Marseille-Provence. (2021). « Relations de voisinage de la Métropole Aix-Marseille-Provence », webinaire du 15 octobre, « Quels liens avec les territoires limitrophes ? »..
Carte 3. Alors que la population de la métropole institutionnelle stagne, celle des intercommunalités périphériques croît jusqu’à 2 % par an, en grande partie par le transfert d’habitants
Sources : AGAM/AUPA, Métropole Aix-Marseille-Provence, 2021[18]Op. cit..

Si, en matière d’habitat, la métropole n’existe pas sans sa périphérie, en matière d’emploi, le contraire était jusqu’à présent observable. Pour autant, là aussi les tendances donnent à voir une inversion des concentrations. 85 % des emplois salariés sont regroupés au sein des quinze principales communes du territoire métropolitain, dont Marseille et Aix. Entre 2008 et 2015, ce sont ces zones qui ont, en moyenne, puisque quelques disparités sont observables, connu un taux de création d’emplois (+3 % en moyenne), légèrement supérieur au reste du territoire métropolitain (+2,6 %). Néanmoins, l’essentiel est peut-être ailleurs. Le diagnostic du PLH met en évidence « une périurbanisation de l’emploi », qui se développe fortement ces dernières années. Un salarié sur deux travaille aujourd’hui dans une zone d’activités de périphérie plus ou moins éloignée des grands lieux d’emploi traditionnels (p. 75). Ce mouvement de morcellement des lieux d’activités ne s’accompagne pas d’un rapprochement entre emplois et résidence, au contraire, il a pour conséquence l’augmentation régulière des mouvements pendulaires et de la dépendance à la voiture individuelle sur des réseaux déjà saturés. Le schéma métropolitain de l’immobilier de bureau, rédigé en 2017 par les deux agences d’urbanisme du territoire (AGAM et AUPA), souligne également la spécificité de la métropole provençale dans laquelle près de 50 % de l’immobilier du bureau est créé hors de ses pôles économiques principaux avec quasiment aucun raccordement aux réseaux de TC.

La montée en puissance des franges

Les élus des différents territoires composant la métropole ont su intégrer ces diagnostics pour défendre leurs territoires de toute tentative de recentralisation des hommes et des activités. L’analyse des débats lors des conseils métropolitains, dans les comités de pilotage des différentes démarches communautaires ou dans la presse locale montre la façon dont la diversité des franges est devenue un argument de résistance et tend à structurer les débats en matière d’aménagement du territoire.

L’influence des maires périphériques transparaît dans l’organisation politique d’une métropole dans laquelle la quasi-totalité des vice-présidents métropolitains réunis par la présidente pour le nouveau mandat sont des opposants historiques à la nouvelle institution. Tous les discours visent aujourd’hui à entraver la consolidation des politiques métropolitaines au profit des territoires qui la composent. C’est notamment la feuille de route de Sophie Joissain, 5e vice-présidente chargée de la réforme de la métropole : « Dans le nouveau projet tel qu’il se dessine, la nécessité, c’est vraiment l’autonomie juridique et financière des territoires. La personnalité morale permet cette autonomie et en même temps d’approprier véritablement les compétences aux besoins des territoires »[19]Made in Marseille, 29 juillet 2020 [En ligne. Un discours repris par Georges Cristiani, 6e vice-président de la métropole délégué à la Concertation territoriale et Proximité, président de l’Union des maires des Bouches-du-Rhône et opposant historique à la métropole : « Que l’on fasse une métropole des transports ou de l’économie, oui, je suis d’accord : je trouve ça excellent ! Mais alors que l’on fasse seulement cela et qu’on laisse les communes faire ce qu’elles savent faire»[20]Gomet, par Jérémy ColladoEn ligne.

Les mêmes arguments sont développés dans les réunions de travail avec les différentes directions métropolitaines et leurs prestataires. Si les termes sont plus feutrés, le fond reste le même, comme en témoignent les prises de position des maires issus des élections de 2020 lors des réunions de préparation du SCOT : « La solidité économique de notre métropole repose sur la diversité de ses filières économiques. Cette diversification est donc un atout. Il faut se méfier de la spécialisation. Elle est souvent liée à la concentration économique […]. Il faut y faire attention. Les crises actuelles montrent que spécialisation et forte concentration peuvent être néfastes. La concentration est favorable pour certaines filières, mais pas pour l’ensemble du développement économique ». 


Ce raisonnement est également mis en avant par la plupart des élus en matière d’habitat, a fortiori depuis la crise de la Covid qui est venue fragiliser l’attractivité des centres urbains denses. Un consensus existe aujourd’hui pour un développement faisant la part belle à l’autonomie et l’attractivité des territoires périurbains métropolitains, que la faiblesse politique et économique de la ville centre ne permet pas de contrebalancer. « Concernant le développement économique, il faut prendre en compte la réalité. À la Duranne et dans la zone de l’Arbois, les entreprises ne veulent plus aller travailler car leurs salariés ne 
veulent plus venir dans de grandes zones embouteillées et complexes » ou encore « Il faut moduler la concentration économique qui appartient à des modèles du passé et aller vers de nouveaux espaces, types centres de coworking, dans des zones de village ». « Le développement numérique favorise la diversification des implantations économiques »[21]Paroles d’élus, compte rendu de réunions de travail, novembre 2020.. 


Du bon usage de la périphérie extérieure

La fragilité de la métropole provençale est renforcée par son instabilité périmétrale. Dès 2017, le gouvernement a fait état de sa volonté de la fusionner avec le département des Bouches-du-Rhône, en intégrant les trois EPCI de l’ouest du département qui n’avaient pas été absorbés en 2016. À cette fin, le Premier ministre a missionné le préfet de région, en septembre 2018, pour organiser une concertation « sur le périmètre de la métropole, notamment pour apprécier l’opportunité de procéder à une fusion intégrale de celle-ci avec le département des Bouches-du-Rhône, ainsi que le champ de compétence qu’elle doit exercer». Présenté au printemps 2019, le rapport du préfet de région expose plusieurs scénarios, mais renvoie à un projet de loi la mission de trancher, redoublant par là même les incertitudes institutionnelles. Les crises des gilets jaunes puis de la Covid ont eu raison de ces volontés de reconfigurations. L’avenir métropolitain est donc encore difficile à entrevoir, du fait même des hésitations du gouvernement qui peine à fixer les limites définitives de la métropole.

Les élus provençaux ont su se saisir de ces atermoiements pour développer des partenariats avec les territoires périphériques, contribuant ainsi à brouiller la perception des limites métropolitaines. C’est notamment la stratégie du CT du pays d’Aix qui, à travers les missions de son agence d’urbanisme, a su fédérer la quasi-totalité des EPCI et des communes au nord de son territoire jusque dans les Hautes-Alpes, se positionnant ainsi à l’articulation entre la côte méditerranéenne, placée sous l’égide de Marseille, et les lointains territoires ruraux des Alpes du Sud. Les élus demandent régulièrement que les documents stratégiques de la métropole, dont son SCOT, prennent en compte les connexions avec les territoires voisins, notamment les Alpes-de-Haute-Provence dans le cadre de la vallée des énergies au nord ou l’axe ouest-est vers l’Italie le long de l’A8 à travers le Var, une façon de diluer le territoire métropolitain dans sa périphérie.

Ce même brouillage des frontières institutionnelles se retrouve dans le Schéma Régional d’Aménagement, de Développement durable et d’Égalité des Territoires (SRRADET) de la région PACA, mais avec un objectif inverse (carte 4). L’institution régionale a bâti un discours militant visant à rappeler ce que doivent être les choix stratégiques de la métropole.

Carte 4. La nature des différents espaces au titre du SRRADET (source : région PACA, SRRADET).

La carte 4, longuement débattue avec les territoires, montre deux choses. La première est l’effacement des frontières institutionnelles des métropoles au profit d’une représentation plus conforme à la réalité d’un continuum d’occupation le long de la vallée du Rhône et de la côte méditerranéenne. Il n’est plus question ici de frontières institutionnelles, mais de gradients. La seconde est l’identification d’un enjeu central dans l’aménagement des métropoles de PACA, et notamment d’AMP. Vu depuis la région, il s’agit de rééquilibrer les politiques de développement à l’intérieur des quatre métropoles régionales en limitant les possibilités d’accueil des espaces périphériques au profit des « cœurs » de métropole, définis assez largement par ailleurs. Ce faisant, la région s’invite à travers ce document à portée réglementaire dans l’aménagement des nouvelles métropoles en découpant leurs espaces en plusieurs secteurs d’enjeux distincts. Du rouge foncé au blanc, le schéma régional contribue à donner une lecture du territoire métropolitain allant à l’encontre des représentations majoritaires de ses élus.

Quand les périphéries organisent les méthodes de travail

Dans ces conditions d’éclatement géographique et humain et de défiance vis-à-vis de l’institution métropolitaine, l’écriture d’un projet de territoire s’avère être un exercice délicat. Elle nécessite l’invention de méthodes de travail innovantes pour englober dans un projet collectif les 830 000 habitants de Marseille au bord de l’eau et les 1 340 habitants de la petite commune de Saint-Jean-de-Jaumegarde, lovés au cœur de la Provence.

C’est ce que donnent à voir les premiers pas du SCOT métropolitain dans le cadre duquel les services de la direction de l’aménagement ont multiplié les chemins de traverse pour tenter de concilier les différents morceaux du puzzle. Trois stratégies sont repérables, qui toutes trois évitent de poser frontalement les questions des relations entre villes centres et périphérie : la première relève de la multiplication des dispositifs de concertation et de coconstruction, la seconde vise à produire des éléments de consensus autour de la qualité de vie et des grands paysages typiques de la métropole, et la troisième consiste à renvoyer le règlement de problèmes ponctuels dans des « secteurs à enjeux » afin de ne pas trop contraindre par ailleurs l’ensemble des communes. Autant de stratégies qui prennent acte de l’impossible hiérarchisation des documents d’urbanisme (Offner, 2020[22]Op. cit.).

Co-construire pour rassurer,
au risque de se faire doubler

Le dossier de consultation du SCOT faisait de ce point un enjeu essentiel. Compte tenu des spécificités organisationnelles, les équipes mandataires étaient appelées à innover en matière de concertation et de coconstruction afin de convaincre quant à leur capacité à neutraliser les potentielles oppositions. À la lecture du dossier du groupement emmené par Devillers et Associés finalement retenu, ce n’est pas tant l’originalité de la démarche qui est frappante que le nombre de réunions prévues et le soin apporté à en définir le contenu. Trois types de réunions étaient attendus. Des réunions par territoire, afin d’appréhender au plus près les enjeux et les projets des différentes parties et désamorcer chaque situation de blocage le plus rapidement possible. Des réunions thématiques, permettant d’approfondir des enjeux spécifiques et transversaux. L’équipe mandatée devait travailler avec les services de la métropole afin de définir la surface à donner à ces groupes de travail pouvant rassembler, outre les élus et les techniciens du territoire, des experts indépendants afin d’enrichir les débats d’expériences extérieures si nécessaire. Enfin, il était également prévu des réunions par secteurs d’enjeux, à l’intersection de plusieurs conseils de territoire et pourtant de portée métropolitaine, tels les nœuds de communication, les grandes zones d’attraction commerciale, les grands massifs naturels ou encore l’étang de Berre.

Ces dispositifs de rencontres n’ont pour l’instant pas totalement tenu leurs promesses. Au contraire, la multiplication des réunions de travail a diminué leur audience auprès des élus comme des techniciens. Il a notamment été très difficile de mobiliser un nombre substantiel de maires, la plupart des échanges se bornant à rassembler services centraux de la métropole et vice-présidents thématiques des différents CT. Difficile alors de demander aux 92 maires, pour la plupart présents au conseil métropolitain, de valider des démarches auxquelles ils n’ont que peu participé. Stratégiquement, la plupart des CT ont su profiter des lenteurs induites par ce travail pour faire avancer leurs propres démarches sans attendre un positionnement métropolitain. L’élaboration du SCOT donne à voir une course de vitesse entre la jeune métropole et les parties qui la composent en matière d’aménagement et de planification. La mise en œuvre par les CT de leur PLUI avant même toute forme d’arbitrage en matière de choix stratégiques métropolitains permet d’inverser la hiérarchie exposée dans le code de l’urbanisme. Le CT 1, celui de Marseille, disposait déjà d’un PLUI adopté en décembre 2019. Dans cette course de vitesse, les CT d’Aix et d’Aubagne ont également lancé leur PLUI dès 2018 pour une approbation en 2023 au plus tard, leurs Projets d’Aménagement et de Développement Durable (PADD) ayant déjà été approuvés fin 2019. D’une façon identique, le CT de Salon envisage également de lancer le sien dès 2021. Il appartiendra donc à la métropole de caler les choix stratégiques du futur SCOT sur les décisions des parties.

Paysages et cadre de vie
comme plus petit dénominateur commun

Faute de pouvoir préciser ce que pourrait être l’armature urbaine, avec ses choix stratégiques, le parti a été pris de parler de qualité de vie et d’identité locale. Bien des rencontres avec des élus ont avant tout servi à établir un consensus autour des notions de qualité de vie et de grands paysages emblématiques. À partir d’une démarche visant à recenser et ordonner les situations vécues par les métropolitains, un certain nombre de motifs ont été proposés par le groupement D&A[23]Pour une description de cette expérience, voir : Evo M, Consales JN. (2019). « “Motifs” métropolitains », Urbanisme, n° 145.. Ils ont été débattus avec la Direction Agriculture-Forêt-Paysages et les agences d’urbanisme. Il s’agit de situations qui se retrouvent partout dans la métropole et pour lesquelles il est nécessaire d’établir des dispositions communes dans les documents d’urbanisme afin de garantir à chaque métropolitain un cadre de vie de qualité. 23 motifs types ont été définis à partir d’une reconnaissance photographique dans la métropole. Sur un territoire caractérisé à la fois par sa diversité et son étalement urbain, la démarche permettait de dépasser la séparation habituelle entre paysages ruraux et paysages urbains, et de travailler en finesse sur les limites d’urbanisation. Cette approche a assis l’idée d’un SCOT des proximités ancré dans le quotidien des habitants, à rebours d’une démarche descendante de planification imposée. Cette entrée par la qualité du quotidien a également permis de rassembler dans une même démarche l’ensemble des habitants et des élus, quelle que soit leur situation, du très urbain au très rural, en mettant l’accent sur la qualité de vie pour tous et en tout lieu.

À une autre échelle, la Mission de préfiguration de la métropole lancée par l’État dès 2012 avait choisi le même parti en mettant en avant la notion de grand paysage pour tenter de créer un consensus local autour de la nouvelle institution naissante[24]Dubois J. (2019). « Une métropole provençale toute neuve », Cahiers Popsu métropole AMP, n° 1, p. 9-16.. Dès 2012, le gouvernement a confié au préfet Théry la tâche de mobiliser l’ensemble des acteurs locaux afin de construire un discours métropolitain susceptible d’infléchir la position des élus. L’année 2013 est riche d’ateliers organisés par la préfecture, qui ont rassemblé plusieurs centaines de personnes. Si la plupart des élus locaux ont boycotté ces réflexions, en revanche bien des personnalités locales ont pu y défendre leurs idées. Les documents produits ont une valeur pédagogique, cherchant à convaincre les habitants et les élus de leur destin partagé. Dans la préface d’un document daté de 2012, Laurent Théry insiste sur les paysages et l’interculturalité : « Entre Rhône et Durance, mer et étang, de la plaine de La Crau aux massifs de Sainte- Baume et de Sainte-Victoire, ce territoire est exemplaire par la qualité de ses paysages, sa culture, son melting pot, sa lumière », avant d’aborder les enjeux d’inégalité sociale ou de congestion qui paraissaient des sujets moins consensuels[25]Projet métropolitain Aix-Marseille-Provence. Compte rendu des ateliers-projets, préfecture des Bouches-du-Rhône, 5 décembre 2012, p. 5.
. Quelques mois plus tard, le Document de convergence stratégique : vers une vision commune de la Métropole d’Aix Marseille Provence[26]Préfecture de région/Mission interministérielle pour le projet métropolitain Aix-Marseille-Provence, Vers une vision commune de la métropole d’Aix- Marseille-Provence. Document de convergence stratégique pour construire et partager la perspective métropolitaine. Vers.1, 1-07-2013, 15 p. 11 Les quatre piliers sont : la diversité nous réunit, Méditerranée tous azimuts, des cadres et des modes de vie qui posent questions, le défi du polycentrisme. s’appuie également sur l’identité locale, la Méditerranée, la nature généreuse ou encore ses paysages mondialement réputés.

Ces approches, dont on comprend l’intérêt stratégique, tranchent à l’époque avec les attentes des chefs d’entreprises ou des conseils de développement, beaucoup plus axés sur la nécessité de rattraper le retard économique de la métropole face à d’autres territoires. L’analyse des comptes rendus des commissions du Conseil de développement (CD) de la communauté urbaine MPM (Marseille-Provence-Métropole) autour de Marseille lors des cinq années précédant la naissance de la métropole donne à voir des discussions extrêmement précises sur les enjeux du développement économique, la saturation des moyens de transport ou la nécessité de penser des objets ou projets métropolitains assurant le rayonnement du territoire[27]Sur ce point, voir : Dubois J. (2019). Rapport de recherche La Métropole par les paysages (ou comment vaincre les réticences locales ?,programme de recherche POPSU 3, non publié.. Les CD des intercommunalités du département, rassemblant essentiellement des représentants du monde économique ou des experts en aménagement, promeuvent alors une vision libérale où les politiques publiques – de transports, d’aménagement de zones d’activités ou de structurations de filières d’excellence – sont mises au service de la compétitivité du territoire. La lecture du manifeste Métropole européenne Aix Marseille : pour la Métropole, la société civile s’engage, pré-projet métropolitain,publié en décembre 2012 par J. Boulesteix, président du CD de la communauté urbaine MPM, et J. Viard, alors vice-président de la communauté, est éclairante. Dans ce document largement signé et diffusé[28]Document de 28 pages signé par plus de 1 000 chefs d’entreprise, chercheurs, universitaires, artistes, responsables associatifs ou syndicaux, citoyens sans engagement politique partisan., l’accent est mis sur les métropoles créatrices de richesses, la nouvelle économie ou la nécessité de changer les cadres de la démocratie sur ce grand territoire. Les 75 pistes d’actions opérationnelles concernent le développement économique, les liens sociaux, la mobilité, la santé, etc.

Pour autant, la Mission de préfiguration ne s’est pas directement approprié ces réflexions et ces travaux. Le choix a été fait d’une approche plus pédagogique fondée sur la mise en avant de diagnostics généraux, d’approches globales ou peu opérationnalisées, et de témoignages d’acteurs. En dépit des préconisations des conseils de développement ou du patronat local, dans un contexte politique tendu, il ne s’agissait pas de déposséder les élus de leur capacité à décider.

La reconnaissance des paysages comme élément structurant du projet métropolitain est donc récente. À la suite des travaux de la mission de préfiguration, les trois équipes de la consultation urbaine et métropolitaine (Devillers et Associés, Lin et Seura) vont reprendre et approfondir cette approche. Leurs rendus ont été synthétisés dans l’ouvrage La Métropole par le projet (Théry, 2016)[29]Théry L (dir.). (2016). La Métropole par le projet, Aix Marseille Provence, Marseille, Parenthèses, 250 p.. L’ouvrage revient sur la démarche de la consultation et présente les principaux résultats des équipes qui toutes trois appellent à un changement d’échelle. Le projet de l’équipe Devillers, intitulé « Métropole Monde, Métropole des proximités », insiste sur la qualité des espaces du quotidien. Les intitulés des deux autres équipes sont plus clairs encore. L’équipe Lin parle de « Métropole Capital Paysage » et celle de Seura milite « Pour une métropole encore plus spectaculaire ». En décalant le regard sur un territoire élargi, la construction métropolitaine initiée par l’État va placer les grands paysages au centre du projet pour au moins trois raisons. Premièrement, cette nouvelle échelle vient mettre en évidence une urbanisation en fond de vallons fortement contrainte par les reliefs. Elle dévoile la place prééminente des « morceaux de nature » et le cloisonnement des territoires urbanisés qu’il s’agit d’assembler. Cette « nature » vient faire le lien. Hier, dans les anciens SCOT, reléguée à un élément de contexte accompagnant le déploiement de la tache urbaine, elle devient un élément central, rotule qui relie les territoires. Deuxièmement, la nature et les paysages convoquent le bien-vivre et un sentiment de fierté locale, comme plus petit dénominateur commun d’une métropole née dans la douleur. Cette mise en avant s’adresse tout autant aux résidents-électeurs qu’à la promotion de l’attractivité du territoire dans un contexte de compétition entre métropoles. Enfin, ces entrées constituent un passage obligé de l’urbanisme post-Grenelle, pointant aussi les retards du territoire en matière de protection des espaces naturels et agricoles ou de maintien de la biodiversité. Et le préfet Théry de conclure : « le choix, qui pourrait passer pour convenu, puise en fait sa pertinence dans la singularité d’Aix-Marseille-Provence. L’omniprésence d’une nature généreuse, et pourtant menacée par la poussée urbaine, autant qu’une exploitation intensive des ressources définit largement la métropole… » (Théry, 2016, p. 12[30]Op. Cit.).

Après trois ans de travaux, alimentés en études et réflexions par la mission de préfiguration, le paysage est placé au centre du regard. Cela permet de mettre les communes d’accord et de ne pas s’enfermer dans des querelles d’armature urbaine ou de partage des richesses. Les deux cartes ci-dessous montrent ce basculement.

Carte 5. Surfaces de territoires de SCOT hors zones protégées, issu d’un travail de recollement des cinq SCOT préexistants à la métropole (source : AGAM-AUPA. 2013. Le regard est focalisé sur les secteurs bâtis et laisse en blanc les grands espaces naturels comme des éléments périphériques).
Carte 6. Quatre ans plus tard, les grands morceaux de nature reviennent au centre du projet. Des enjeux croisés aux intentions de projets.
Source : Mission interministérielle pour le projet métropolitain Aix-Marseille-Provence, p. 69[31]Mission interministérielle pour le projet métropolitain Aix-Marseille-Provence. (2016). Carnet d’acteurs « Ressources naturelles »..

La méthode des secteurs d’enjeux pour ne pas parler du reste

Difficile d’opérer des choix stratégiques lorsque tous les territoires, des plus centraux aux plus périphériques, sont mis sur un pied d’égalité pour des questions de susceptibilité politique. La métropole est néanmoins confrontée à certains grands déséquilibres pointés notamment par les services locaux de l’État ou les milieux patronaux. Pour y répondre et en l’absence de vision d’ensemble, il a été décidé d’opérer des focus sur des territoires considérés comme « à enjeux ». Si le principe fait aujourd’hui relativement consensus, du moins auprès des techniciens – pourtours de l’étang de Berre en lien avec la crise de la pétrochimie, mutation des grandes zones d’activités ou commerciales… –, le nombre et la localisation de ces secteurs n’ont pas encore été politiquement arrêtés. En revanche, la notion, plus large, un temps évoquée, de « méta secteur d’enjeu » permettant d’embrasser de larges parties du territoire métropolitain a été abandonnée faute de consensus. Pour autant, la conception de projets sur ces territoires à enjeux, comme les modalités de leurs transcriptions dans le futur SCOT, n’ont pas été abordées à ce jour. Bien qu’ils correspondent à l’identification de secteurs stratégiques susceptibles de mobiliser les forces de la toute jeune métropole, ils constituent tout autant une façon de botter en touche en renvoyant l’affirmation de choix forts à plus tard. Si la démarche n’est pas nouvelle, d’autres territoires métropolitains l’ayant utilisée, à des échelles différentes il est vrai, à l’image des SCOT du Grand Lyon, de la Métropole de Lille ou de Nantes Saint-Nazaire, difficile dans le cas provençal d’y voir une volonté proactive de faire des zooms stratégiques.

Conclusion

À cette échelle, l’élaboration d’un SCOT métropolitain conduit à la multiplication des artifices afin de laisser à chaque partie du territoire l’autonomie à laquelle elle aspire. C’est donc le paradoxe de ce changement d’échelle qui conduit à des résultats opposés à ce que le législateur voulait imposer. Si le discours savant ou l’expertise d’État ont depuis longtemps mis en évidence les formes de dépendance fonctionnelle entre les différentes composantes métropolitaines, la naissance d’AMP a contribué à raviver le débat sur l’entre-soi communal comme base du contrat politique entre les élus et leurs électeurs, et ce, avant même la crise de la Covid. Il est encore trop tôt pour voir se dessiner un nouveau consensus. Pris en tenaille entre les coups de boutoir des élus métropolitains et les injonctions de l’État, tant les services métropolitains que les bureaux d’études n’osent pas encore inverser le regard : faudra-t-il placer le périurbain au cœur du projet métropolitain ? Mais alors que faire des centralités denses ?

La mise en métropole du territoire provençal aboutit paradoxalement au renouveau du fédéralisme municipal et vient nous rappeler la pertinence des analyses en termes d’arrangements locaux mis en évidence de longue date (Desage et Guéranger, 2011[32]Desage F, Guéranger D. (2011). La politique confisquée. Sociologie des réformes et des institutions intercommunales, Bellecombe, Éditions du Croquant.). Loin de prendre la forme d’un big-bang institutionnel, l’instauration des métropoles par la loi vient prolonger des arrangements locaux préexistants (Lefeuvre, 2015[33]Lefeuvre MP (dir.). (2015). Faire métropole, de nouvelles règles du jeu ?, Paris, Le Moniteur.). Le courant de pensée du new regionalism avait pourtant pointé les écueils de démarches aussi intégratrices. Pour ses promoteurs (Frisken et Norris, 2001[34]Frisken F, Norris DF. (2001). « Regionalism reconsidered », Journal of urban affairs, n° 23(5), p. 467-478. ou Savitch et Vogel, 2000[35]Savitch HV, Vogel RK. (2000). « Metropolitan Consolidation versus Metropolitan Governance in Louisville », State and Local Government Review, n° 32(3), p. 198-212.), la réponse aux grands enjeux des villes américaines de la fin du XXe siècle ne reposait pas sur la nécessité de profondes réformes institutionnelles, mais bien plutôt sur la mise en relation des institutions existantes. Dans ces travaux, dans le droit fil de la littérature sur la gouvernance, l’accent est bien davantage mis sur les processus de négociation que sur la création de nouvelles structures. Cette plasticité s’applique tout autant à l’espace. Le territoire métropolitain pris en compte est alors susceptible de varier en fonction de la nature des problèmes à traiter. La France a pris le chemin inverse. Ce faisant, à rebours de bien des enseignements des sciences politiques, économiques ou géographiques des dernières décennies, elle a pris le parti d’enserrer la question métropolitaine dans une définition avant tout institutionnelle et administrative. Même anciens, bien des travaux étrangers ont montré que les exemples de macro-institutions territoriales dans les pays occidentaux sont à la fois très peu nombreux et rarement convaincants (Kübler, 2005[36]Kübler D. (2005). « Démocratie et gouvernance d’agglomération : quelques leçons européennes », Pouvoirs locaux. ; Lefèvre, 1998[37]Lefèvre C. (1998). « Metropolitan government and governance in Western countries: a critical review », International journal of urban and regional research, n° 22(1), p. 9-25.). Après trois ans de travail, les limites de la construction d’un SCOT métropolitain sont sans équivoque sur le territoire provençal qui donne à voir une configuration politique particulière fondée sur la revanche des périphéries au sein même de l’institution métropolitaine. En matière d’aménagement, les périphéries sont tout autant une carte à jouer qu’une épine dans le pied de ces nouveaux ensembles institutionnels.


[1] Demazière C, Desjardins X, Sykes O. (2020). La gouvernance des métropoles et des régions urbaines. Des réformes institutionnelles aux réformes territoriales, Paris, PUCA.

[2] Halbert L. (2010). L’avantage métropolitain, Paris, PUF, coll. « La ville en débat ».

[3] Le Blanc A et al. (2014). Métropoles en débat : (dé)constructions de la ville compétitive, Paris, Presses de Paris Ouest.

[4] Loisel M, Rio N, Talandier M. (2016). « L’économie métropolitaine francilienne ne se limite pas à La Défense ! », Métropolitiques, 17 octobre [En ligne].

[5] Veltz P. (2014), Mondialisation, villes et territoires. L’économie d’archipel, Paris, PUF.

[6] Ghorra-Gobin C. (2015). La métropolisation en question, Paris, PUF, coll. « La ville en débat ».

[7] Douay N. (2013). « La planification urbaine française : théories, normes juridiques et défis pour la pratique », L’Information géographique, n° 77(3), p. 45-70.

[8] Padioleau JG, Demesteere R. (1991). « Les démarches stratégiques de planification des villes. Origines, exemples et questions », Les Annales de la recherche urbaine, n° 51, p. 29-40.

[9] Propos tenus lors du colloque « #Métropoles​ #Résilientes », organisé à l’Assemblée nationale, les 21-22 janvier 2021, table ronde matin du 21 janvier [En ligne].

[10] Offner J.-M. (2020). Anachronismes urbains, Paris, Presses de la Fondation Nationale des Sciences Politiques.

[11] Morel B. (1999). Marseille, naissance d’une métropole, Paris, L’Harmattan, coll. Géographies en liberté.

[12] OCDE. (2013). Vers une croissance plus inclusive de la métropole Aix-Marseille. Une perspective internationale, OCDE.

[13] Dubois J. (2013). MPM dans le contexte métropolitain : éléments de mise en débat, programme de recherche POPSU 2, GIP AIGPPAU, Plan urbain, ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, plateforme d’observation des projets et stratégies urbaines, 32 p.

[14] Du nom de la liste d’union de la gauche et des écologistes qui a emporté les dernières élections municipales à Marseille.

[15] Olive M. (2015). « Métropoles en tension. La construction heurtée des espaces politiques métropolitains », Espaces et sociétés, n° 160-161(1-2), p. 135-151.

[16] Diagnostic final, PLH métropolitain, Métro AMP, AUPA, AGAM et ADIL, p. 69.

[17] Métropole Aix-Marseille-Provence. (2021). « Relations de voisinage de la Métropole Aix-Marseille-Provence », webinaire du 15 octobre, « Quels liens avec les territoires limitrophes ? ».

[18] Op. cit.

[19] Made in Marseille, 29 juillet 2020 [En ligne].

[20] Gomet, par Jérémy Collado, 26 août 2014 [En ligne].

[21] Paroles d’élus, compte rendu de réunions de travail, novembre 2020.

[22] Op. cit.

[23] Pour une description de cette expérience, voir : Evo M, Consales JN. (2019). « “Motifs” métropolitains », Urbanisme, n° 145.

[24] Dubois J. (2019). « Une métropole provençale toute neuve », Cahiers Popsu métropole AMP, n° 1, p. 9-16.

[25] Projet métropolitain Aix-Marseille-Provence. Compte rendu des ateliers-projets, préfecture des Bouches-du-Rhône, 5 décembre 2012, p. 5.


[26] Préfecture de région/Mission interministérielle pour le projet métropolitain Aix-Marseille-Provence, Vers une vision commune de la métropole d’Aix- Marseille-Provence. Document de convergence stratégique pour construire et partager la perspective métropolitaine. Vers.1, 1-07-2013, 15 p. 11 Les quatre piliers sont : la diversité nous réunit, Méditerranée tous azimuts, des cadres et des modes de vie qui posent questions, le défi du polycentrisme.

[27] Sur ce point, voir : Dubois J. (2019). Rapport de recherche La Métropole par les paysages (ou comment vaincre les réticences locales ?,programme de recherche POPSU 3, non publié.

[28] Document de 28 pages signé par plus de 1 000 chefs d’entreprise, chercheurs, universitaires, artistes, responsables associatifs ou syndicaux, citoyens sans engagement politique partisan.

[29] Théry L (dir.). (2016). La Métropole par le projet, Aix Marseille Provence, Marseille, Parenthèses, 250 p.

[30] Op. Cit.

[31] Mission interministérielle pour le projet métropolitain Aix-Marseille-Provence. (2016). Carnet d’acteurs « Ressources naturelles ».

[32] Desage F, Guéranger D. (2011). La politique confisquée. Sociologie des réformes et des institutions intercommunales, Bellecombe, Éditions du Croquant.

[33] Lefeuvre MP (dir.). (2015). Faire métropole, de nouvelles règles du jeu ?, Paris, Le Moniteur.

[34] Frisken F, Norris DF. (2001). « Regionalism reconsidered », Journal of urban affairs, n° 23(5), p. 467-478.

[35] Savitch HV, Vogel RK. (2000). « Metropolitan Consolidation versus Metropolitan Governance in Louisville », State and Local Government Review, n° 32(3), p. 198-212.

[36] Kübler D. (2005). « Démocratie et gouvernance d’agglomération : quelques leçons européennes », Pouvoirs locaux.

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